Repéré chez Les Chiens de Navarre, le comédien signe un premier seul en scène avec un humour décapant.
C’est l’histoire d’un enfant qui prend conscience de la mort à cause de Michel Berger. On est au début des années 1990, au beau milieu de l’été. Solal Bouloudnine a six ans, il passe ses vacances en famille dans une maison qui jouxte celle du compositeur de Starmania, sur la presqu’île de Saint-Tropez, à Ramatuelle. À côté, le chanteur dispute une partie de tennis en plein cagnard et s’effondre sur le cours, succombant à une crise cardiaque. Le petit Solal entend le vacarme, les sirènes de pompiers, les larmes des proches et l’hystérie collective, et il ne s’en remettra jamais ; comme tout le monde au fond… Enfin, pas tout à fait… Depuis, Solal Bouloudnine pense à la mort tout le temps, c’est devenu obsessionnel, pathologique, anormal. Il en a tiré un spectacle, son premier : un seul en scène hilarant et joliment théâtralisé, où l’humour juif et l’outrance morbide font un ménage décapant.
Le décor est celui d’une chambre d’enfant typique de ces années-là. Les meubles sont recouverts d’autocollants de Sonic. Des billets de jeux de société jonchent le sol. La pompe d’un aquarium trouble ronronne dans le coin de la pièce. C’est ici, dans l’antre de ses souvenirs, que l’anxieux hurluberlu va raconter son histoire sens dessus dessous. Car Solal Bouloudnine craint tellement la finitude qu’il tente de la conjurer en commençant par la dernière scène de son spectacle. Ainsi, il pourra terminer avec le début, sauf que, fatalement, le début devient une nouvelle fin et qu’il aura beau tout essayer, à un moment donné c’est foutu, il faut bien partir. Entre-temps, le comédien compose la galerie des personnages envahissants de son enfance – un père chirurgien déglingué, une mère juive tentaculaire, un rabbin au bout du rouleau… –, narre des anecdotes poilantes – dont une séquence de flirt enfantin à hurler de rire – et s’immisce même, au fil d’un rêve haut en couleur, dans l’intimité de Michel Berger et de sa compagne France Gall.
L’originalité est ici une affaire de style. Solal Bouloudnine, c’est en quelque sorte l’esprit de Woody Allen dans le corps d’un Chien de Navarre. Le trentenaire a d’ailleurs joué dans le collectif dirigé par Jean-Christophe Meurisse ; il en a retenu le jusqu’au-boutisme punk, l’humour grinçant et le goût pour la déglingue gore et jubilatoire – cf. la scène d’opération du nounours, la crème fraiche solaire sur le visage et l’indigestion mortelle de sa fonctionnaire. Quant à son écriture, elle s’inscrit bien dans la tradition juive, avec ses références religieuses, sa dérision existentielle et son absurdité rassurante. On apprécie, aussi, le traitement de l’intéressé réserve à son égo. Jamais, Solal Bouloudnine ne cherche à se rendre sympathique ou touchant, comme la plupart des auteurs de seul en scène. Mais il le devient, grâce à la sincérité avec laquelle il fait face à ses angoisses, qui sont les nôtres. La fin n’en demeure pas moins insupportable, mais elle peut s’envisager le sourire aux lèvres et le corps délassé.
Igor Hansen-Love – sceneweb.fr
La fin du début (nouveau titre du spectacle Seras-tu là ?)
Jeu et conception Solal Bouloudnine
Texte Solal Bouloudnine, Maxime Mikolajczak, avec la collaboration d’Olivier Veillon
Mise en scène Maxime Mikolajczak, Olivier Veillon
Création lumière et son, régie générale François Duguest
Régie en tournée Vinciane De Mulder
Costumes et accessoires Elisabeth Cerqueira, François Gauthier-LafayeProduction MIAM-MIAM
Coproduction NEST – Centre Dramatique transfrontalier de Thionville – Grand Est, Comédie de Béthune CDN Hauts-de- France, Théâtre Dijon-Bourgogne CDN, Théâtre Sorano, Les Plateaux Sauvages, Printemps des comédiens
Soutien Théâtre de l’Aquarium, CENTQUATRE-PARIS, Carreau du Temple, festival FRAGMENT(S) #7, L’Annexe, la Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Ile-de-France, la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bourgogne Franche-Comté, Ville de Dijon, avec le soutien du Fonds SACD Humour/One Man ShowDurée : 1h20
Théâtre Lepic, Paris
à partir du 23 septembre 2024
Je vis à Marseille, et j’étais ami avec le Docteur Guy Bouloudnine, chirurgien pathologie digestive, ainsi que de son épouse, et je n’ai aucune nouvelle de lui ? Je pense que Solal est son fils, puisqu’il a eu un fils qu’il a appelé Solal. Pourrais-je avoir des nouvelles de mon ami ?
Oui Solal est le fils de mon frère Guy.
Cordialement
Janine Bouloudnine-krief