Sceneweb
  • À la une
  • Actu
  • Critiques
    • Coup de coeur
    • A voir
    • Moyen
    • Décevant
  • Interviews
  • Portraits
  • Disciplines
    • Théâtre
    • Danse
    • Opéra
    • Cirque
    • Jeune public
    • Théâtre musical
    • Marionnettes
    • Arts de la rue
    • Humour
  • Festivals
    • Tous les festivals
    • Festival d’Avignon
    • Notre Best OFF
  • Rechercher
  • Menu Menu

Pauline Bureau réinvente Blanche-Neige

Annecy, Chalon-sur-Saône, Coup de coeur, Dunkerque, Les critiques, Lyon, Paris, Quimper, Théâtre

© Christophe Raynaud de Lage

Il était une fois… Pauline Bureau revisite Blanche-Neige dans une réécriture libre et contemporaine du conte originel. Et livre un spectacle ambitieux porté par une esthétique éblouissante et un récit tout en nuances.

Il y a du Gisèle Vienne dans ce décor de forêt et ces jeunes dansant en hologramme en fond de scène le temps d’une rave en plein air. Il y a du Joël Pommerat dans ce petit bout de jeune fille prénommée Neige qui évolue dans une réécriture libre et contemporaine du conte des frères Grimm. Mais c’est bien un spectacle de Pauline Bureau qui déploie ses ailes sur le grand plateau de la Colline. Et l’on y retrouve avec joie son goût pour un théâtre de fable et de fiction, son appétit pour la féérie, l’humour et la fantaisie, son féminisme toujours prêt à dégainer ses personnages aux fortes personnalités, s’affirmant dans un monde cloisonnant. Après Dormir cent ans qui réveillait l’histoire de La Belle au bois dormant, voici Neige qui fait fondre les éléments éculés du conte originel et redonne à son héroïne le pouvoir de se construire hors du foyer familial, de tenir tête à sa mère et de choisir ce qui lui plaît plutôt que de se voir dicter sans cesse ses devoirs, qu’ils soient filiaux ou scolaires. Neige s’échappe du joug et de l’exigence maternelle, elle s’enfonce dans la forêt profonde comme on affronte son désir d’aventure et d’inconnu, elle fugue et ne rentre pas.

La pomme qu’elle mangera comme on embrasse à pleine bouche l’objet de son désir n’est pas empoisonnée mais ce qui empoisonne sa vie, ce sont ces évanouissements à répétition dès que l’émotion la submerge. Neige a 14 ans, ses premières règles, un journal intime et un amoureux secret, elle se cherche en tâtonnant, écartelée entre son courage et sa timidité, son audace et ses peurs, la petite fille qu’elle était il y a peu et la jeune fille qu’elle devient inexorablement. Face à elle, en un miroir inversé, sa mère, vieillissante et fière, cheffe d’entreprise postée sur ses talons et ses certitudes, prônant la valeur travail et le dépassement de soi. Sorcière des temps modernes qui lui dicte sans cesse la conduite à suivre et la hisse au niveau de ses ambitions inatteignables, elle est aussi l’épouse inquiète de vieillir. Pénétrant dans les sous-bois à la recherche de sa fille, elle évoluera à son tour en sortant de sa route bétonnée et balisée, au contact de ce nouveau biotope et de cet homme rencontré, figure du chasseur transformée en agronome reconverti, ancien citadin ayant élu domicile au cœur de la nature.

En se débarrassant des sept nains et de la passivité de son héroïne originelle, en reléguant le prince charmant en bordure de l’intrigue, remplacé au bout du compte par l’importance de l’amitié dans la construction identitaire, en faisant du chasseur un homme de conscience, tendre et plein de bon sens, en étoffant son rôle, pivot de l’intrigue, Pauline Bureau rebat les cartes d’un récit empoussiéré et l’axe sur l’ambivalence de la relation mère-fille avec beaucoup de justesse. Sa réécriture, portée par une plume espiègle et alerte et un sens des dialogues percutant, emprunte à la tradition du conte son imaginaire peuplé d’animaux où la forêt transforme ceux qui s’y perdent, elle tisse la trame de l’émancipation par la fuite et l’ailleurs tout en ancrant ses situations dans un présent immédiat, jouant avec des références adolescentes on ne peut plus actuelles, entre tics de langage, usage abondant des réseaux sociaux et téléphones portables, musiques à la mode (Billie Eilish et sa pop dansante).

Tout fait mouche, depuis les motifs et thématiques explorées jusqu’à l’environnement esthétique. Jamais Pauline Bureau ne s’était lancée dans une telle ambition scénographique (chapeau bas Emmanuelle Roy) et son association avec Clément Debailleul pour les effets de magie, l’immersion et les projections vidéos aquatiques est une réussite. La forêt, ses buissons, son tapis de feuilles et ses troncs d’arbres immenses, provoque d’emblée l’admiration des enfants, la citerne et ses profondeurs dévoilées par images filmées apporte son supplément onirique, les apparitions animalières peuplant le décor confinent à l’extase sensorielle. Aucune fausse note à l’horizon et une répartition des espaces limpide et symbolique cantonne au même endroit ces lieux urbains de la vie filant droit (la chambre de Neige, le restaurant ou le commissariat). Comme une fenêtre ouverte ou fermée sur un espace-temps différent. Pur émerveillement que ce paysage où évoluent nos personnages.

