Chaque chorégraphe porte un Sacre en lui. Celui de Jean-Claude Gallotta est gravé au compas sur un pupitre d’écolier. Adolescent, encore étroitement engoncé dans la blouse grise de son triste pensionnat, le futur chorégraphe écoute le professeur de musique parler d’Igor Stravinsky, des Ballets russes, de Nijinski, du « scandale » à la création (au Théâtre des Champs-Élysées, le 29 mai 1913) et entend l’œuvre pour la première fois sur un vieux tourne-disque Teppaz trop sillonné. Assoupi sur son banc en bois, il « s’enrêve » aussitôt, dit-il aujourd’hui. Les images l’emportent. Il s’en souvient encore. Des figures séraphiques, des ombres sensuelles, des corps tourmentés, des éveils interdits, des émois inexpliqués, des palpitations troublantes.
C’est alors qu’il chorégraphiait la dernière séquence de son spectacle précédent, l’Homme à tête de chou, que lui sont revenus ces souvenirs. Par quelle voie secrète ? Par la silhouette de Marilou traversant la scène comme l’Elue de Stravinsky offerte à la mort ? Par la musique de Serge Gainsbourg nourrie, parfois clandestinement, de références classiques ? Par la vitalité des interprètes dont il lui paraissait indispensable de prolonger la flamme? En guise de réponse, le Sacre s’est alors imposé comme le second volet du diptyque commencé avec l’Homme à tête de chou: mêmes danseurs, même lumière sélénienne, mêmes énergies venues directement de la musique.
En hommage à Tadeusz Kantor, et à sa Classe morte, classe qui est aussi celle de beaucoup d’autres enfances en noir et blanc, celle de Jean Vigo (Zéro de conduite) ou celle de François Truffaut (les 400 coups), la scène est comme passée à l’estompe du souvenir, la musique insolente de Stravinsky et la danse désir des interprètes perçant sous le voile comme des élèves effrontés sous le nuage de craie.
Le Sacre est précédé de deux courts avant-programmes :
I – Tumulte, où le chorégraphe invite danseurs et public à entendre le silence brut de la danse qui précède le déchaînement de la musique.
II – Pour Igor, un solo interprété par Cécile Renard en hommage au compositeur, apostrophé et tutoyé comme un dieu qu’on n’en finit pas de remercier d’avoir cherché sans relâche à instituer par sa musique un ordre entre l’homme et le temps.
Le sacre du printemps
<chorégraphie> Jean-Claude Gallotta
<assistante à la chorégraphie> Mathilde Altaraz
<dramaturgie> Claude-Henri Buffard
<costumes> Jacques Schiotto et Marion Mercier assistée d’Anne Jonathan
<musique> Igor Stravinsky
version dirigée et enregistrée (1960) par Igor Stravinsky avec le Columbia Symphony orchestra
<paysage sonore (I – Tumulte, II – Pour Igor)> Strigall
<lumières> Dominique Zape assisté de Pierre Escande
<décors> Jeanne Dard
<interprète Pour Igor> Cécile Renard
<interprètes Tumulte et Le Sacre du printemps> Alexane Albert, Matthieu Barbin, Agnès Canova, Ximena
Figueroa, Ibrahim Guétissi, Mathieu Heyraud, Georgia Ives, Cécile Renard, Gaetano Vaccaro, Thierry Verger, Stéphane Vitrano, Béatrice Warrand, Thalia Ziliotis
<régie lumière> Frédéric Willhelm
<régie son> Antoine Strippoli
<régie costumes> Marion Mercier, Anne Jonathan (en alternance)
<durée> 1h
<production> Centre chorégraphique national de Grenoble
<coproduction> Théâtre national de Chaillot – Paris
<avec le soutien de> la MC2 : Grenoble
Le Centre chorégraphique national de Grenoble est financé par la Drac Rhône-Alpes / Ministère de la Culture et de la Communication, la Ville de Grenoble, le Conseil Général de l’Isère, la Région Rhône-Alpes et soutenu par l’Institut français pour les tournées internationales.
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