OVNI(S), un objet scénique déconnecté

Photo Christophe Raynaud de Lage / Hans Lucas

Anecdotique aussi bien dans sa forme que sur le fond, la proposition déconnectée du collectif Ildi ! Eldi force le désintérêt. Si le mystère plane sur cet Ovni(s), ce n’est pas tant pour ses considérations paranormales que pour la place qu’il occupe dans la programmation du Festival d’Avignon.

Sophie Cattani, Antoine Oppenheim et leurs camarades du jeune collectif Ildi ! Eldi s’emparent d’une matière textuelle bien singulière constituée d’une série de témoignages recueillis par Ivan Viripaev. Le dramaturge sibérien, que Galin Stoev a fait connaître en France, aime faire du plateau de théâtre un drôle de laboratoire humain tout en provoquant des moments de basculement dans des zones de malaise, d’inconfort. Il s’est dernièrement passionné pour des personnes trouvées sur Internet qui affirment avoir rencontré des extraterrestres un dimanche au café, sur la terrasse d’un immeuble nimbée de l’air chaud de la nuit et du trafic périphérique, en pleine forêt en communion avec l’énergie régénérante des arbres. La sensation rassurante ou inquiétante d’une piqûre à l’héroïne, ou d’un bien-être analogue au yoga, ou celle d’une régression à l’état d’enfant hébété, chacun décrit un évident retour à la simplicité et une libération des problèmes du monde hyperconnecté où les êtres souffrent de la difficulté de se rencontrer, de se raconter.

Le propos aurait pu être infiniment barré étant donné que le défi lancé par le spectacle est l’impossible représentation de son sujet. En effet, donner à voir au théâtre l’enlèvement par les aliens d’une femme happée par une soucoupe volante en plein New York ? Si l’idée de faire un long métrage de ces aventures hors du commun s’est d’abord imposée, la troupe a finalement opté pour une mouture théâtrale, moins coûteuse, où demeurent des traces de ce premier projet abandonné.

Mais l’invention et la malice manquent à l’équipe trop terre-à-terre. Le spectacle repose principalement sur le récit. A travers de longues et éprouvantes prises de parole matinées de musiques électro évanescentes, les acteurs prennent en charge la subjectivité des identités réelles et l’expérience vécue dans une adresse frontale au public.

Pas de décors, pas de costumes, pas d’images sur le plateau noir qui s’offre sans attrait au regard. Cette quasi absence totale de forme et la banalité cheap et dérisoire exposée sans complexe ne fait pas vraiment rêver, ni décoller le spectacle dont le comique loufoque et l’étrangeté attendue tombent souvent à plat. La fin plus poétique et engagée fait sortir l’ensemble de son premier degré plombant.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

OVNI(S)
Avec Alexandra Castellon, Sophie Cattani, Grégoire Monsaingeon, Antoine Oppenheim, Michaël Pas
Mise en scène et jeu Alexandra Castellon, Sophie Cattani, Grégoire Monsaingeon, Antoine Oppenheim, Michaël Pas
Pièce originale OVNI de Ivan Viripaev
Texte de Jérôme Game
Musique Chloé Thévenin
Scénographie Katrijn Baeten, Saskia Louwaard
Lumière Ludovic Bouaud
Son Benjamin Furbacco

Production Collectif ildi ! eldi
Coproduction Théâtre Ouvert Centre national des dramaturgies contemporaines, Festival d’Avignon, Théâtre_Arles Scène conventionnée d’intérêt national art et création nouvelles écritures, Pôle arts de la scène – Friche la Belle de Mai
Avec le soutien de la Spedidam, Drac Provence-Alpes-Côte d’Azur, Région Provence-Alpes-Côte d’Azur
Avec l’aide de Châteauvallon Scène nationale
Durée : 1h30

Festival d’Avignon 2018
Théâtre Benoît-XII
Du 7 au 11 juillet à 15h

Théâtre Ouvert, Paris
Du 21 septembre au 13 octobre

Théâtre Arles
Le 29 mars 2019