Le metteur en scène français de théâtre et d’opéra, Jean-Marie Villégier, est mort à l’âge de 87 ans, apprend-on de son entourage. Directeur du Théâtre National de Strasbourg de 1990 à 1993, il avait fondé sa propre compagnie, l’Illustre Théâtre, en 1985.
Sa rencontre avec Marcel Bozonnet en 1969 est déterminante. Élève de l’École normale supérieure, agrégé de philosophie, Jean-Marie Villégier est nommé à l’université de Nancy en 1965 d’abord au Centre universitaire international de formation et de recherche dramatique (CUIFERD) puis au département d’études théâtrales et cinématographiques. Lors d’un stage, il croise donc Marcel Bozonnet, tout jeune comédien, qu’il l’invite à le rejoindre au sein de sa petite équipe d’amis qui répétait, Léonce et Léna. « Ce fut notre période merguez et bouts de ficelle » ironisait Jean-Marie Villégier. De 1973 à 1980, il est l’un des responsables du Centre de dramaturgie de l’Opéra de Paris. Il est chargé de la rédaction des programmes de salle. « Assister aux répétitions, rencontrer les chorégraphes, rédiger des textes d’analyse (le plus souvent sous pseudo…), puiser dans les fabuleuses réserves de la Bibliothèque-musée avec l’aide de son conservateur Martine Kahane, accompagner les photographes, veiller à la mise en page, tout cela m’a passionné » expliquait-il dans une interview accordée à Emmanuelle et Jérôme Pesqué. Il décide alors à se consacrer pleinement à la mise en scène.
Au début des années 80, il est invité par Jean-Pierre Vincent à l’École du Théâtre national de Strasbourg, il travaille sur La Place royale et Amphitryon, puis met en scène La Sophonisbe de Corneille et Andromaque de Racine. Élèves-comédiens, élèves-décorateurs et costumiers, élèves-régisseurs œuvraient ensemble sur ces spectacles longuement répétés. Nommé administrateur de la Comédie-Française, Jean-Pierre Vincent lui confie la mise en scène de Cinna. En 1983, il aborde le lyrique avec La Cenerentola de Rossini. Avec William Christie, il crée Atys à l’Opéra Comique qui marquera la renaissance de l’opéra baroque en France, ce sera le début d’une longue collaboration entre les deux artistes. En 1985, il fonde l’Illustre Théâtre, en souvenir de la troupe de Molière.
Lorsqu’il prend la direction du TNS à Strasbourg, il entreprend de développer le projet artistique engagé par sa compagnie : l’exploration des répertoires classiques et préclassiques tels qu’ils se sont formés au carrefour du mouvement européen des arts et des idées. Significative de son travail, sa mise en scène de Phèdre de Racine privilégie la langue, la musique et l’enracinement historique du texte.
Après Atys, il retrouve l’Opéra-Comique et William Christie pour Médée de Charpentier en mai 1993. « J’ai bénéficié d’une distribution magnifique, à commencer par l’inoubliable Lorraine Hunt » confiait-il. Puis il fait ses début à l’Opéra Garnier, toujours avec William Christie et Hippolyte et Aricie en septembre 1996 avant de revenir à la Comédie-Française, vingt ans après, toujours avec Lully et William Christie, avec L’Amour médecin en 2006 et Le Sicilien en 2005.
« Mon rêve était celui d’un atelier, d’un théâtre-laboratoire dont la tâche eut été d’explorer l’ancien répertoire, de Robert Garnier aux postromantiques. De retourner, comme j’aime le dire, aux poubelles de l’histoire. D’arracher à un injuste oubli non point quelques « curiosités littéraires », mais d’authentiques chefs-d’œuvres dont le seul tort était l’originalité. C’est ce que j’ai voulu faire, non sans peine, avec ma compagnie, avec par exemple Les Galanteries du duc d’Ossonne de Mairet, ou Les Deux Trouvailles de Gallus de Victor Hugo » confiait-il à Emmanuelle et Jérôme Pesqué lors de la sortie de l’ouvrage L’opéra de Paris, la Comédie-Française et l’Opéra-Comique en 2012 (Publications de l’École nationale des chartes).
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