Vous avez vu 81 Avenue Victor Hugo, la pièce d’actualité n° 3. Nous vous écrivons aujourd’hui pour vous informer de la situation du collectif du 81 avenue Victor-Hugo, dont sont issus les acteurs du spectacle, et solliciter votre soutien.
Le spectacle, si vous vous en souvenez, racontait la violente et paradoxale situation dans laquelle se trouvent prises les personnes sans-papiers qui vivent au 81, avenue Victor-Hugo à Aubervilliers. Beaucoup d’entre elles travaillent mais sont condamnées par l’arbitraire des lois de notre pays au travail au noir ou clandestin, et se retrouvent coincées dans une situation kafkaïenne inextricable : pour être régularisé, il faut pouvoir justifier d’un contrat de travail, mais comment faire un contrat de travail à une personne sans-papiers ?
Le fait que des hommes se dressent avec courage pour dire l’insupportable de leur situation sur une scène de théâtre, qu’ils fassent la claire démonstration de l’absence du droit, appuyés par le soutien du public et l’attention de la presse, a poussé Didier Leschi, alors préfet à l’égalité des chances de la Préfecture de Bobigny à venir assister à la pièce. Sensible à la singularité de leur aventure en tant que collectif, il a alors promis de regarder avec bienveillance les dossiers et de régulariser l’ensemble du collectif « au fil de l’eau ».
Pour maintenir vive cette promesse et continuer à faire entendre l’intenabilité de nos lois, nous avons continué et continuons à jouer le spectacle : au Festival d’Avignon, au festival Homo Novus de Riga, à Marseille, bientôt au Festival d’Automne à Paris…
Car la promesse est ambiguë : la préfecture de Bobigny a en effet décidé d’assouplir ses critères dans l’examen des dossiers, mais elle a posé une condition à ces régularisations : la présentation pour chacun d’eux d’une promesse d’embauche. Cette condition minimale demeure insurmontable pour la plupart alors même qu’ils travaillent. Ces promesses sont en effet très difficiles à obtenir : soit que les patrons craignent des contrôles mettant au jour le recours à des travailleurs illégaux, soit parce qu’ils gagnent à garder à leur merci une main d’œuvre invisible, sans droits ni exigences salariales.
Devant ces inextricables difficultés, en collaboration avec le collectif et le théâtre de La Commune, nous avons travaillé à obtenir ces promesses d’embauches. Nous avons sollicité les réseaux associatifs et les entreprises culturelles que nous connaissions. 41 personnes ont pu ainsi être régularisées, et 22 dossiers sont actuellement en cours de traitement. Mais les forces dont nous disposons sont insuffisantes. Et il reste toujours une vingtaine de personnes sans-papiers car ne pouvant fournir de promesse d’embauche.
Bientôt, la porte qui a été entrouverte par la préfecture risque de se refermer sur le collectif comme un piège. Une nouvelle préfète a été nommée et elle demande au collectif de quitter le squat du 81, avenue Victor-Hugo d’ici le 20 juin. Les personnes qui ont déjà été régularisées sont à priori assurées d’être relogées, mais les autres seront mises à la rue. De plus, la préfecture fait peser la menace d’OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français) pour ceux qui chercheraient à résister à l’expulsion dans le but de diviser la force politique qui fait l’union du collectif.
Nous ne pouvons l’accepter. Nous avons donc demandé un délai pour pouvoir mener à terme la régularisation de tout le collectif, comme cela avait été envisagé au départ par l’ancien préfet. Quand ces 20 personnes auront été régularisées, elles pourront quitter le lieu qui leur sert aujourd’hui d’abri. Mais sans titre de séjour comment pourraient-elles espérer trouver un logement ?
Devant l’urgence de la situation, nous nous permettons de lancer un appel. Si vous êtes en mesure de fournir une telle promesse d’embauche pour l’un d’eux, vous pouvez prendre contact avec le théâtre de La Commune qui vous expliquera la procédure à suivre. Il doit s’agir de contrat en CDI aux ¾ temps minimum (homme de ménage, garde d’enfant, jardinier, agent d’accueil, travaux dans le bâtiment, etc. )
Soyons clair, il s’agit de défaire le cercle infernal dans lequel se trouvent pris nos amis. Il s’agit de leur permettre d’obtenir des papiers pour qu’ils puissent ensuite trouver un logement pérenne, un travail déclaré, et leur permettre ainsi de mener une vie décente.
Nous espérons que cette lettre trouvera en vous un écho.
Et nous vous remercions pour votre soutien passé et futur.
Pour résumer :
1/ nous vous demandons, si vous le pouvez, de nous aider à établir des promesses d’embauche. Le théâtre de La Commune vous expliquera la démarche, qui est simple, un peu contraignante sur le plan administratif (fournir des pièces justificatives) mais qui ne vous engage pas de façon définitive. Le Théâtre peut vous aider à les remplir.
Écrire à :
direction@lacommune-aubervilliers.fr
ou téléphoner au +33 (0)1 48 33 16 16
2/ nous vous demandons d’écrire au Préfet du 93, M. Galli, et à Mme Benrabia (Préfète à l’égalité des chances) pour demander que l’engagement pris par l’ancien Préfet Leschi soit maintenu, qu’il n’y ait pas rupture de la parole de l’Etat, que la situation de nos amis soit traitée avec l’intelligence et la confiance qu’avait instaurées M. Leschi.
– que nos amis aient le temps de déposer leurs promesses d’embauche
– que l’expulsion du 20 juin soit abandonnée; ou si ça n’est pas possible, que nos amis en attente d’examen de leur situation, soient relogés ensemble. Il existe à Aubervilliers un local désaffecté, ancienne gendarmerie, propriété de l’Etat, qui sert aujourd’hui d’hébergement d’urgence, et qui peut aisément accueillir nos amis. Il est important qu’ils ne soient pas renvoyés à la rue, et qu’ils demeurent ensemble. La solution existe à Aubervilliers!
Écrire à :
M. Le Préfet/ Mme La Préfète à l’égalité des chances
préfecture de Bobigny- 1, esplanade Jean Moulin – 93007 Bobigny Cedex
3/nous vous invitons à nous rejoindre lors d’un rassemblement de soutien, mercredi 15 juin à partir de 14h30 devant la préfecture de Bobigny, 1 esplanade Jean Moulin, Bobigny (métro ligne 5, station Bobigny Pablo Picasso).
« La lutte continue, on n’est pas fatigués ».
Merci.
Communiqué de l’équipe artistique du 81 Avenue Victor Hugo,
Olivier Coulon-Jablonka, Barbara Metais-Chastanier, Camille Plagnet
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