Un vent de rajeunissement, de féminisation et de diversité souffle en ce début d’année 2019. Plusieurs institutions publiques (Centre Dramatique National et Centre Chorégraphique National) changent de direction. Un mouvement initié par Françoise Nyssen lorsqu’elle était Ministre de la Culture, suivi également par la Ville de Paris pour ses établissements.
Souvent décriée lors de son passage rue de Valois, l’éditrice Françoise Nyssen aura néanmoins marqué sa patte dans ses choix de nominations dans les institutions décentralisées. En ce mois de janvier, de nouvelles équipes intègrent Colmar, Ivry, Reims, Rennes. Françoise Nyssen avait surpris tout le monde en nommant en mai 2018 le collectif FAIR[E] pour succéder à Boris Charmatz à la tête du Centre Chorégraphique de Rennes, faisant grincer quelques dents dans le milieu de la danse contemporaine. Le collectif FAIR[E] composé de Bouside Aït-Atmane, Iffra Dia, Johanna Faye, Céline Gallet, Linda Hayford, Saïdo Lehlouh, Marion Poupinet et Ousmane Sy vient du hip-hop.
Françoise Nyssen, attachée à la parité avait fait le choix de femmes pour diriger Reims et Vire. Chloé Dabert, 42 ans, a été choisie pour succéder à Ludovic Lagarde à la tête de la Comédie de Reims. C’est la première femme à diriger ce CDN, après Jean-Pierre Miquel, Jean-Claude Drouot, Denis Guénoun, Christian Schiaretti et Emmanuel Demarcy-Mota. A Vire, Lucie Berelowitsch succède à Pauline Sales et à Vincent Garanger. A Colmar, le tandem Emilie Capliez et Matthieu Cruciani succède à Guy-Pierre Couleau. A Ivry, Jean-Pierre Baro succède au tandem qui a porté à bout de bras l’installation du CDN dans la Manufacture des œillets : Elisabeth Chailloux et le regretté Adel Hakim.
Tous viennent avec la volonté d’ouvrir les théâtres à un public plus large encore en s’appuyant sur la continuité des lieux. “La transmission sera une part importante de mon projet” explique Chloé Dabert, nouvelle directrice de la Comédie de Reims. “Je ne viens pas pour tout casser. Je viens avec une nouvelle énergie, la mienne. Les choses évolueront avec les équipes en place. Je viens avec beaucoup d’artistes associés dont Christophe Honoré et Caroline Guiela Nguyen. J’ai cette culture de la maison d’artistes.”
La succession au TNP est ouverte
Ce changement de cap devrait se poursuivre cette année avec les nominations attendues à Angers, Thionville, Nice, Valence, mais aussi pour la direction du Centre National de la Danse après l’annonce du départ de Mathilde Monnier. La consultation qui sera la plus observée sera celle de la succession de Christian Schiaretti au Théâtre National Populaire de Villeurbanne. 19 candidatures ont été recues, visiblement assez peu de femmes. Le Ministère souhaite se pencher sur la crise des vocations, beaucoup de metteur.e.s en scène qui pourraient prétendre à diriger des CDN préfèrent rester en compagnie. C’est le cas de Pauline Bueau, Cyril Teste, Joël Pommerat ou Jean-François Sivadier.
Diriger une structure publique n’est pas une évidence pour beaucoup d’artistes. On a pu le constater cet automne avec le départ anticipé d’Irina Brook du Théâtre National de Nice. “Pendant ces années, on m’a répété que le CDN devait être un outil pour moi. D’autres y trouvent leur compte et je ne veux pas entrer dans les polémiques autour de cette question. Il s’agit d’une expérience personnelle et subjective. Mais, pour moi, j’insiste bien, être directrice, ça ne se marie pas avec artiste. D’aller tous les jours au même endroit par exemple, moi qui ne suis jamais restée deux ans dans un même lieu. Et d’avoir un travail qui me place au-dessus des autres, alors que comme artiste, j’ai besoin de me fondre avec les autres dans une relation d’égalité. C’est sûr que je ne serai plus jamais directrice de quoi que ce soit.”
Le Ministère souhaite mieux accompagner les nouvelles équipes dans leur prise de fonction, c’est aussi l’idée défendue à la tête de l’Association des CDN et de son nouveau bureau composé de Robin Renucci, Carole Thibaut et Joris Mathieu qui mettent en place des outils pour ne pas laisser les nouvelles équipes dans l’inconnu, et leur faire profiter de l’expérience des anciens.
Ce mouvement de rajeunissement se constate aussi pour les établissements culturels de la ville de Paris. Le Théâtre de l’Aquarium à la Cartoucherie a sauvé sa peau après une longue période d’inquiétude. Le Ministère et la ville de Paris ont choisi Samuel Achache et Jeanne Candel pour succéder à François Rancillac en de cébut d’année. Même choix de la jeunesse pour le Théâtre 14, théâtre d’arrondissement vieillissant qui sera dirigé à l’automne par Mathieu Touzé, directeur du Collectif Rêve Concret et Édouard Chapot, administrateur du CDN de Béthune.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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