Le metteur en scène italien Romeo Castellucci s’est inspiré de la pensée du philosophe hollandais Spinoza (1632-1677) et notamment des cinq livres qui composent l’Éthique. Pour chacun de ceux-ci, Romeo Castellucci propose une action théâtrale. Cinq actions sont donc prévues. La première action a été présentée lors de la Biennale de Venise en 2013 et s’intitulait, comme le deuxième livre, De la nature et l’origine de l’Esprit.
Une jeune femme est suspendue à un câble, à plusieurs mètres au-dessus du sol. En regardant plus attentivement, le spectateur s’aperçoit que la femme est retenue seulement par l’index de la main gauche. Il s’en faut de peu qu’elle ne soit victime d’une chute vertigineuse. La femme pourtant ne semble nullement inquiète, et même elle semble contrôler parfaitement l’effroi qu’elle pourrait ressentir. Elle paraît prolonger et vivre ce moment comme un seuil. On soupçonne qu’il n’y a aucun risque de chute mais qu’il s’agit plutôt d’un phénomène de lévitation, une sorte d’élan, de force. L’arc tendu d’un corps qui est sur le point d’être lancé dans l’air. Le corps de la femme occupe la zone supérieure de l’espace : il rend visible par sa présence l’espace mental de l’architecture. Sous elle, parmi le public qui observe debout la scène, se promène un chien. Il se déplace au hasard, librement, passant entre les jambes des spectateurs. Ce chien miaule. Il y a un dialogue entre le chien-chat et la femme suspendue. Le sujet de leur dialogue tourne autour d’une découverte : ils sont le produit d’une vision intérieure du spectateur. Le chien qui miaule a décidé de prêter sa voix à une caméra de télévision, d’être une caméra de télévision. La femme suspendue par un doigt a décidé de prêter sa voix à la lumière, de jouer le rôle de la lumière. Et un troisième personnage, composé d’êtres multiples, réagit aux paroles des deux autres personnages : c’est l’Esprit, celui qui donne son nom à cette action.
Une première version a été créée au cours d’une session de travail à la Biennale Collège de 2013, en collaboration avec la Biennale de Venise et avec le soutien du Théâtre de la Ville et du Festival d’Automne à Paris. Le titre de la performance est tiré du livre II de l’Éthique de Spinoza, dans lequel le philosophe explore la nature de la pensée supérieure et le pouvoir opérant de l’esprit, le noyau qui forme la réalité même. Celui qui pense ne fait qu’un avec la réalité.
Dans cette optique, la performance dévie et se ramifie, et opère une descente vers l’embouchure, là où les eaux parviennent à leur point ultime : le public. L’image créée dans l’esprit de l’artiste atteint enfin l’esprit du spectateur, lequel la reçoit, bien sûr, mais en la recevant, lui donne forme. La performance a pour objectif de congeler cette pensée dans l’acte de recevoir l’image, non dans un but scientifique, mais pour consacrer la fusion entre la réception du spectateur et la création de l’image d’origine.
Natura e origine della mente
Conception et direction Romeo Castellucci
Texte Claudia Castellucci
Traduit en français par Jean-Louis Provoyeur
Son Scott Gibbons
Avec Avec Silvia Costa, Louise Arcangioli, Clémence Boucon, Moïra Dalant, Flora Gaudin,Olivia Lioret et Garance Silve, Stephane Coichot
Et le chien Elboy du Domaine de Flambeau
Sculptures Istvan Zimmermann & Giovanna Amoroso
Direction technique Massimiliano Peyrone
Technicien du son Matteo Braglia
Attachée de production Benedetta Briglia
Organisation et promotion Valentina Bertolino, Gilda Biasini
Administration Michela Medri, Elisa Bruno, Simona Barducci et Massimiliano Coli
Production Socìetas Raffaello Sanzio en coproduction avec le T2G – Théâtre de Gennevilliers
Créé à Venise pour la Biennale en août 2013 en coproduction avec le Théâtre de la Ville et le Festival d’Automne à Paris. En collaboration avec Settore Teatro della Biennale di VeneziaThéâtre de Gennevilliers
7 – 13 MARS 2016
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