Seul sur les planches, Marc Arnaud incarne un jeune homme dans une salle de recueil de sperme. L’auteur et comédien y voit l’occasion de formuler ses doutes sur la paternité, avec intelligence et drôlerie. Un sujet qui questionne des tabous et une belle révélation théâtrale.
Un poil prosaïque, voire un peu vulgaire, l’histoire de cette pièce tient sur un coin de Kleenex. La Métamorphose des cigognes, en dépit de son titre joliment poétique et délicatement évocateur, raconte l’histoire d’un type qui doit éjaculer dans un gobelet. De l’autre côté de la porte, des médecins attendent son sperme pour tenter de féconder sa femme, allongée au bloc opératoire, sous anesthésie générale, en vue d’une ponction ovarienne pour réaliser une fécondation in vitro. Ce type, c’est Marc Arnaud, l’auteur du spectacle, et, contrairement à ce que pourrait sous-entendre cette histoire, son écriture, ses réflexions, son jeu, ses imitations sont tout sauf prosaïques et vulgaires. Pendant un peu plus d’une heure, seul en scène, ce jeune quadra à l’allure de Ben Stiller, retrace son adolescence et ses premiers émois amoureux, narre son couple et ses désirs d’enfantement, formule ses doutes sur la paternité et questionne sa propre virilité au fil d’anecdotes savoureuses, tandis que de l’autre côté de la porte, le temps passe et que le personnel hospitalier se montre de plus en plus pressant.
Le gimmick narratif qui tend la pièce, fonctionne à merveille, et permet à l’auteur-comédien de composer, avec la complicité du metteur en scène Benjamin Guillard une galerie de personnages captivante : l’infirmier impatient, le voisin bourru de la salle d’attente, le médecin anxiogène – et même sa mauvaise conscience personnifiée en un diablotin décérébré (à hurler de rire) -. C’est juste et joué avec la folie adéquate pour aborder de façon singulière la question de l’infertilité masculine ; un sujet, hélas, encore un peu tabou. Un petit bémol tout de même. Avec son récit autobiographique, Marc Arnaud s’impose comme un type irréprochable, que ce soit quand il parle de sa femme et à son (futur ?) enfant. Peut-être qu’un brin de vices aurait permis de contraster ce portrait d’homme, certes fragile, mais très idéalisé. Mais après tout, Marc Arnaud est peut-être le type idéal…
Initialement créé dans une forme courte à l’occasion du festival « Mises en Capsules » au Théâtre Lepic en 2019, ce spectacle fit un carton au dernier festival d’Avignon et devrait s’imposer, prenons le pari, comme un tube du théâtre privé ces prochaines saisons. Une chose est sûre, il le mérite.
Igor Hansen-Love – www.sceneweb.fr
LA MÉTAMORPHOSE DES CIGOGNES
Auteur Marc Arnaud
Mise en scène Benjamin Guillard
avec Marc ArnaudCréateur lumière François Leneveu
UNE PRODUCTION ACME ET 964 PRODUCTIONS
Durée: 1h05
La pépinière Théâtre
tous les lundis à 19h
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