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Love, love, love : les soixante-huitards sur le gril

À la une, Les critiques, Moyen, Paris, Théâtre

Photo Pierre Nouvel

Au Théâtre de Belleville, Nora Granovsky s’empare de la pièce de Mike Bartlett et dresse, malgré quelques trous d’air, un portrait au vitriol d’une génération qui aura transformé son hédonisme de jeunesse en individualisme forcené.

1967. Alors que le Summer of Love bat son plein sur la côte ouest des États-Unis, les Beatles chantent All you need is love, spécialement écrite, sur commande de la BBC, pour « Our World », la première émission en mondovision, diffusée simultanément dans 26 pays à travers le monde. Au son de cet évènement planétaire, dans le petit salon de son frère Henry qui l’héberge pour quelques temps, Kenneth fait la rencontre de Sandra, avec qui son aîné flirtait jusqu’ici gentiment. Les deux étudiants à Oxford ont 19 ans et se retrouvent sur plus d’un point. Fans de rock, amateurs de pétards, l’un et l’autre incarnent la soif de liberté d’une génération qui, en Grande-Bretagne comme ailleurs, cherche à s’émanciper, à briser les carcans sociaux bâtis par ses géniteurs, à transformer la société, voire le monde.

Flashforward en 1990. Confortablement installés dans leur petit pavillon de banlieue, Sandra et Kenneth s’apprêtent à fêter les 14 ou 15 ans – ils ne savent plus très bien – de leur fille cadette, Rose, en compagnie de son frère, Jamie. Le couple a perdu de sa fraîcheur et leurs idéaux de leur superbe. Plus qu’aux ravages de la routine, les deux anciens hippies, qui ont entre-temps fait la courte échelle à Margaret Thatcher, sont confrontés à une crise de foi, où le peace & love des origines s’est fracassé sur le mur de la réalité. Émoussé par la banalité du quotidien, il s’est mué en une guerre familiale intestine sans amour, mais avec son lot de tromperies aux conséquences déflagratrices.

Avec 2011 pour épilogue, année du règlement de comptes entre deux classes d’âge, celle des parents dorés et de leurs enfants sacrifiés, ce portrait du pendant britannique des soixante-huitards français est sculpté au scalpel par Mike Bartlett. Grâce à une plume acérée, trempée dans le vitriol à intervalles réguliers, le dramaturge britannique, lui-même né en 1980, éreinte une génération qui se sera placée au centre du monde, n’ayant d’autres préoccupations qu’elle-même. Elle aura bien vite oublié ses utopies de jeunesse pour profiter de la vague capitaliste et organiser le pillage affectif, économique, social et environnemental de la société au service d’un confort individuel dont ses membres ont tout le mal du monde à se satisfaire. Acerbe jusque dans son titre à l’ironie amère, la pièce monte en puissance à mesure qu’elle se construit et se referme avec la férocité d’un piège sur des personnages réduits en lambeaux par sa lame de fond des plus tranchantes.

Dans un décor volontairement spartiate conçu par Pierre Nouvel, la mise en scène, parfois trop sage et scolaire, de Nora Granovsky ne réussit pas toujours à éviter les trous d’air et à révéler le côté le plus aiguisé du texte de Bartlett. Très juste avec Juliette Savary et Émile Falk-Blin, sa direction d’acteurs se fait plus aléatoire avec leurs deux compères, Jeanne Lepers et Bertrand Poncet. Dans les rôles centraux de Sandra et Kenneth, ils optent pour un jeu maniéré qui entrave le côté naturaliste de la pièce et rend inutilement caricaturaux leurs personnages, alors que leurs faits et gestes, éloquents, suffisaient à instruire leur « procès » en inconséquence et en irresponsabilité. Monté plus radicalement, en jouant davantage avec les subtilités de la langue piquante du dramaturge britannique, Nora Granovsky aurait pu faire de Love, love, love un moment de théâtre renversant. Il faudra se contenter de cet honnête résultat.

Vincent BOUQUET – www.sceneweb.fr

Love, love, love de Mike Bartlett
Mise en scène et costumes, Nora Granovsky
Traduction, Kelly Rivière et Blandine Pélissierk
Avec Émile Falk-Blin, Jeanne Lepers, Bertrand Poncet et Juliette Savary

Création vidéo et scénographie, Pierre Nouvel
Création sonore, Antoine Pesle
Lumières, Fabien Sanchez

Production déléguée, Cie BVZK
Coproduction, Comédie de Picardie, Ville de Lille – Maisons Folie de Lille
Avec l’aide de la DRAC Hauts-de-France, du Conseil départemental du Pas-de-Calais, de l’ADAMI et du Conseil régional Hauts-de-France
Avec le soutien du Manège – Scène Nationale de Maubeuge et du Théâtre Ici et Là – Centre culturel de Mancieulles
Nora Granovsky est artiste associée à la Comédie de Picardie.
La pièce Love, love, love de Mike Bartlett est représentée dans les pays de langue française par l’agence DRAMA – Suzanne Sarquier en accord avec The Agency à Londres. Love, love, love suivi de Bull de Mike Bartlett est publié aux éditions Actes Sud-Papiers.

Durée : 2h

Théâtre de Belleville, Paris
Du 5 au 29 décembre 2018

Le Manège – Scène nationale de Maubeuge
Le 31 janvier 2019

Le Chevalet de Noyon
Le 1er mars

La Manekine de Pont-Ste-Maxence
Le 10 mai

11 décembre 2018/par Vincent Bouquet
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