Tourné à l’été 2024, One more show, coréalisé par l’Egyptienne Mai Saad et le Palestinien Ahmed al-Danaf, raconte le quotidien d’une petite troupe,le Free Gaza circus.
Au milieu des décombres, un clown et des jongleurs. Malgré la guerre et la faim, les circassiens palestiniens du Free Gaza circus ont poursuivi leurs représentations, inspirant ce documentaire. Ahmed al-Danaf, cadreur, qui se trouve toujours dans la bande de Gaza, a accompagné le cirque et transmis ses images à la réalisatrice vivant au Caire malgré les nombreux obstacles.
« Communications coupées, difficultés de déplacement, dangers constants et manque d’équipement », a détaillé à l’AFP le cadreur de 26 ans, contacté via WhatsApp.
« Je devais parfois marcher sur de longues distances pour pouvoir envoyer les rushes mais j’avais à coeur de mener le projet à bien », ajoute-t-il. « C’était la première fois que j’entendais parler d’un film évoquant le quotidien à Gaza, pas juste les bombes et la souffrance ».
Troupe dispersée
Mai Saad explique avoir voulu apporter un éclairage sur « la vie de tous les jours en période de génocide » – un terme utilisé par Amnesty International et d’autres ONG de défense des droits humains mais vigoureusement rejeté par Israël comme « mensonger » et « antisémite ».
« Dans l’actualité, les gens de Gaza (…) se résument à des chiffres », déplore la cinéaste de 41 ans.
Le documentaire, mêlant humour, fatigue et peur incessante des frappes, a remporté le prix du public au festival du Caire qui s’est tenu du 12 au 21 novembre 2025.
On y voit la troupe, dont le lieu habituel de répétitions, au coeur de la ville de Gaza, a été détruit, se produire dans des écoles reconverties en centres d’accueil, des camps de déplacés surpeuplés ou des quartiers en ruine.
La plupart des images ont été tournées dans le sud du territoire palestinien, où les artistes se sont à l’époque réfugiés. Ils sont filmés partageant le peu de maquillage qui leur reste et s’entraidant pour enfiler leurs costumes, sans miroir à leur disposition.
Un clown au gros nez rouge jongle et se livre à des numéros devant des dizaines d’enfants chantant, riant et applaudissant à tout rompre.
« Nous voulions qu’ils voient autre chose que la guerre et la destruction », confie le fondateur de la troupe, Youssef Khader, joint par téléphone.
Mais au fil des mois et de l’intensification des bombardements israéliens, la troupe s’est dispersée et a été endeuillée. Deux artistes sont morts dans des frappes, trois autres blessés.
« Epuisés par la famine »
Plus de 70.000 Gazaouis ont été tués depuis le début de la guerre, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l’autorité du Hamas, et dont les chiffres sont jugés fiables par l’ONU.
L’attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles.
En juillet 2025, alors que l’ONU dénonçait une situation de famine dans certaines parties du territoire palestinien, le cirque et ses membres « épuisés par la faim » ont dû suspendre leur activité.
« Il y a eu des jours où on ne trouvait rien à manger. J’achetais 20 grammes de sucre pour 15 dollars (13 euros) et parfois il ne restait que le lait infantile pour garder de l’énergie », raconte Youssouf Khader.
Les circassiens ont finalement repris leur activité, en réduisant la voilure, après la trêve fragile entrée en vigueur le 10 octobre.
Si les acteurs de ce projet n’ont pu assister à la première, Ahmed al-Danaf a virtuellement foulé le tapis rouge grâce à une connexion internet avec Mai Saad. L’argent du prix (20.000 dollars) servira à rebâtir des locaux pour le cirque à Gaza, a promis la réalisatrice egyptienne.
Lobna Monieb © Agence France-Presse



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