Stéphane Guérin revisite le mythe d’Œdipe à travers une famille désorientée dont le fils de retour d’Afghanistan découvre des parents avachis dans leur canapé. Une pièce riche et portée par un beau quatuor de comédiens.
Le titre est choc, et on ne révèlera pas la fin pour garder le suspens. Stéphane Guérin a écrit un texte magnifiquement ciselé. Un fils (Cyrille Thouvenin) rentre de la guerre en Afghanistan. Il rampe sur le sol, la jambe brisée et ensanglantée. Ses parents (Raphaëline Goupilleau et Yann de Monterno) sont inertes dans leur canapé, les yeux rivés sur une télévision éteinte. Un couple usé par les années. « Je ne peux plus t’encadrer » dit la mère au père. Ils vivent avec un vieux transsexuel (Annick Le Goff). « J’étais un vieil arabe, maintenant je suis une vielle pute ». Ce trans c’est l’oracle, l’observateur éclairé de cette famille en voie de décomposition. L’écriture de Stéphane Guérin décrit très bien ces personnages au bord du gouffre, il mélange subtilement les références aux grandes tragédies grecques et les références à notre société de consommation télévisuelle. Son texte est tendre par moment, caustique très souvent. La mère songe à se couper les bras parce qu’elle transpire sous les bras, et regrette d’avoir mis au monde cet enfant. « Il aurait pu mourir à la naissance on aurait eu du chagrin, mais cela n’aurait pas durer ».
Et puis dans cette réalité sombre, le quatuor bascule dans le cauchemar. La tragédie prend le relai. Le fils va perdre ses illusions. Le fils tue le père, la mère épouse le fils qui tel Œdipe se crève les yeux. La mise en scène subtile de Pierre Notte nous fait glisser doucement dans cette tragédie (avec de magnifiques éclairages d’Hervé Coudert). On est transporté. L’effet était délicat car il y a une vraie rupture dans l’écriture. C’était casse-gueule et c’est réussi.
On retrouve dans cette pièce avec beaucoup de plaisir la magnifique Raphaëline Goupilleau et Cyrille Thouvenin – très convaincant, ainsi qu’Annick Le Goff, étonnante dans ce rôle de trans.
Kalashnikov
de Stéphane Guérin
mise en scène Pierre Notte
avec Raphaëline Goupilleau………. la Mère
Annick Le Goff…………………. le Trans
Yann de Monterno…………….. le Père
Cyrille Thouvenin…………….. l’Enfant
assistante à la mise en scène Claire Fretel
lumière Hervé Coudert
son Guillaume Duguet
costumes Colombe Lauriot Prévost
production Théâtre du Rond-Point, coproduction Théâtre des 13 Vents / Montpellier – CDN Languedoc Roussillon, Le Prisme d’Élancourt – Communauté d’agglomération de Saint-Quentin en Yvelines, production déléguée la compagnie Les gens qui tombent, diffusion Nouvelle Scène, accueilli en résidence de création aux Deux îles / Montbazon
Ce spectacle bénéficie du soutien de l’Association Beaumarchais – SACD.
La pièce a reçu le prix du théâtre 2012 de la Fondation Diane & Lucien Barrière.
Durée: 1h15
15 mai 2013 Le Prisme, Élancourt (78)
22 mai – 24 mai 2013 13 Vents, CDN Montpellier (34)
30 mai – 30 juin, 20h30
dimanche, 15h30, relâche les lundis et le 2 juin
générales de presse : les 30 et 31 mai , les 1er, 4 et 5 juin à 20h30
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