Curieux « chef d’œuvre » jugé « mineur » que cette comédie en trois actes. C’est probablement la seule qui vienne de si loin dans la carrière de Molière. On sait qu’il la reprend plus ou moins pour soutenir le demi-succès du « Misanthrope » que son public trouve trop difficile, et pour faire remonter les recettes de la troupe en chute libre depuis de longs mois. Et il la ressort de son vieux répertoire d’acteur de province. Il l’a probablement joué plusieurs fois sous divers titres : « Le Fagotier » ou « Le Médecin par force », en y rajoutant des gags, des scènes entières et des mots « à propos » dans chaque nouvelle version. Mais s’il décide de reprendre son répertoire ancien, alors qu’il sent ses forces décliner, c’est surtout qu’il veut à tout prix retrouver Sganarelle (ce sera la dernière fois) et qu’il sait que son alter ego lui assurera succès et reconnaissance de son cher public (ne le nomme-t-on pas Sganarelle dans les rues de Paris ?). Pitreries, grossièretés, coups, disputes ménagères, enlèvement, leçon de médecine avec clystère et excréments : le farci est copieux et varié, dans cette ultime version, le « digest » de la saga Sganarelle… Mais le coup de force réside surtout dans le fait que Molière continue d’y traiter sur le mode joyeux de ses obsessions du moment (n’oublions pas que nous sommes en pleine « affaire Tartuffe ») : un combat sans répit contre l’hypocrisie, celle des médecins bien sûr, mais qui dit docteurs dit université, et qui dit université en 1667 dit église, et qui dit église… Voilà tout ce que j’aime dans « Le Médecin », le relent de fabliau carnavalesque, une construction par strates dans laquelle les coutures sont parfois visibles (quel charme dans ce manteau d’Arlequin), mais surtout cette sainte colère qui ne le lâchera jamais, et que nous entendons au delà des siècles dans l’éclat de rire picaresque de son personnage : le combat pour la vérité. Note d’intention de Jean-Claude Berutti – janvier 2009
Le Médecin malgré lui de Molière
Mise en scène Jean-Claude Berutti
avec
Djamel Hadjamar Sganarelle
Delphine Roy Martine
François Font Géronte
Louis Bonnet Valère,Thibaut
Olivier Parenty Lucas
Jacqueline Bollen Jacqueline
Julie Delille Lucinde, Perrin
Vincent Dedienne, Léandre, Monsieur Robert
Scénographie : Rudy Sabounghi
Costumes : Colette Huchard
Lumière : Laurent Castaingt
Son : Fabrice Drevet
Réalisatrice maquillage : Nathy Polak
Dramaturgie : Yves Bombay
Assistante à la mise en scène : Suzanne Emond
Durée approximative : 1h30
Coproduction : La Comédie de Saint-Étienne – CDN – Le Théâtre de la Place (Liège)
Du lundi 10 au samedi 15 janvier à Angers au Quai T900
(lundi au mercredi à 19h30, jeudi à samedi à 20h30)
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