Dans Oh Louis… présenté au Théâtre de la ville après la Cité Internationale, l’ancien danseur étoile Benjamin Pech dans une forme éblouissante se prête à toutes les facéties de Robyn Orlin en campant un roi excentrique et polémique.
Du Faune de Nijinski à l’Oiseau feu de Béjart en passant par le prince Solor ou l’Idole doré de Noureev, Benjamin Pech a interprété les figures les plus irradiantes du répertoire sur les scènes de l’Opéra national de Paris qu’il a quittées en 2016. Le voici désormais monarque absolu chez Robyn Orlin. Dans We move from the ballroom to hell while we have to tell ourselves stories at night so that we can sleep, il campe un Louis XIV totalement réinventé dans une veine aussi bien flamboyante qu’insolente. Grand personnage historique, grand amateur de comédie et de ballet, celui-ci esquisse quelques rares pas classiques sur les accents piquants ou plus délicats d’un clavecin baroque ; il est aussi un roi potache et effronté, s’exhibant dans un trivial et génial ego trip qui confine à l’happening désinhibant.
Ce Louis revient d’Afrique, sans passeport, sur un radeau de réfugiés. La scène nue est enveloppée de noir et d’or, recouverte d’une couverture de survie surdimensionnée et surmontée d’une pleine lune qui permettront au danseur deux citations aussi bien furtives que parodiques de Kaguyahime, l’oeuvre de Jiri Kylian dédiée à la princesse de lumière japonaise. Le long tissu doré s’anime pour devenir aussi une mer dont les flots agités charrient les migrants sur leurs bateaux de fortune. Certains perdent la vie, ce qu’évoque de manière elliptique et symbolique la chaîne d’anoraks colorés qui traversent le plateau.
La chorégraphe sud-africaine signe comme toujours une proposition insolite qui combine franche gaudriole et propos politiquement engagé. Née à Johannesburg et installée en Europe, elle développe une constante propension à dénoncer la violence de la colonisation dans une tonalité humoristique qui tourne excessivement au burlesque. Elle représente Louis XIV comme un égocentrique et un esclavagiste assumé en rappelant que ce dernier a rédigé en son temps les articles discriminants du Code noir.
En pantalon de jogging ou simple sous-vêtement, de couleur rouge royal, Benjamin Pech semble s’épanouir et joue sans complexe à désacraliser la danse classique qu’il a, trente ans durant, excellemment défendue au sein de la prestigieuse compagnie de l’Opéra. L’occasion est trop belle pour lui de subvertir, de pervertir, l’académisme de son art mis à distance avec un malin plaisir très communicatif quand il parle librement de son corps souffrant ou de son relatif embonpoint naissant, ou quand il s’affuble d’un tutu bouffant et singe la pantomime d’une ballerine. Blagueur et torpilleur, le roi n’hésite pas non plus à afficher une forme de fragilité. C’est parfois très anecdotique, c’est aussi très amusant et mordant.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
Oh Louis… We move from the ballroom to hell while we have to tell ourselves stories at night so that we can sleep.
Robyn Orlin
Dans le cadre de la programmation
Hors les Murs du Théâtre de la Ville
UN PROJET DE
Robyn Orlin
DANSEUR
Benjamin Pech
MUSICIEN
Loris Barrucand (clavecin)
SCÉNOGRAPHIE
Atelier Maciej Fiszer
CHEF DE PROJET
Anouk Maugein
Le spectacle Oh Louis… sera créé les 5 et 6 décembre au CNDC d’Angers – Quai d’Angers
Administration et diffusion Damien Valette • Assistante administration et production Marion Paul
production City Theater and Dance Group – Damien Valette Prod.
coproduction Festival de danse-Cannes – Théâtre de la Ville-Paris – CNDC-Angers,
avec le soutien du CND-Centre national de la danse (accueil en résidence), de la DRAC Île-de-France
– ministère de la Culture et de la Communication et de Kinneksbond, Centre Culturel de Mamer.
coréalisation Théâtre de la Cité internationale-Paris – Théâtre de la Ville-Paris.
CRÉATION LUMIÈRE
Laïs Foulc
CRÉATION COSTUMES
Olivier Bériot
ASSISTANCE COSTUMES
Studio Habeas Corpus
VIDÉO
Éric Perroys et Robyn Orlin
FILM
Milkshoot – Vikram Gounassegarin
Durée : 1hThéâtre de la Cité Internationale dans le cadre de la saison du Théâtre de la Ville
13 > 23 décembre 2017
lundi, mardi, jeudi, vendredi
et samedi | 20h30
relâche mercredi et dimancheEspace Cardin du Théâtre de la Ville
Du 15 au 19 février 2018
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