Frédéric Bélier-Garcia met en scène un texte totalement déjanté du dramaturge allemand Marius Von Mayenburg, sorte de jeu de construction autour de quatre personnages. C’est totalement loufoque et admirablement bien dirigé.
On n’est jamais si bien servi que par soi-même, Marius Von Mayenburg a mis en scène lui-même cette pièce à Berlin lors de la création. Elle n’est pas facile à monter. C’est un texte qui puise son essence dans le théâtre de l’absurde. La narration n’est pas linéaire et les scènes s’enchainent dans un rythme effréné. Les acteurs changent constamment de rôles. Il est donc difficile de raconter l’histoire. On peut dire qu’il s’agit de deux couples qui se croisent. Ils deviennent par moment amnésiques, retournent en enfance et réalisent leurs fantasmes. Tout s’enchaine comme dans un jeu de construction et de déconstruction. C’est une sorte de rubix’s cube théâtral qui tend par moment vers l’univers de Monthy Python.
Marius Von Mayenburg a écrit des situation totalement rocambolesques. Il parvient dans cette comédie de l’absurde à évoquer la philosophie. L’un des maris trouve l’inspiration en se douchant et sort de la salle de bains nu comme un ver pour se confier à sa femme. Il croit avoir inventé la théorie de Darwin ou l’allégorie de la caverne de Platon. Christophe Paou, comédien du collectif Les Possédés et interprète dans le film L’Inconnu du lac de Alain Guiraudie – dont on a beaucoup parlé à Cannes – est irrésistible dans ce rôle.
Les scènes s’enchainent avec une belle frénésie totalement assumée par Frédéric Bélier-Garcia qui réussit une très grande mise en scène. On rit de toutes ces situations ubuesques. Un couple se rend en vacances dans un chalet à la montagne loué par une admiratrice d’Hitler, le jeune fils endossera un habit nazi. Les deux couples se costument lors d’une nuit thématique : la nuit boréale. Valérie Bonneton est déguisée en volcan, Christophe Paou en élan. Les deux hommes feront l’amour tandis que les femmes boivent des cocktails à la cuisine. « Je suis terrassé, je viens de coucher avec un élan » dit Samir Guesmi, excellent. Les vies de couples déraillent, et l’on n’est pas au bout de nos surprises, car dans ce jeu de déconstruction, Marius Von Mayenburg choisit d’abandonner les comédiens, seuls face au spectateur, sans metteur en scène. Alors ils commencent à démonter le décor. « Les dramaturges ont coincé leur détritus comme des vandales » dit l’un des personnages. On s’amuse beaucoup. Les comédiens nous embarquent dans ce rêve scénique où l’incohérence est totalement réfléchie. Une très belle réussite !
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Perplexe de Marius von Mayenburg
traduction Hélène Mauler et René Zahnd (L’Arche éditeur)
mise en scène
Frédéric Bélier-Garcia
décor Chantal Thomas
lumière Roberto Venturi
costumes Elisabeth Tavernier
avec
Valérie Bonneton
Agnès Pontier
Samir Guesmi
Christophe Paou
production
Nouveau Théâtre d’Angers
Centre Dramatique National Pays de la Loire
Durée: 1h40
ANGERS – Le Quai – forum des arts vivants –
du jeudi 14 au samedi 30 novembre 2013
du mercredi 4 décembre au dimanche 5 janvier 2014
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