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A l’Espace Cardin, une longue veillée de retrouvailles

Actu, Paris, Théâtre

Photo Jean-Louis Fernandez

Pour célébrer sa réouverture, le Théâtre de la Ville propose un périple théâtral de 48 heures. L’occasion, pour son patron, Emmanuel Demarcy-Mota, de mettre en espace Tenir Paroles, un travail théâtral et mémoriel, sensible et hétérogène, bâti à partir des Consultations poétiques et scientifiques délivrées ces derniers mois.

A l’Espace Cardin, les soirs de première ressemblent habituellement à une fourmilière. Dans le hall, toujours trop exigu, les spectateurs s’y embrassent à qui mieux mieux et génèrent un brouhaha qui complique, parfois, les discussions. Au soir du lundi 22 juin, jour de réouverture du théâtre après plus de trois mois de fermeture en raison des mesures de restriction liées à la pandémie de Covid-19, l’ambiance est tout autre. Pendant que certains curieux se prêtent, au cœur du Jardin des Champs-Elysées, à quelques consultations poétiques, musicales ou chorégraphiques, sorte de descendantes physiques de leurs homologues téléphoniques, qui resteront comme l’une des innovations théâtrales de ce confinement, que d’autres flânent tranquillement sur les bancs et les chaises de jardin disposés çà et là, en sirotant, ou non, un verre servi par la roulotte qui a pris ses quartiers d’été dans ce coin de verdure, d’autres patientent et forment une file indienne distanciée.

Mains désinfectées, visages masqués pour regagner leur place, les spectateurs découvrent, une fois le seuil du théâtre franchi, une salle métamorphosée. Certains sièges sont condamnés, d’autres ont été, au parterre, entièrement démontés. Déconfinement progressif oblige, la distanciation physique entre chacun est de rigueur. Seuls les duos ou les trios arrivés ensemble pourront s’asseoir côte à côte pour assister à Tenir Paroles, première étape d’une longue veillée de retrouvailles, qui se prolongera, pour les plus téméraires, dans la nuit avec la reprise de Ionesco Suite, des fragments de la poésie de Houellebecq lus par Hugues Quester et la plongée de Serge Maggiani dans L’Enfer de Dante, Nous n’irons pas au paradis.

Pour inaugurer cette veillée, qui se déroulera en (quasi) continu jusqu’au soir du mercredi 24 juin, le patron des lieux, Emmanuel Demarcy-Mota, a voulu concevoir un « moment », bien plus qu’un spectacle en bonne et due forme. Scindé en trois tableaux, cet objet théâtral repose, pour une large part, sur les rapports que les comédiens ont rédigés après chacune des 6.400 consultations poétiques et scientifiques délivrées depuis le début du confinement. Au risque du patchwork, qui préfère, toujours, la multitude à la profondeur, il entrelace, dans une première partie, les fragments de vies confinées d’Isabelle et Chantal, Christian et Fatoumata, Hippolyte et Ingrid, Eric et Marie, avec ces écrits poétiques – « Le Repas » de Guillaume Apollinaire, « Le Ciel brûle » de Marina Tsvetaïeva, « Départ » de Léopold Sédar Senghor ou encore des extraits de Par les villages de Peter Handke et de Masques nus de Luigi Pirandello – qui leur ont été prescrits comme autant de remèdes à la mélancolie. A travers la voix des comédiens présents au plateau, se dessine le portrait d’une France confinée. De Strasbourg à Cachan, de Tours à Lyon, étudiante ou bambin, ébéniste ou urbaniste, tous ont en commun ce confinement que chacun – spleen, maladie ou enfants aidant – a vécu, malgré tout, complètement différemment, entre espoir des lendemains et aubaine d’un temps ralenti, inquiétudes quant à l’avenir et claustrophobie de l’esprit. Élégamment portés par une troupe composite, qui n’a pu bénéficier que de très peu d’heures de répétitions, les fragments de poésie agissent pour ce qu’ils sont, et ont été, des bulles qui divertissent, touchent au cœur, et détournent de la réalité à laquelle le théâtre, Ionesco et son Jeux de massacre en tête, semble vouloir, de façon troublante, se reconfronter, au fil d’une compilation qui a tout du travail de mémoire.

