Tout-Moun : Créolisation des imaginaires

Photo Laurent Philippe

Héla Fattoumi et Eric Lamoureux imaginent un spectacle autour de la pensée du martiniquais Edouard Glissant avec Tout-Moun. Un tissage habile des disciplines et imaginaires qui déploie une vision d’un monde créolisé.

De grands tissus torsadés, aux allures de lianes pendent du plafond. Les interprètes investissent l’espace, les uns après les autres, jouent avec la mise en scène. Passagers dans ces paysages qui laissent imaginer la végétation luxuriante. A la direction du Centre chorégraphique de Bourgogne Franche-Comté depuis 2015, Héla Fattoumi et Eric Lamoureux déploient une danse inspirée d’un monde d’imaginaires, où souvent, la scénographie est élaborée, à l’instar d’OSCYL où les interprètes avaient comme des partenaire de scène des grandes sculptures humanoïdes, qui tanguaient comme des culbuto. Tout-Moun (en créole “tout le monde”) investit la pensée du poète-romancier martiniquais Edouard Glissant, faisant référence à son ouvrage paru en 1993 Tout-Monde. La compagnie Via danse tisse un canevas formant un tout syncrétique qui témoigne sur scène de la pensée de Glissant sur la créolisation du monde.

Sur le plateau sombre, chacun déploie une partition dansée différente. Elles ont en commun de faire onduler le buste, les bras et les jambes dans un flux constellé de ruptures. A l’image de la pensée de Glissant, les pratiques et les imaginaires se croisent sur scène. Raphaël Imbert déambule parmi les interprètes qui serpentent, faisant sonner les notes lancinantes, jazzy de son saxophone. Un canevas se forme, grâce à des gestuelles sensuelles, épiques, festives. Elles font écho aux lianes de tissus qui s’emmêlent, se démêlent, puis se déploient. Elles deviennent des écrans pour diffuser des images, une superposition de sens, d’imaginaires venus de pays et d’époques différentes.

L’île de la Martinique se dessine sur le sol, des plantes apparaissent sur les pans de tissus, sur les costumes lamés argentés des interprètes. Ces enchevêtrements de références, d’identités construisent ce monde créole multiple. En convoquant cette diversité de médiums, dont des extraits de ses prises de paroles sont d’ailleurs diffusés, le geste perd de son abstraction, sous-tendu par de multiples couches de sens. Guidant les imaginaires pour ne pas perdre son public, Tout-Moun est surtout un prisme pour regarder le monde, dans les pas de Glissant. 

Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr

Tout-Moun
Conception : Héla Fattoumi – Éric Lamoureux
Chorégraphie en collaboration avec les interprètes : Sarath Amarasingam, Meriem Bouajaja, Juliette Bouissou,
Mohamed Chniti, Chourouk El Mahati, Mohamed Fouad, Mohamed Lamqayssi, Johanna Mandonnet, Yaël Réunif,
Angela Vanoni

Composition musicale et interprétation : Raphaël Imbert (saxophone) et Benjamin Lévy (logiciel OMax)

Collaborateur artistique, plasticien : Stéphane Pauvret
Création lumières : Jimmy Boury
Création costumes : Gwendoline Bouget, assistée de Corto Tremorin

Direction technique : Thierry Meyer
Régie son : Valentin Maugain
Régie lumière : Manon Bongeot
Régie costumes : Hélène Oliva

Production : VIADANSE Centre chorégraphique national de Bourgogne Franche-Comté à Belfort / Direction
Fattoumi – Lamoureux

Coproduction : Chaillot – Théâtre national de la Danse, Scène nationale du Sud-Aquitain, Compagnie Nine Spirit

Durée : 1h10

Le Théâtre, Scène nationale de Mâcon
23 novembre 23

Chaillot – Théâtre national de la Danse
10, 11 et 12 janvier 24

Le Tangram, Scène nationale d’Évreux-Louviers
30 janvier 24

 DSN, Scène nationale de Dieppe
1er février 24

Le Grand Angle – Voiron
16 février 24

Quinzaine de la Danse – La Filature, Scène nationale de Mulhouse
12 mars 24