Standing ovation pour la première du Lac des Cygnes à Chaillot. Le ballet XXL d’Angelin Preljocaj peut enfin reprendre sa route, après sa création retardée à La Comédie de Clermont-Ferrand, puis sa tournée stoppée nette après quelques représentations à Aix-en-Provence à l’automne. Les 26 danseurs de la compagnie peuvent enfin déployer les ailes de ce Lac des cygnes vivifiant et revisité, avec l’introduction de la musique électro du groupe 79D. Interview bord de plateau avec Angelin Preljocaj, à l’issue de la première.
Le public des Chaillot a réservé un accueil chaleureux à votre Lac des Cygnes. Cela valait le coup d’attendre ?
Oui. Ça y est, c’est le lac qui prend feu là et qui grandit chez lui, dans le corps des danseurs et sur la scène face au public. C’est merveilleux. C’est un grand et beau moment. On a commencé cette création avec un mois de retard, mais j’ai récupéré des danseurs complètement affamés de mouvements et d’espace de danse et du coup, j’ai profité de cette énergie pour créer cela. Et voilà, c’était vraiment super de faire ça pendant ce confinement.
Vous renouez avec un ballet grand format. Peut-on dire que c’est un ballet de compétition ?
Certains le savent peut-être pas, parfois, je fais des choses très, très d’avant-garde, très minimalistes, très radicales. Mais là, j’avais vraiment envie de me faire plaisir, de faire un spectacle à la portée de tout le monde sans jamais rabaisser mon niveau d’exigence. J’ai aiguisé la danse avec mon petit poignard et j’ai essayé de donner tout ce que j’avais à donner. Mais c’est surtout les danseurs qui ont donné énormément.
Le ballet est traversé par différents styles. Vouliez-vous rendre hommage à l’histoire de la danse ?
Il y a plein de styles de danse, d’ethnies. On pourrait dire c’est un peu comme les danses du monde entier qui essayent de se retrouver là. Mais en même temps, surtout ce que j’ai essayé, c’est de reconnecter ce Lac des cygnes à notre époque. Ça m’est venu assez simplement, juste en analysant le titre.
Vous respectez les actes du ballet de Tchaïkovski et du livret d’origine de Vladimir Begitchev, mais le ballet est ancré dans le 21e siècle. C’est une ode à la nature qui disparait peu à peu face à la technologie, à l’essor des villes qui gagnent du terrain sur la campagne. Votre Lac des Cygnes est-t-il un ballet politique ?
Aujourd’hui, à cause des problématiques climatiques, on est dans des situations où on pourrait se demander si nos enfants et les enfants de nos enfants sauront un jour ce que c’est qu’un lac, parce qu’il y a tellement de lacs qui s’assèchent à cause de la chaleur. Et puis, il y a des tas d’espèces d’animaux qui disparaissent, des oiseaux, des mammifères. Je ne suis pas contre le progrès. Mais je pense qu’il faut remettre un peu d’éthique dans le progrès pour pouvoir le concilier avec la nature et avec notre planète qui est quand même vraiment notre partenaire et pas notre ennemi. Faut pas la défoncer, cette planète.
Propos recueillis par Stéphane Capron – www.sceneweb.fr
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !