Recroquevillé, soutenu par deux canes, le visage dissimulé, c’est Hyde qui s’avance sur scène au début du spectacle, la partie obscure de Jekyll. «Le cas Jekyll » c’est l’histoire de la transformation d’un homme, le docteur Jekyll, ce gentleman londonien tiraillé entre deux personnalités. « L’Étrange cas du Docteur Jekyll et de Mister Hyde » (The Strange Case of Dr Jekyll and Mr Hyde) est une nouvelle de Robert Louis Stevenson publiée en janvier 1886, réécrite par la romancière Christine Montalbetti pour cette version théâtrale. Un texte taillé sur mesure pour Denis Podalydès, un texte tout en nuance qui colle à sa personnalité.
Jekyll, Hyde, deux noms pour un même personnage. Jekyll et Hyde – deux noms qui résonnent dans toutes les mémoires. Entre les chansons de Gainsbourg, et les incarnations au cinéma de John Malkovich ou d’Anthony Perkins, ces héros ont toujours intrigué. Qui n’a jamais eu envie un jour de se transformer. Le théâtre donne cette possibilité à Denis Podalydes. « J’aimerais que le spectacle fût cela pour le public : l’invitation à une expérience morale, en direct, à se demander si cela nous ferait du bien, de temps en temps, de pouvoir ainsi se dédoubler, puis d’envoyer dans les bas-fonds notre part désirante, afin d’avoir le plaisir, au petit jour, de retrouver notre bonne personne et de permettre à notre part « autorisée » de s’effacer vertueusement et sans culpabilité des écarts de « l’autre »[1].
Denys Podalydès s’est entouré d’Emmanuel Bourdieu et d’Eric Ruf (lui aussi sociétaire de la Comédie Française) pour se mettre en scène. Une partition à six mains qui a choisi de nous faire plonger dans les bas fonds de Londres, dans l’espace glauque de la partie obscure de Jekyll : une chambre décrépie, poussiéreuse. C’est dans cet espace que Jekyll subit les transformations. Denis Podalydès se couvre peu à peu de poils, pour devenir la bête honteuse. Mais l’on ne sent pas assez la noirceur du texte, la moiteur des brumes de Londres. Malgré le jeu parfait de Denis Podalydes qui vient chercher au plus profond de ses yeux le regard des spectateurs, l’ensemble manque de tension. Il y a des moments où le spectacle tente de basculer vers le fantastique, lorsque la voix de Jekyll se transforme pour devenir Hyde, lorsqu’il grimpe aux murs moisis pour clamer sa douleur, mais ces moments fugaces retombent assez vite, sans faire décoller l’ensemble.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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[1] Interview dans programme – Hugues Le Tanneur
Le Cas Jekyll
Texte :Christine Montalbetti
D’après Robert-Louis Stevenson
Mise en scène et interprétation :Denis Podalydès*
Co-mise en scène :Emmanuel Bourdieu et Eric Ruf*
Scénographie :Eric Ruf
assisté de Delphine Sainte-Marie
Costumes :Christian Lacroix
Avec la collaboration de Renato Bianchi
Chorégraphie :Cécile Bon
Lumière :Stéphanie Daniel
Son :Bernard Valléry
* sociétaire de la Comédie-Française
Production Maison de la Culture d’Amiens – Centre de création et de production
Coproduction Théâtre National de Chaillot / Théâtre du Jeu de Paume – Aix-en-Provence
Salle Gémier
Du 10 au 21 mai 2011, 20h30
Relâche dimanche et lundi
sans oublier le film éponime avec jerry lewis qui en plus opérait un double renversement : le dr jekyll étant une sorte de professeur fou moche ; sa contrepartie étant un Hyde dandy superclasse.
On aurait aimé adhérer à l’excellente interprétation de Denis Podalydes mais la sauce ne prend pas.