Épaulés par les compositions musicales aussi discrètes que délicates d’Arman Méliès et Henri Tournier, et par le travail sensible de mise en espace d’Emmanuel Demarcy-Mota, les comédiens portent, dans un second tableau, les voix du monde qui, de Dakar à Rome, de Madrid à New York, ont pu résonner au gré de l’élargissement international des Consultations poétiques. Entremêlées avec des extraits de Consultations scientifiques, mais aussi de poèmes, elles donnent naissance à un ensemble plus hétérogène, parfois confus, qui, malgré la touchante récitation de Prévert déclamée par l’astrophysicien Jean Audouze, peine à dégager une ligne directrice claire, et se contente d’un empilement cosmopolite qui échappe à toute réflexivité. Il faudra alors attendre la troisième et dernière partie pour sortir des préconçus et être confrontés à la voix de ces soignants, neurochirurgien, neurophysiologue et autres experts du cerveau, qui, tout en restant anonymes, donnent à entendre, par l’intermédiaire des comédiens, leurs témoignages intimes et individuels. Mis en regard du Mahabharata, de « Monde » de Philippe Jaccottet et de « Bon bon il est un pays » de Samuel Beckett, ils percent la cuirasse de ce collectif vaillant, quasi déifié, auxquels tous ont été, pendant des semaines, amalgamés, malgré la diversité de leurs situations, tant professionnelles que personnelles. Au sortir, ce Tenir Paroles reste pour ce qu’il est, avant tout, un acte de courage, d’audace et de bravoure, dans un univers culturel où tout doit, pas à pas, se reconstruire. Le temps du recul analytique, débarrassé de l’emphase du présent, sera pour plus tard.

Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr

Tenir Paroles
Une soirée collective en trois tableaux sous la direction d’Emmanuel Demarcy-Mota
Construction dramaturgique Julie Peigné
Avec la participation de Pascal Vuillemot et de l’ensemble des acteurs
Collaboration artistique et dramaturgique Christophe Lemaire et Julie Peigné
Musiques Arman Méliès (guitare) et Henri Tournier (Flûtes)
Mise en espace Emmanuel Demarcy-Mota
Avec une partie de la troupe du Théâtre de la Ville Charles Roger Bour, Céline Carrère, Jauris Casanova, Valérie Dashwood, Philippe Demarle, Sandra Faure, Gaëlle Guillou, Sarah Karbasnikoff, Stéphane Krahenbuhl, Gérald Maillet, Pascal Vuillemot
Rejoints par José Messongo, Sophy Clair David, Marie Lauricella, Isabelle Jeanbrau, Charly Fournier, Maxime Bouteraon, Antonin Chalon, Anne-Charlotte Dupuis, Anne Duverneuil, Roland Timsit, Fama Ly, Yilin Yang, Astrid Mamina, Marie Escriva, Shih Wei Wang, Mathias Zakhar, Eirini Patoura, Sophie Mousel, Arben Bajraktaraj, Meital Peretz, Johanna White, Lionel Cecilio, Yi-Ju Fang, Mahmoud Elhaddad, Ludovic Goma, Olivier Peigné, Nicolas Avinée, Adrien Capitaine, Paul Nouhailler, Cylia Malki, Hugo Jasienski, Anne Rodier, Julie Bordas, Alexandra Ansidei, Anne Rotger, Coralie Trichard, Nicolas Le Bossé
Avec la participation de Jean Audouze, astrophysicien, et Matei Visniec, poète et écrivain
L’ensemble de ces personnes constitue aujourd’hui La Troupe de l’Imaginaire conçue pendant l’épidémie
Coordination des consultations Loudice Gourmelon

Durée : 4 heures environ (entractes compris)
Premier tableau : 1h10
Deuxième tableau : 1h10
Troisième tableau : 50 minutes

Théâtre de la Ville, Espace Cardin
les 22 et 23 juin 2020

25 juin 2020/par Vincent Bouquet
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1 réponse
  1. Merci à Stéphane Capron pour la précision de ses questions
    Merci à Stéphane Capron pour la précision de ses questions dit :
    23 juin 2020 à 17 h 19 min

    SCENEWEEB J’AIME !

    Répondre

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