Présenté au Printemps des comédiens, Mont Vérité érige un panthéon en l’honneur de la jeunesse, de sa combativité et de sa créativité. Pascal Rambert et Rachid Ouramdane sondent les rêves et les colères de douze interprètes rimbaldiens qui s’ébrouent et éprouvent dans la nuit Montpelliéraine.
Des herbes folles plantées par touffes sur une lande terreuse et recouverte d’une lumière blême pointent vers le ciel sombre. Avec cérémonie, sans turbulence, de jeunes gens, en toge, en jeans, ou à poil, traversent la roselière. Elle est cet espace commun où les rêves se libèrent, où les mots se déposent, opaques et mystérieux comme la nuit noire. Se déploient des visions empreintes de beauté comme de destruction, s’expriment les pulsions parfois violentes, s’y conjure un tenace sentiment d’oppression.
Toujours au croisement des arts, qu’ils soient plastiques ou performatifs, Pascal Rambert signe un objet théâtral riche en images. Aux mots, s’adjoint la danse. Languissants ou furtivement secoués de rapides spasmes, les corps errent transis dans la froide nature. Ils se meuvent gracieusement pour ainsi tenter de redéfinir un possible être ensemble. Inspirée de la colonie coopérative « Monte Verità », un mouvement utopique d’artistes et d’intellectuels qui a vu le jour dans le Tessin en Suisse avant la première guerre mondiale, cette communauté apparaît entre décontraction désinvolte et engagement à fleur de peau.
Visuellement, le spectacle est superbe. Il doit beaucoup à la belle et forte présence de ses jeunes acteurs magnifiés par les jeux d’ombres et de lumières dans le plein air du Domaine d’O. Le texte, spécialement écrit pour ces interprètes issus de l’école du Théâtre National de Strasbourg, fait quant à lui défaut. Il laisse s’échapper un irrépressible besoin de parler, de s’affirmer, de s’opposer à tout ce qui blesse, réduit, assigne, mais y invite avec bien des excès. Que de longueurs, de lourdeurs, de ressassements d’idées toutes faites. L’uniformité de la direction d’acteurs n’arrange rien. Chacun leur tour, propulsés au devant de la scène, les comédiens prennent la parole, parlent d’une traite. Les mots se diluent dans la solennité d’un temps flottant et étiré.
Après les litanies introspectives, Pascal Rambert fait rejouer une séance de répétition à la table où les acteurs posent les questions dramaturgiques qui ont sans doute irrigué leur travail au plateau. La confusion et la consternation redoublent. On se demande ce qui a conduit un grand auteur et metteur en scène à dessiner à si gros traits l’artiste au travail et en réduire le geste. Assez faible, cette conclusion fait décidément rester acteurs et spectateurs au pied du Mont Vérité.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
Mont Vérité
Texte : Pascal Rambert
Mise en scène : Pascal Rambert
Chorégraphie : Rachid Ouramdane
Collaborations artistiques : Audrey Bonnet (Jeu), Yves Godin (Lumière), Alexandre Meyer (Musique) Avec : Daphné Biiga Nwanak, Océane Cairaty, Houédo Dieu-Donné Parfait Dossa, Paul Fougère, Romain Gillot, Romain Gneouchev, Elphège Kongombé Yamalé, Ysanis Padonou, Mélody Pini, Ferdinand Régent-Chappey, Yanis Skouta, Claire Toubin
Dramaturgie : Baudouin Woehl
Scénographie : Aliénor Durand
Costumes : Clémence Delille
Lumière : Édith Biscaro, Germain Fourvel
Son : Enzo Patruno Oster, Lisa Petit de la Rhodière
Assistanat à la mise en scène : Eddy D’aranjo
Plateau : Simon Drouard
Régie générale : Vincent Dupuy
Photos : Jean-Louis Fernandez
Durée: 2h30Printemps des Comédiens de Montpellier
31 mai à 21 h 30
1 juin à 21 h 30
2 juin à 21 h 30Puis à la MC93 de Bobigny
Du 13 au 20 mars 2020TNS de Strasbourg
Du 25 mars au 4 avril 2020
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