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Ambre Matton et le prix de la maternité

A voir, Les critiques, Paris, Théâtre
Mère d'Ambre Matton
Mère d'Ambre Matton

Photo Marion Stalens

Avec deux spectacles à son actif, dont ce Mère frondeur et jubilatoire présenté actuellement à la Reine-Blanche, Ambre Matton fait preuve d’autant d’humour que d’acuité, et impose son style, entre le réel, la fantaisie et les grands mythes. Avec ses cinq acolytes survoltées, elles font du plateau un terrain de jeu cathartique et hilarant.

Elles ont de l’énergie à revendre, peur de pas grand-chose, un humour costaud et vif, l’esprit affuté et au fait de son temps, des sujets à brasser, des enjeux à prendre à bras le corps pour les partager dans l’ici et maintenant de la représentation. Elles sont six femmes au plateau, elles pratiquent un théâtre joyeux et décomplexé qui réfléchit nos places et nos liens à l’aune de la société, qui n’a besoin d’aucun renfort scénographique, d’aucune machinerie, pour exister. Comme dans Soldate, leur précédent opus repéré à Avignon l’été dernier dans le cadre de la programmation hors les murs de la Scierie, le dispositif est le même, léger. À peine quelques changements de costumes, une poignée de chaises, beaucoup d’allant, c’est un théâtre qui mise avant tout sur le jeu. Et en cela nous offre la jubilation de découvrir de nouvelles têtes, de belles personnalités scéniques qui toutes existent pleinement dans leurs épiphanies en solo, en duo ou dans le groupe. Mais là où Soldate déployait sa fougue dans le tout terrain du plein air et les transformait en guerrières aussi comiques que téméraires, embrassant et questionnant les récits héroïques au féminin dans une friche en périphérie de la ville, Mère couve l’intimité de ses scènes sous la charpente chaleureuse du Théâtre de la Reine-Blanche et sous les lumières subtiles de Zoé Ritchie qui découpent l’espace en halos isolants quand il le faut, sculptent les corps vibrionnants et installent des ambiances changeantes en accord avec les états psychiques et physiques des protagonistes.

L’entrée en matière pose le cadre et le thème abordé : un stage intensif autour de la relation mère-fille sous la houlette d’une médiatrice borderline et de son assistante zélée. Entre échauffements pour se mettre en condition, cercles de parole houleux et déflagrations personnelles, les jours passent cahin-caha et la situation de départ vole en éclats. À l’écriture et à la mise en scène, ainsi qu’au plateau avec ses coéquipières, Ambre Matton révèle une plume tranchante et roborative, toute en ruptures de ton, dérapages et pétages de plomb, aussi drôle que percutante. Rien de psychologique dans la manière d’aborder la figure maternelle, thématique largement rebattue, mais c’est l’enjeu financier que creuse la jeune autrice à la tête d’une compagnie fraichement née (en 2024) au titre programmatique : La Tronçonneuse. C’est donc forcément sous un angle aussi rentre-dedans que non consensuel – l’argent – qu’elle avance ses pions. Un tabou encore, surtout lorsqu’il s’agit d’aborder le sacro-saint amour inconditionnel, le sacrifice maternel qui a toujours bon dos. Chez Ambre Matton, le don de soi se fait avec perte (économique) et fracas (psychique), inégalité ravageuse à laquelle elle rend justice à sa façon, avec un humour qui fait mouche, des statistiques documentées, des détours mythologiques du côté de Thétis et Médée, un titre d’Anne Sylvestre en plein dans le mille et un sens de l’observation aiguisé. Combien ça coûte l’amour ? Est-il possible de chiffrer la dette autant que de l’effacer ?

Là où Soldate se référait à l’épisode biblique et sanglant de Judith et Holopherne peint par l’artiste italienne Artemisia Gentileschi au début du XVIIe siècle, Mère en appelle à Homère dans des va-et-vient entre le présent contemporain et les récits occidentaux ancestraux qui nous façonnent, et cette façon de tresser ses emprunts et ses sources apparaît dans ce second volet d’un cycle des Descendantes – une tétralogie en cours, dont le prochain opus, Femme de Cro-Magnon, est en préparation – comme une ligne de conduite narrative de l’autrice. Sous le réalisme de certaines situations et dialogues, couve sans cesse la possibilité de l’intrusion du mythe, de l’explosion de la psyché, du corps qui déborde, de la parenthèse chorégraphique – quand le cercle de parole se met en mouvement dans une transe circulaire réinventant le folklore, la représentation bascule encore et c’est dans les corps que se jouent alors la force des femmes et le poids qu’elles portent. C’est vivifiant, jamais confortable, toujours sur le fil entre la blague et le grave, c’est pensé, profond, espiègle et pétaradant. Jamais installé. Toujours prêt à nous dérouter. Porté par un sextet de comédiennes aussi attachantes que surprenantes. Ces filles-là ont le feu et la foi dans ce qu’elles font et c’est contagieux.

Marie Plantin – www.sceneweb.fr

Mère
Texte et mise en scène Ambre Matton
Avec Camille Arrivé, Carla Gauzès, Ambre Matton, Rosa Pradinas, Raphaëlle Simon, Mathilde Wind
Création lumière Zoé Ritchie
Chorégraphie Camille Arrivé
Regard costumes Françoise Léger

Production Compagnie La tronçonneuse
Coproduction Blast collective
Avec le soutien du Théâtre 13, du TCI, de l’ESCA, de L’Azimut, de La Loge, d’AF&C

Durée : 1h20

La Reine Blanche, Paris
du 21 novembre au 19 décembre 2025

22 novembre 2025/par Marie Plantin
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