Avec ce duo, la chorégraphe grecque Ioanna Paraskevopoulou déplie une danse du bruitage ludique, à la frontière entre le cinéma, le théâtre d’objets, la performance et les claquettes.
Les bruiteurs utilisent des objets incongrus pour créer les bandes sonores du cinéma : des noix de coco pour imiter les pas d’un cheval, un torchon tendu pour les battements du cœur ou des branches de céleri cassées pour un os brisé. En 2023, la chorégraphe grecque Ioanna Paraskevopoulou, connue comme danseuse chez Christos Papadopoulos, Dimitris Papaioannou ou Katerina Andreou, dévoilait Coconut Effect, où elle endossait ce rôle en dansant, dévoilant les coulisses d’un film sur scène, pour faire jaillir la magie DIY du cinéma. Après avoir remporté le prix du jury jeunes de la 7e édition de Danse Élargie, concours pour l’émergence chorégraphique, elle revient avec une version plus longue intitulée MOS, toujours en duo avec Georgios Kotsifakis. Avec leurs corps, un écran et une multitude d’objets, ils déploient un ensemble ludique, qui interroge les liens entre geste, image et son au sein de la danse.
Sur la toile tendue, un texte blanc est projeté en anglais, que l’on peut traduire ainsi : « Sépare une noix de coco en deux », puis « Enterre le géophone dans une fosse de terre, pour ajouter du poids à l’enregistrement ». Des instructions pour créer son propre bruitage ? Un passage dansé d’un film est diffusé sur une petite télé. Les deux danseurs bricolent, assis sur le sol dans l’obscurité. À leur côté : des plaques de bois, un seau, un ballon de basket, du faux gazon, du foin et beaucoup de micros.
Immédiatement, on entre dans l’ambiance, DIY, vintage, teintée d’une fantaisie sobre. Des images de film en noir et blanc : western, natation synchronisée et expérience d’envol grâce à des ailes mécaniques ratée. Les performeurs créent leur bande sonore en live, agitent leurs pieds dans l’eau, ouvrent un parapluie par intermittence. Le spectacle se déplace alors de l’écran à leurs corps. L’effet est exacerbé lorsque l’écran s’éteint – un autre s’allume de l’autre côté de la scène sans qu’on puisse le voir. Le spectacle se resserre sur les danseurs, désormais bien éclairés par la lumière.
Plutôt généreux et accessible, MOS déploie un système ludique, qui fait dialoguer la chorégraphie avec le montage et le mixage. On suit avec amusement les glissements d’une fonction à une autre, les inversions des rôles primaires et secondaires, obligeant à déplacer notre regard et notre attention. Les danseurs deviennent, tour à tour, spectateurs, bruiteurs, personnages de ce film-spectacle. Dans un numéro final de claquettes en duo digne de Fred Astaire, où les claquements des chaussures sur la planche sont amplifiés pour devenir un brouhaha sourd, c’est le bruitage qui devient la danse. Objet insolite, MOS tisse des liens entre les disciplines, questionne notre perception des corps et du mouvement au cinéma à travers une multitude d’inversions, de glissements et de changements de focus. Et inaugure une nouvelle danse : celle du bruitage de cinéma.
Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr
MOS
Conception et chorégraphie Ioanna Paraskevopoulou
Avec Georgios Kotsifakis, Ioanna Paraskevopoulou
Technicien son et design sonore Vasilis Zlatanos
Dramaturgie Elena Novakovits
Lumière Eliza Alexandropoulou
Lumière en tournée Tzanos Mazis
Ingénieur vidéo Konstantinos Asimakopoulos
Montage vidéo Ioanna Paraskevopoulou
Décor et costumes Ioanna Paraskevopoulou
Construction bois Miltos AthanasiouProduction Onassis STEGI
Soutien de la tournée Programme Onassis STEGI’s Outward TurnDurée : 45 minutes
Théâtre de la Bastille, Paris
du 10 au 12 février 2025
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