Lavinia Osimo et Mathilde Rousseau dans ALMA

Avec la première pièce de la compagnie, Tilda et Rose, créée en 2023 au Collectif 12 à Mantes-la-Jolie, nous avons voulu parler de la mort aux enfants car la possibilité d’en parler, enfants, nous a manqué. En novembre 2022 nous étions en pleine création de ce spectacle, et une amie proche s’est noyée. Alma avait notre âge, et le non-sens de sa mort nous a bouleversées car il nous a mises face au non-sens de la vie, nous questionnant sur nos raisons à nous de continuer à vivre. Face aux raisons pour lesquelles les adultes ont du mal à parler, non seulement aux enfants, mais aussi entre eux, de ce qui les peinent, notre deuxième projet, ALMA, nous est ainsi tombé dessus.

Le Pépin a pour objectif, dans ses créations, de donner de la visibilité à tout ce qu’il y a autour du silence et que l’on a tendance à choisir pour se protéger des événements traumatisants de la vie. Nous avons donc choisi de traverser ce deuil ensemble et de voir ou cela nous mènerait : le fait de ne pas se laisser d’autre choix que de plonger dans cette douleur nous a permis de traverser des émotions qui n’ont pas la place de sortir d’habitude, et de faire face aux fantômes qui nous habitent depuis longtemps.

Donner de l’importance à ces fantômes et à la mort d’Alma par un geste artistique qui porte son nom est la manière que nous avons choisie pour nous sortir de ce vertige, et lui rendre hommage sans pour autant mourir avec elle. Par ailleurs, le fait d’arriver à traverser un événement aussi traumatisant sans succomber, nous a appris que dans la vie il n’y a rien de si effrayant qui ne puisse être traversé, et que la peur de se faire écraser par la douleur, la honte, la colère et d’autres émotions considérées comme négatives ou exagérées par notre société (elle-même très violente), ne pouvait être une raison suffisante pour ne pas s’exprimer, et s’autoriser à vivre pleinement.

ALMA est donc devenu un récit dans lequel, par le biais d’une fiction où nous parlons de nous, on s’autorise à aborder toutes les émotions et les vécus qui ont re-affleuré en traversant ce deuil. En écrivant cette pièce nous avons fait le pacte de ne jamais nous censurer : que ce soit par les mots écrits et dits, par les sujets abordés, par les émotions sur lesquelles on s’attarde. On se livre pleinement, dans le propos et dans le jeu. La forme est libre et indéfinissable, comme nous souhaitons l’être. ALMA est notre manifeste, un manifeste dans lequel on affirme notre droit d’exprimer tout ce que nous voulons, quand nous le voulons et comme nous le voulons.

Dans un monde qui devient de plus en plus réticent au fait de créer juste pour le plaisir – comme si toutes créations devaient être payantes, et comme si le fait de prendre du plaisir en travaillant devait se payer – et dans lequel être sensible aux évènements atroces qui nous entourent est considéré comme naïf, nous avons eu envie de nous laisser aller à tous nos ressentis.

Ici, on affiche nos peurs et on raconte nos vécus les plus sombres. Ici, on se permet de tout vivre pleinement et en plein jour pour tout transformer, pour nous transformer. À l’aide l’une de l’autre, ce processus nous a permis dans un premier temps d’accepter les épreuves de la vie comme des simples expériences – qui ne sont ni pour ni contre nous – et dans un deuxième temps, de retrouver le goût de vivre et de l’espoir pour la suite de nos vies, encourageant les autres à faire de même.

ALMA

Écriture, mise en scène et jeu : Lavinia Osimo et Mathilde Rousseau

Scénographie : Michela Osimo

Lumière : Noémie Richard

Création sonore : Solal Mazeran

Création costume : Ariane Brugvin

13 et 14 février 2025
20h au Collectif 12 (Mantes-la-Jolie)