Créé à la Comédie de Reims, L’heure bleue de David Clavel met en scène une distribution dominée par Emmanuelle Devos et Anne Suarez jouant les retrouvailles d’une fratrie confrontée à un passé trouble émaillé de mensonges et de non-dits.
Au théâtre, depuis ses origines antiques, comme au cinéma et à la télévision, les histoires de famille sont un sujet inépuisable, surexploité parfois jusqu’à la saturation ou la banalisation. Sans être follement original, L’Heure bleue est traité avec une subtilité appréciable. Bien sûr, son intrigue regorge de révélations dévastatrices dans la pure convention du genre, mais encore une fois, l’écriture textuelle et scénique de David Clavel se distingue par la subtilité et la sensibilité avec lesquelles elle dessine la tragédie et les rapports humains.
Isolées dans une maison bourgeoise éloignée de tout, où la vieillesse et la tristesse sont omniprésentes et évoquées avec une certaine drôlerie corrosive mêlée de crudité, deux femmes, radieuses, préparent la table, ouvrent le vin blanc, disposent les fleurs, avec une légèreté et une bonne humeur qui dissimulent mal une évidente tension tandis que va se produire un événement important qui met tout le monde en ébullition. Emmanuelle Devos, un brin allumeuse et volubile, incarne la passion, absolue, inconséquente ; Anne Suarez, plus à vif et à cran, se range du côté du devoir, de la sollicitude. Chacune suit avec justesse le registre et la trajectoire de son personnage bousculé par le retour du frère, absent depuis une fugue aussi soudaine qu’inexpliquée il y a vingt ans. Les membres épars de la famille tentent de se ressouder tandis que le patriarche mourant se veut glaçant de froideur et de dureté, même jouissivement campé par Daniel Martin avec une pointe de folie ravageuse.
L’action qui se déroule dans un espace intimiste et morcelé, entre réalisme et abstraction, et déploie son lot de règlements de compte jusqu’au délitement. Les vérités éclatent, trouées d’une violence inévitable mais aussi d’appels nécessaires à la tendresse. Autour d’un passé pesant et envahissant, les êtres se déchirent, se morfondent. La mise en scène et le jeu d’acteurs retiennent l’excès de pathos ou d’hystérie propre au mélodrame pour mieux se montrer véhéments et parfois émouvants.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
L’Heure bleue
TEXTE, MISE EN SCÈNE David Clavel
COLLABORATION ARTISTIQUE Anne SuarezAVEC
Avec
Maël Besnard,
David Clavel,
Emmanuelle Devos,
Valérie de Dietrich,
Daniel Martin,
Anne SuarezSCÉNOGRAPHIE
Emmanuel ClolusLUMIÈRES
Thomas CottereauSpectacle créé en janvier 2020 à la Comédie – Centre dramatique national de Reims. Production déléguée CENTQUATRE-PARIS. Coproduction Théâtre de Nîmes, scène conventionnée d’intérêt national – art et création – danse contemporaine, Comédie – Centre dramatique national de Reims. Avec le soutien du Jeune Théâtre National. Le texte a été lu pour la première fois dans le cadre de La Mousson d’été (Pont-à-Mousson) le 28 août 2018. Ce spectacle est en tournée avec le CENTQUATRE ON THE ROAD. David Clavel est artiste associé au CENTQUATRE-PARIS.
Durée : 2 heures
Comédie de Reims
Du 14 au 18 janvier 2020
(Grande Salle)
3 chaussée Bocquaine, ReimsLe 104
du 25.01 > 08.02.2020
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