Quant à celles et ceux qui les incarnent, ils sont formidables, mention spéciale à Marie Nicolle, remarquable dans le rôle de la mère, campée sur ses positions autant que vacillante, pleine de bonnes intentions mais coupée de sa propre enfance, elle se laissera bousculer par les évènements pour pas à pas, réapprendre à vivre au contact de sa fille. Camille Garcia est une Neige touchante et déterminée. Claire Toubin et Anthony Roullier ne sont pas en reste dans leurs doubles rôles respectifs et l’on sent derrière le jeu de chacun une direction d’acteur.ices précise et fine, sans manichéisme. Yann Burlot est un père qui fera son chemin lui aussi tandis que Régis Laroche en chasseur remporte la palme de l’humanité et de la sagesse tranquille. Dans ce labyrinthe bucolique où chacun se perd pour mieux se retrouver, personne n’est tout noir ou tout blanc mais sur le fil mouvant de sa propre identité et de sa propre quête. Conte initiatique sans fées ni lutins, Neige tend la main aux enfants autant qu’aux parents pour recréer du lien et retrouver le sens perdu de nos quotidiens en apnée. Oxygénant !

Marie Plantin – www.sceneweb.fr

Neige
texte et mise en scène Pauline Bureau
avec Yann Burlot, Camille Garcia, Régis Laroche, Marie Nicolle, Anthony Roullier, Claire Toubin
scénographie et accessoires Emmanuelle Roy
costumes Alice Touvet
composition musicale et sonore Vincent Hulot
dramaturgie Benoîte Bureau
vidéo et magie Clément Debailleul
lumières Jean-Luc Chanonat
maquillages et perruques Julie Poulain
collaboratrice artistique Valérie Nègre
assistanat à la mise en scène Léa Fouillet
cheffe opératrice tournage subaquatique Florence Levasseur
décor réalisé par Les ateliers de La Comédie de Saint-Étienne
administration Claire Dugot
production développement Christelle Longequeue logistique Laura Gilles-Pick
avec la participation à l’écran de Camille Chamoulaud, pré-apprentie du CFA des arts du cirque – L’Académie Fratellini, Sylvia Rozenman-Conti, Oriane Fischer

Production
La part des anges

Coproduction La Colline – théâtre national, La Comédie de Saint Étienne – Centre dramatique national, Les Théâtres de la Ville de Luxembourg, Espace des Arts – Scène nationale de Chalon-sur-Saône, Théâtre Sénart – Scène nationale « EPCC», Le Bateau Feu – Scène nationale de Dunkerque, Scène nationale 61 – Alençon-Flers-Mortagne, Théâtre des Quartiers d’Ivry – CDN du Val-de-Marne

Durée : 1h25

A partir de 10 ans

Du 1er au 22 décembre 2023
Au Théâtre National de la Colline

les 11 et 12 janvier 2024
Bateau feu – Scène nationale de Dunkerque

25 janvier 2024
Cratère – Scène nationale d’Alès

les 5 et 6 février 2024
Scène nationale 61 – Alençon-Flers-Mortagne au Perche

11 et 12 avril 2024
L’Espace des arts – Scène nationale de Chalon-sur-Saône

17 et 18 avril 2024
Théâtre de Cornouaille – Scène nationale de Quimper

3 décembre 2023/par Marie Plantin
Partager cette publication
  • Partager sur Facebook
  • Partager sur X
  • Partager sur WhatsApp
  • Partager sur LinkedIn
  • Partager par Mail
  • Lien vers Instagram
Vous aimerez peut-être aussi
Pauline Haudepin crée Chère Chambre au Théâtre National de Strasbourg Chère Chambre : le sacrifice révélateur de Pauline Haudepin
Palmarès 2017 des Molières : les favoris au rendez-vous !
Lettres jamais écrites, une mise en scène de Estelle Savasta
L’Orestie de jeunesse de Jean-Pierre Vincent
Lionel Lingelser du Munstrum Théâtre reçoit deux Molières photo AFP Thomas Samson Molières 2024 : un palmarès tout en équilibres
Hors la loi, au cœur du combat des femmes libres
Le palmarès de l’année 2019
Qui pour diriger le Nouveau Théâtre de Montreuil en 2022 ?
0 réponses

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Dans le moteur de recherche, plus de 22 000 spectacles référencés

© Sceneweb | Création site et Maintenance par Limbus Studio
  • L’actualité du spectacle vivant
  • Qui sommes-nous ?
  • Newsletter
  • Politique de confidentialité
  • Signaler un abus
  • Contact
  • Politique de cookies (UE)
Faire défiler vers le haut