Inoxydables : l’amour, la rage, au cœur et au corps

Inoxydables. Photo Vincent Arbelet

Au Théâtre du Rond-Point, l’autrice Julie Ménard et la metteuse en scène Maëlle Poésy présentent Inoxydables, une fable palpitante de vitalité qui relate le destin d’un couple contraint à l’exil.

Des lumières de boîte de nuit, des bouffées de fumée, des volutes de sons criards, de l’alcool à flot, des rires, des cris, s’échappent de la danse fiévreuse des corps qui s’attirent irrésistiblement dans la moiteur brûlante de la nuit. Sil est bassiste dans un groupe de musique, Mia, avoue ne jamais avoir reconnu la basse sur un morceau. Ils se rencontrent pour la première fois, se plaisent et tombent aussitôt amoureux. C’est sur cette liaison naissante que commence Inoxydables. Mais, pour autant, la pièce ne promet pas de narrer le parcours d’un couple tranquille et anodin. D’abord parce qu’aucune convention ne vient dicter à ses deux personnages un autre mode de vie que celui volontiers marginal qu’ils assument parfaitement. Ensuite, parce qu’ils sont soudainement précipités dans la fuite et l’urgence de survivre. L’amour chevillé au corps, les deux héros voient leur destin basculé et doivent prendre coûte que coûte le chemin de l’exil forcé pour tenter d’échapper à la guerre qui éclate. Tout quitter, partir, reconstruire, échouer, recommencer… Devenus réfugiés, leur existence contenue dans un maigre sac à dos, ils cherchent à rester à vie.

Inspirée de l’histoire personnelle d’un jeune exilé afghan que l’autrice a rencontré et accueilli, la pièce s’écarte d’emblée du documentaire et, plutôt que de saturer d’informations, préfère mâtiner de flou le contexte géographique et politique dans lequel s’inscrit l’histoire qu’elle relate. Le texte, la mise en scène, le jeu des acteurs, concourent davantage à faire de la représentation un moment d’une sourde intensité. Le propos transpire d’une évidente actualité et en même temps d’une grande universalité. Les mots, les êtres, les situations restitués sur scène sont d’une contemporanéité immédiate. Pleine d’humour et de passion qui permettent de voir conjurer le drame qui se donne à entendre et à voir, la pièce s’offre surtout comme le récit d’une vaste épreuve qui transpire d’une profonde humanité.

Le travail réalisé par Maëlle Poésy dans un dispositif quadri-frontal permet de montrer un vaste périple dans un espace  fermé. Dans la proximité imposée, éclate une tension physique et psychologique qui insiste sur la force combative et la soif de liberté omniprésentes dans la pièce. La musique rock de Romain Tiriakian y trouve sa juste place. Elle rythme et pulse le parcours des personnages interprétés de manière aussi crédible que jouissive par deux jeunes comédiens : Mathilde-Edith Mennetrier et Benjamin Bécasse-Pannier jetés à corps perdus dans une véritable course en avant et increvables car plein de fougue et d’entièreté.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

Inoxydables
Texte Julie Ménard
Mise en scène Maëlle Poésy
Dramaturgie Kevin Keiss
Avec Mathilde-Edith Mennetrier et Benjamin Bécasse-Pannier Assistanat à la mise en scène Raphaël Patout
Lumière Mathilde Chamoux
Vidéo Quentin Vigier
Son Samuel Favart Mikcha
Scénographie Hélène Jourdan
Costumes Camille Vallat
Production Théâtre Dijon Bourgogne, CDN
Coproduction Compagnie Drôle de Bizarre / Crossroad
Avec le soutien de Région Bourgogne-Franche-Comté ; DRAC Bourgogne-Franche-Comté ; FONPEPS ; FIJAD, Fonds d’Insertion pour Jeunes Artistes Dramatiques — DRAC et Région Provence-Alpes-Côte d’Azur
Le texte de Julie Ménard a recu les encouragements de la Commission nationale d’aide à la création de textes dramatiques en mai 2017
Maëlle Poésy est artiste associée au Théâtre Dijon Bourgogne, CDN depuis septembre 2016

Durée : 55 minutes

Théâtre du Rond-Point
du 4 au 29 janvier 2023
à 20h30 du mardi au samedi, et à 15h30 le dimanche