Avec Un Conte d’automne, Julien Fisera s’inspire des albums jeunesse de Catharina Valckx pour raconter la rencontre de deux fillettes en marge dans un univers ouvertement fantaisiste. Si le spectacle génère des images superbes et de jolies inventions langagières, il peine cependant à nous transporter plus loin que sa situation première.
Ce qui frappe au premier abord, c’est le décor. Cet igloo de tissu et son extension qui campe au centre et cache encore ses mystères. A jardin, Prune, petite fille délurée, entre en comptant ses pas, une charrette orangée qu’elle tire à bout de bras. Affublée d’une cagoule rouge, en collant, short et grosses baskets, la demoiselle, silhouette colorée et fantaisiste, ressemble à un personnage de dessin animé ou mieux, de livre pour enfants. Et ça tombe bien parce qu’Un Conte d’automne emprunte son univers à l’imaginaire de Catharina Valckx, autrice et illustratrice de littérature jeunesse, en l’occurrence à ses albums mettant en scène une souris adorable, Totoche.
Prune fait une fugue, apprend-on rapidement. Elle a quitté le foyer familial, la tripotée de frères et sœurs encombrants, pour découvrir le monde, inventer sa vie, grandir en somme. Arrivée à l’orée de cette forêt, dans un environnement dépourvu de tout réalisme, elle pose bagage et déploie sa tente Quechua, ce qui donne lieu à une scène amusante et légère où la gamine se débat dans l’habitacle, chrysalide temporaire autant que poste d’observation. Premier corps à corps avec les éléments. Le ton est donné, un burlesque léger. Qui ne prête pas à s’esclaffer mais à sourire de temps en temps. Dans ce monde-là, rien de grave ne peut arriver, pas de loup, pas de dragon à l’horizon, chaque séquence est motivée par la découverte et la nouveauté. Car à peine installée, Prune réalise qu’elle n’est pas seule. Maggi habite la cabane d’à côté qui se révèle alors dans son assemblement de couleurs et ses transparences. Scénographie au demeurant de toute beauté, si l’on ajoute au décor la douceur des lumières, la séquence en ombres chinoises et la qualité des projections vidéo en fond de scène, tantôt paysage forestier, tantôt paysage cosmique éclairé d’étoiles.
Féérique, la cabane de Maggi accueille la rencontre des deux filles, leurs conversations à hauteur d’enfant, leurs chamailleries, leur amitié naissante en fin de compte. Son côté cocon est un rempart au monde extérieur, une bulle où exister. Les deux comédiennes s’en donnent à cœur joie pour donner corps à l’enfance. Voix dans les hauteurs, gestuelle agrandie, débordantes d’énergie, elles interprètent ces fillettes de fable avec un entrain communicatif. Pour elles, tout est jeu. Une banane devient téléphone, boire du café permet d’éviter de dormir, l’ennui est le pire ennemi et la nuit une amie. On reste sceptique cependant sur ce récit déshabillé jusqu’à l’os qui ne prête pas à une évolution visible des personnages et tourne un peu en rond sur lui-même. Avec, à un moment donné, la désagréable impression d’être enfermé dans un livre plutôt que renvoyé à son champ de possibles. En manque d’aventures et d’adhésion. Comme si, en restant dans ce même campement de fortune et malgré son potentiel onirique, nous faisions du sur-place avec des personnages en surface.
La langue est belle pourtant, étonnante, elle alterne le prosaïque et le poétique et certaines formules font des étincelles. Mais l’ensemble, malgré de jolies trouvailles, des éclats de jeux, et un sens évident des images, peine à aller plus loin que le tableau chatoyant qui nous est donné à contempler. De fait, la circulation des émotions ne passe pas la rampe tandis que la situation de base ne décolle pas tant que ça. On aurait tellement aimé plonger sans bouée dans cet échange gourmand plutôt que les regarder jouer (dans tous les sens du terme) à distance.
Marie Plantin – www.sceneweb.fr
Un Conte d’automne
Texte & mise en scène Julien Fišera
Inspiré de l’univers de Catharina Valckx
Espace François Gauthier-Lafaye
Lumière Kelig Le Bars
Costumes Clémence Delille
Vidéo Jérémie Scheidler
Musique Anthony Laguerre
Collaboration artistique Nicolas Barry
Régie générale Jean-Gabriel Valot
Régie Adrien Bonnin
Administration et production Liana Déchel
Diffusion Drôles de Dames/Noëlle Barthelemy Géranton
Avec Myriam Fichter & Xaverine Lefebvre (ou Eléonore Alpi)PRODUCTION Compagnie Espace commun. COPRODUCTION Les Bords de Scènes, Grand-Orly Seine Bièvre – Centre culturel Jean Houdremont, La Courneuve – Théâtre Brétigny, scène conventionnée d’intérêt national arts & humanités – scène nationale de l’Essonne Agora-Desnos – Théâtre de Corbeil-Essonnes – Espace Marcel Carné de St-Michel-sur-Orge – Espace culturel Boris Vian des Ulis. ACCUEILS EN RÉSIDENCE Centre culturel Jean Houdremont, La Courneuve – Amin Théâtre, Le TAG – Le Silo au Mérévillois – Scène nationale de l’Essonne Agora-Desnos – Théâtre de Corbeil-Essonnes. AVEC LE SOUTIEN DE Direction régionale des Affaires culturelles d’Île-de-France – conseil départemental de l’Essonne – Dispositif de création jeune public multi-partenariale en Essonne – Fonds d’insertion pour Jeunes Comédiens.nes de l’ESAD-PSPBB. Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National.
Le spectacle est lauréat de l’appel à candidature 2022/2023 pour une résidence de création Jeune Public multi-partenariale en Essonne.Durée :45 min
A partir de 6 ansDu 7 au 9 février 2024
Baschet à St-Michel-sur-OrgeDu 18 au 29 mars 2024
Théâtre DunoisDu 3 au 7 avril 2024
Théâtre de la Ville ParisLes 23 et 24 avril 2024
Ulis
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