Au Théâtre des Doms, le performeur canadien dévoile Et si Hansel avait consenti à être cuit vivant ?. Mi-conte érotique pervers, mi-réflexion sur la notion de consentement, ce bref solo nous balade entre jouissance et inconfort.
Perruque blonde sur la tête, chemise à carreaux, panier en osier au bras, Michael Martini déboule sur la scène en parfait Hansel, le personnage-phare du célèbre conte des frères Grimm, « tout droit arrivé de l’underground de la performance queer de Montréal », annonce le flyer distribué à l’entrée. Au risque de décevoir, le comédien précise d’emblée : « Ça dure une heure, mais j’ai eu un maximum de trente minutes. C’est en français, mais dans ma tête, et dans l’idéal, ce serait en allemand. Une langue que je ne parle pas. » On comprend alors que mettre Michael Martini dans une catégorie n’est pas une mince affaire.
Ce jeune performeur originaire de l’Ontario s’est fait remarquer pour son approche transdisciplinaire du théâtre, travaillant autant le mouvement, les arts plastiques que l’écriture. Avec Landscape Grindr, il explorait la question des violences sexuelles à l’aune des mouvements #MeToo et liés à la justice environnementale, en questionnant les représentations queer et trans souvent associées à la violence. Dans Et si Hansel avait consenti à être cuit vivant ?, il continue de tirer ce fil en explorant la limite du consentement dans le cadre du travail du sexe, quand les clients sont adeptes de jeux de rôles, de viol sur mineur. Ce solo loufoque et inconfortable se déplie comme un collage d’éléments et de références, pour créer des porosités entre autobiographie, fiction et fantaisie.
Sur la scène, plusieurs objets sont déjà disposés : un paquet de bonbons, des clochettes, une lampe chauffante et une cuisinière. Au fil des descriptions scabreuses des relations sexuelles avec les clients, enrobées de métaphores du type « Daddy met son Charlie dans ma chocolaterie », Michael Martini circule entre les objets, chausse des claquettes en bonbons, crache une gorgée de vodka sur une plaque de four. Puis, vient le clou du spectacle : une étreinte périlleuse, et un poil érotique, avec son four. Allongé sur le sol, il embrasse la gazinière blanche, qui lui compresse le buste. Alors que l’artiste a été victime d’un incendie il y a quelques années, faut-il voir dans cet acte une thérapie par l’exposition, une réconciliation ? Ou seulement une matérialisation de l’inconfort de parler de la question du consentement dans le cadre du travail du sexe, à l’heure où l’activité se banalise grâce à l’essor des plateformes en ligne ?
Coincé entre le four, le conte des frères Grimm – il concède d’ailleurs « Érotiser les contes de fées ça fait vraiment années 60-70 » – et Sylvia Plath, écrivaine américaine autrice de La Cloche de détresse, qui s’est donnée la mort avec un four à gaz, Michael Martini, l’air naïf et le visage poupon, navigue dans des territoires ambigus et tabous, et nous fait osciller entre malaise et plaisir.
Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr
Et si Hansel avait consenti à être cuit vivant ?
de et avec Michael Martini
Soutien à la traduction Alegria GobeilProduction OFFTA (Montréal)
Aide à la production Mycelium
Soutien Conseil des arts et des lettres du Québec, Playwrights Workshop MontrealDurée : 30 min
Festival Off d’Avignon 2024
Théâtre des Doms
du 3 juillet au 21 juillet (relâche les 9 et 16), à 22hFURIES, Festival de danse contemporaine, Marsoui (Québec, Canada)
le 27 juilletThéâtre Balsamine, Schaerbeek (Belgique)
du 10 au 12 octobre
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