Chaque mois sceneweb demande à un artiste de plonger dans sa mémoire pour nous proposer son album photo. A travers ces dix photos l’artiste confie dix moments importants de sa carrière. Ce mois-ci sceneweb a rencontré Jean-Luc Revol. Metteur en scène, acteur, ce bourguignon de naissance est un artiste multidisciplinaire. Il aime le théâtre, l’opéra, et le théâtre musical. Jean-Luc Revol colle bien à l’identité du site, un artiste sans frontière, sans parti pris. Il présente actuellement à la Pépinière Théâtre « Non je ne danse pas ! » une comédie chantée de Lydie Agaesse. Merci à Jean-Luc Revol d’avoir joué le jeu, il est en quelque sorte le parrain de sceneweb.
1985 – Bikini blues
« Le dernier spectacle amateur à Nevers avant la création de ma compagnie « Le Théâtre du Caramel Fou – TCF ». C’est en quelque sorte l’ancêtre du « Cabaret des hommes perdus ». Cela se passe dans une boîte de travestis, c’est sanglant, les deux travestis s’entretuent. C’était un OVN pour l’époque. Le décor était une boîte rose ».
1992 – Molière « La Princesse d’Élide »
« L’un de mes rôles préférés, Moron, je me poignarde. C’est le premier spectacle de la compagnie qui a marché. Il a été créé à Nevers, puis nous l’avons joué au Balcon à Avignon. Il y a une grande toile peinte derrière, j’adore les toiles peintes. Il y avait Marina Foïs, Valérie Benguigui, Daniel San Pedro. C’est une pièce peu connue de Molière, j’ai aimé au début de mon parcours chercher des textes peu joués, cela donnait plus de liberté, c’était l’insouciance de l’âge. Plus on avance, plus on t’attend au tournant, il y a moins la liberté du début. Sur la photo on voit une écharpe Lacroix transformée par Pascale Massicot ».
1994 – « L’heureux stratagème » de Marivaux.
« C’est le spectacle qui a fait que tout a démarré. Nous l’avons joué en Avignon, au théâtre du Balcon, et c’était plein tout le temps, puis il a été repris à l’étoile du Nord, ensuite à la Comédie des Champs-Elysées. On l’a joué 200 fois. Il y avait Marina Fois, j’avais déjà travaillé trois fois avec elle avant. C’est sur ce spectacle que j’ai rencontré ma décoratrice Sophie Jacob. »
1997 – « La Tempête » de Shakespeare
« Gildas Bourdet m’avait confié cette mise en scène au Théâtre de la Criée. Quel plaisir de créer dans un tel lieu. Un théâtre italien est échoué sur la scène. Il y avait déjà Alexandre Bonstein. Les costumes sont magnifiques dans le style espagnol, ce sont des armures. J’en ai vendu certains, mais j’ai encore les décors à Nevers ».
2003 – « Don Pasquale » de Rossini
« C’est mon premier opéra, monté à l’Opéra de Dijon, puis à Massy. On voit ici Isabelle Poulenard dans le rôle de Dorine. Elle porte une robe avec des fleurs qui s’allument. Ce qui est bien lorsque l’on créé un opéra c’est qu’il y a de l’argent. C’est un monde que j’ai découvert, sans complexe. Il n’y a pas de contrainte. Ce n’est pas plus difficile de monter un opéra que du théâtre. J’étais à l’aise avec Rossini parce que je parle l’italien. Ce serait peut-être plus difficile avec un Wagner. »
2004 – « La fameuse invasion de la Sicile par las ours » d’après Dino Buzzati.
« Sur cette photo, vous découvrez le Théâtre Casino de Dax. J’adore cet endroit. L’un de mes théâtres préférés. Dès que je passe dans la région je vais le voir. Je réglais les éclairages. C’était un très beau décor, le théâtre bougeait sur un axe. C’était mon deuxième spectacle pour enfants. Il faut les faire rêver les mômes. J’avais le projet avec le chanteur Da Silva de monter un spectacle jeune public, une adaptation de ses chansons, c’est tombé à l’eau, c’est dommage. »
2005 – « Vincent River » de Philip Regley.
« J’avais reçu cette pièce par la poste, puis je l’ai laissé tomber un bout de temps avant de la reprendre. Elle est poignante. Je n’ai pas pu assister à la première le 19 octobre 2005, car je jouais la dernière de Richard III. C’est l’histoire d’une mère interprétée par Marianne Epin dont le fils a été tabassé lors d’une expédition punitive anti gay, et qui retrouve l’amant de son fils (Cyril Thouvenin) qui a été témoin du lynchage. C’est très noir, très british, très Ken Loach. La pièce a été créée au Théâtre du Marais, je voulais un rapport très proche entre les acteurs et le public, ce théâtre est idéal pour cela. »
2005 – « Richard III » de William Shakespeare
« C’est la rencontre avec Philippe Torreton, et nous sommes devenus ami. Une super aventure. Philippe Calvario l’a mis en scène aux Amandiers de Nanterre. J’ai toujours la perruque à la maison ! Nous avons de nouveau un projet avec Philippe Torreton. En 2011, je vais mettre en scène Hamlet au Festival de Grignan avec Philippe dans le rôle titre. »
2006 – « L’Amour des trois oranges » de Prokofiev.
« C’est du lyrique, et oui, je suis sur scène dans un opéra ! C’était au Teatro Real Madrid Madrid, dans une mise en scène de Philippe Calvario. C’est Michel Fau qui a créé le rôle, que j’ai repris en Espagne. Je joue une diva aphone. Elle arrive sur scène dans un grand manteau en vison, elle s’apprête à chanter et là rien, aucun son ne sort, alors tout le monde se jette sur elle, et on me vire de la scène, ensuite la diva va sniffer de la coke… ! »
2006 – Le Cabaret des Hommes Perdus –
« Une aventure qui a duré 7 ans entre la rencontre avec Christian Siméon, la création au Rond-Point et l’ultime représentation pour Act Up au Bataclan. Une fabuleuse histoire, dont tout le monde me parle encore et qui risque de rester dans les mémoires. Mais il faut passer à autre chose, et il n’est plus question de remonter le spectacle, d’ailleurs je récupère actuellement les éléments du décor pour d’autres projets. »
Bravo d’avoir « essuyé les plâtres » en beauté !
A bientôt
Jeanne
Jean-Luc Revol ou la passion d’un homme au service de son théâtre, avec ses exigeances, sa créativité, sa vision.
Et le plus merveilleux s’est d’arriver à entrainer autant d’adhésion, tant du public, que des critiques et des acteurs. La famille s’agrandit, toujours… Et reste la fragile beauté de la recherche et du don de soi, de l’amour partagé en réalité.
J’aime sa dernière phrase, à propos du succès de la pièce qu’il a mise en scène, « Le Cabaret des Hommes Perdus », et ce sera ma conclusion : « Une fabuleuse histoire, dont tout le monde me parle encore et qui risque de rester dans les mémoires. Mais il faut passer à autre chose ». Quelle rigueur ! Mais quelle justesse.
Théâtralement,
FJ
Magnifique.
beaucoup d’emotion dans ces photos