Abordant les questions de mémoire traumatique et de résilience, la pièce dessine le parcours d’une double naissance : celle de la jeune Félicité, qui réapprend à vivre après le traumatisme du viol, et celle de celui qu’elle porte, ce « petit boucher » qu’elle va réussir à nommer « enfant ».
En cela elle est un hymne à la vie puissant et poétique, enrichi par un langage chorégraphique qui prend le relais de ce que Félicité ne peut « dire ». Dans cette forme affirmée, l’histoire de Félicité se reconstitue alors comme un puzzle, cheminant en 12 stations qui sont autant d’étapes vers la résilience.
Au cœur du récit, le temps 6 est une plongée dans la forêt, lieu ultime du traumatisme, où la famille s’est réfugiée pour échapper au déferlement de la guerre et de ses atrocités. Et où Félicité sera violée par le boucher du village. Cette « destruction » individuelle qui mène à la dislocation du lien social et familial – à elle la honte, à elle la faute – est portée par une langue puissante, qui, en même temps qu’elle donne accès aux mouvements de la pensée de Félicité, la projette dans la violence du monde.
C’est cette langue nue, poétique, que je souhaite faire entendre : la langue du trauma.
Cette reconstitution du témoignage – ce qui est dit, ce qui est tu – que je veux mettre à l’épreuve ; Félicité oscille entre deux réalités, celle de l’hôpital et celle qu’elle se (re)construit, elle navigue entre cauchemar, fantasme et provocations quotidiennes, dans un temps qui échappe à une ligne narrative chronologique.
Le rapport à la mémoire est central dans Le Petit boucher ; il rejoint le travail que la Compagnie mène depuis plusieurs saisons sur la question de la trace.
Celui-ci s’enrichit pour cette création d’une collaboration avec la chorégraphe Marjory Duprés, où un langage parallèle s’élabore, autour de la notion de gestes suspendus, répétés ou avortés ; le corps prend ainsi le relais de ce que Félicité ne peut dire, il provoque des trouées dans la trame du texte. Cette partition du mouvement, dans un environnement où le texte même est matière sonore, s’appuie sur une recherche autour des mécanismes neurobiologiques de sauvegarde, qui se déclenchent quand l’individu est en état de stress extrême (mécanismes de sidération, de disjonction, décrits dans des situations de mémoire traumatique).
Le petit boucher
Texte Stanislas Cotton
Mise en scène Agnès Renaud
Avec Marion Bottollier
Chorégraphie Marjory Duprés | Scénographie Anne Bothuon | Lumières Véronique Hemberger | Univers sonore
Jean De Almeida | Costumes et accessoires Lou Delville | Conseil marionnettique Brice Coupey | Régie Jérémy Pichereau et Jean-Marc Sabat
Production Compagnie L’Esprit de la Forge en convention avec le Ministère de la Culture DRAC Hauts-de-France,
la Région Hauts-de-France et le Conseil départemental de l’Aisne | Co-production Maison des Arts et Loisirs de Laon
(02) et Centre André Malraux – Scène(s) de Territoire d’Hazebrouck (59) | Avec le soutien de la Région Hauts-de-France
dans le cadre du dispositif « Hauts-de-France en Avignon » | Remerciements La Fileuse – friche artistique de Reims
(51), Laboratoire Chorégraphique de Reims (51), Théâtre Jacques Carat de Cachan (94), La Filature de Bazancourt (51).Durée • 1h15
Off 2019
11 Gigamesh
5 – 26 JUILLET À 13H50
Relâches les 10, 17 et 24
Salle 3Le Cellier, Reims × du 18 au 23 nov. 2019
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