Julie Berès délaisse les écritures contemporaines pour s’attaquer à l’une des dernières pièces d’Ibsen, Petit Eyolf. Avec une distribution haut de gamme et une scénographie étourdissante, cette version est un vrai choc théâtral.
Un corps descend des escaliers, c’est celui du petit Eyolf. On le retrouve plus tard dans sa chambre d’enfant comme dans un aquarium entouré de figurines sorties des univers de Star Trek et de Star Wars. Eyolf petit être handicapé se déplace en cannes, les pieds atrophiés à la suite d’un chute lorsqu’il était bébé. La composition de Valentine Alaqui est exceptionnelle.
Julie Berès met en scène pour la première fois un classique et délaisse sa recherche autour des thèmes contemporains. Mais pas totalement. Car sa version de la pièce d’Ibsen est traitée avec notre regard d’aujourd’hui. L’appartement de la famille d’Eyolf est un duplex cossu et bourgeois. Eyolf ne manque de rien, il n’y a qu’à voir le nombre de jouets dans sa chambre. Il lui manque simplement l’amour d’une mère, formidable Anne-Lise Heimburger déchirante dans ce rôle abrasif de femme qui sombre dans la folie après la mort de son fils.
Quelle écriture que cette pièce retraduite par la romancière Alice Zeniter (prix du Livre Inter 2013) ! On a le cœur serré à chaque instant. Le père Alfred (Gérard Watkins) qui renonce à son travail d’écrivain pour s’occuper de son fils et le couple formé par la demi-sœur d’Afred et l’ingénieur Borgheim (Julie Pilod et Sharif Andoura) sont autant de personnages touchant dans ce drame familial totalement renversant.
La mise en scène de Julie Berès est un petit bijou. Le mot n’est pas trop fort. On a été littéralement scotché de bout en bout. Son approche totalement opératique est renforcé par la présence de la femme aux rats qui fait sont entrée au début de la pièce telle un fantôme livide. Les rats courent bien le long de son manteau blanc. Le rôle est interprété par la mezzo Béatrice Burley. Sa voix fige la salle au moment de la noyade du petit Eyolf. Julie Berès plonge la scène dans de longs noirs angoissants. Les réapparitions du petit Eyolf après sa mort dans sa chambre remplie d’eau ou dans l’aquarium du salon sont autant de moments glaçants qui renforcent encore un peu plus l’intensité dramatique de la destruction de cette famille brisée par le drame.
« Le chagrin rend mauvais et laid » dit le père. « La beauté au théâtre rend plus fort » serait-on tenté de lui répondre. Cette version de la pièce d’Ibsen en tout point magnifique est un véritable coup de cœur.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Petit Eylof d’Ibsen
Mise en scène Julie Berès / Traduction Alice Zeniter / Adaptation Julie Berès, Nicolas Richard et Alice Zeniter / Dramaturgie Olivia Barron / Scénographie Julien Peissel / Création lumières Kelig Le Bars / Création sonore Stéphanie Gibert / Chorégraphie Stéphanie Chêne / Costumes Aurore Thibout
Avec Valentine Alaqui, Anne-Lise Heimburger, Gérard Watkins, Julie Pilod, Béatrice Burley, Sharif Andoura
Production déléguée : L’Espace des arts, scène nationale de Chalon sur Saône
Coproduction : Comédie de Caen – Centre dramatique national de Normandie, L’Espace des arts ‐ scène nationale de Chalon sur Saône, Le Théâtre des Célestins à Lyon, Le Parvis, scène nationale de Tarbes, le Théâtre Gérard Philipe à Champigny, Le Grand Logis, scène conventionnée à Bruz, Le Théâtre du Pays de Morlaix, Compagnie Les Cambrioleurs
Avec le soutien du T2G – CDN de Gennevilliers et de l’Etablissement Public du Parc et de la Grande Halle de la Villette.
Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National
La Compagnie Les Cambrioleurs est conventionnée par le ministère de la culture et de la communication / Drac Bretagne, par la région Bretagne et par la Ville de Brest et soutenue pour ses projets par le Conseil Général du Finistère.
Avec le soutien du Centre National du Théâtre – Aide à la création dramatique – dramaturgies plurielles
Tournée 2015
du lundi 19 au vendredi 23 janvier à la Comédie de Caen – Centre Dramatique National de Normandie (Théâtre des Cordes) – lundi, mardi et vendredi à 20h30, mercredi et jeudi à 19h30
du mercredi 4 au dimanche 15 février au Théâtre de la Ville à Paris (Théâtre des Abbesses) – du mardi au samedi, 20h30, dimanche 15h, relâche le lundi 9 février
les 18 et 19 février (20h) au Centre Dramatique National de Haute-Normandie Petit-Quevilly Mont-Saint-Aignan (Théâtre de la Foudre)
les 26 et 27 février (20h30) au Grand Logis à Bruz
le 5 mars (20h30) au Théâtre du Pays de Morlaix
les 11 et 12 mars (20h) à la Comédie de Valence – Centre Dramatique National
du 17 au 21 mars (20h) au Théâtre des Célestins à Lyon
les 24 et 25 mars (20h) à l’Espace des arts, scène nationale de Chalon sur Saône
les 31 mars et 1er avril (20h30) au Parvis, scène nationale de Tarbes
le 10 avril (20h30) au Théâtre Gérard Philipe à Champigny
le 23 avril (19h30) au Théâtre de la Madeleine à Troyes
le 28 avril (20h30) à Transversales à Verdun
le 12 mai (20h30) au Théâtre Jean Lurçat, scène nationale d’Aubusson
du mardi 19 au vendredi 22 mai au Théâtre National Bordeaux Aquitaine – Centre Dramatique National – mardi et vendredi 20h30, mercredi et jeudi 19h30
le 2 juin 2015 (20h) au Granit, scène nationale de Belfort
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