Les acteurs de Répétition au théâtre de Gennevilliers ont été incapables de jouer mercredi soir, traumatisés par l’ampleur de l’acte barbare qui s’est perpétré dans les locaux de Charlie Hebdo. Beaucoup de directeurs sont montés sur scène avant les représentations pour exprimer leur compassion avec les victimes comme cela a été le cas à la Comédie-Française. Eric Ruf, l’administrateur a lu un texte avant de demander une minute de silence. La Comédie-Française accompagnera la marche silencieuse de dimanche avec les comédiens qui ne seront pas sur scène. « Cette horreur a une résonance particulière sur un plateau de théâtre parce qu’il est évident que ces fous visent la liberté d’expression » a exprimé Eric Ruf en évoquant des souvenirs récents avec Cabu, spectateur assidu de la Comédie-Française.
Denis Podalydès et les acteurs de Répétition seront également dans la rue, la représentation de dimanche a été reportée pour permettre au public de marcher. Beaucoup de théâtres ont aussi fait le choix de décaler les représentations, comme c’est le cas au Théâtre Gérard Philipe à Saint-Denis. Le Théâtre de la Commune à Aubervilliers annule la représentation de Viejo, solo y puto. Les spectateurs pourront se reporter sur une autre date.
Les humoristes n’ont pas le cœur à jouer et pourtant les théâtres restent ouverts. « C’est de notre devoir de jouer pour dire que nous sommes forts et que nous faisons face » nous a déclaré Jean-Marc Dumontet, le directeur du Point-Virgule. « Ce sont des héros, ils ont continué alors qu’ils savaient les risques qu’ils prenaient. Malgré notre chagrin on doit continuer, même si le cœur n’y est pas, faire rire c’est quelque chose de bien dérisoire. »
Beaucoup d’artistes sont spontanément descendus dans la rue mercredi soir place de la République pour se mêler à la foule. C’est le cas de l’auteur Eric-Emmanuel Schmitt. « Devant cette violence s’affirme la volonté de vivre ensemble, d’avoir certaines valeurs et de ne pas lâcher le terrain de l’humanisme, du dialogue, de l’échange, de l’humour, de la légèreté » nous a déclaré le romancier. « Car on doit pouvoir rire de tout. On doit pouvoir échanger sur tout même si on n’est pas d’accord. Ce traumatisme nous permet de nous rendre compte des choses essentielles qui sont nos liens. On ne rendra jamais la vie aux morts mais on peut rendre leur mort utile en réaffirmant nos valeurs de liberté et d’intelligence. » Il sera présent à la marche silencieuse de dimanche comme Pierre Arditi qui est actuellement en tournée. « Dans le cas présent la démocratie est attaquée d’une manière si terrible que l’on ne peut pas rester les bras ballants et les mains sur la couture du pantalon en attendant que cela se passe » a commenté le comédien. « Il faut prendre notre courage à deux mains et descendre par millions dans la rue. Que la communauté musulmane descende elle aussi et dise son horreur de ce qui vient de se passer. »
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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