Adama Diop dans Macbeth © Thierry Depange
Il a grandi à Dakar au Sénégal, il s’est formé en France au Conservatoire de Montpellier, puis à Paris. Stéphane Braunschweig lui a confié le rôle-titre de Macbeth à l’Odéon. Repéré dans Les grandes personnes de Marie Ndiaye puis dans 2666 de Julien Gosselin, le comédien connaît une accélération de sa carrière. On ne verra cet été au Festival d’Avignon dans le nouveau spectacle de Julien Gosselin sur l’œuvre de Don de Lillo.
Qu’est ce que vous éprouvez à jouer un tyran ?
C’est agréable car c’est très éloigné de ma nature. Mais c’est un tyran attachant car on a peut-être tous un peu quelque chose de Macbeth en nous, on porte des rêves comme lui. Malheureusement les siens l’amènent à tuer pour être au sommet de l’État. Il y a de la puissance et une peu d’humanité tout de même dans sa quête de la tyrannie. Il n’est pas que machiavélique, il est plus complexe que cela.
Comment faites-vous pour accompagner l’évolution de sa tyrannie ?
Il faut jouer avec cette gradation de la folie. Au début de la pièce il a un peu de douceur en lui et puis il dégringole petit à petit. Il entre dans un cercle infernal.
Est ce que vous vous êtes inspiré de tyrans existants pour l’incarner ?
Non pas vraiment car l’idée était d’oublier tout ce que l’on sait de cette pièce pour repartir sur une nouvelle construction du personnage avec son humanité et ses démons.
La scénographie vous contraint à avoir un pied dans le pouvoir et un pied dans la folie.
Il y a effectivement un dualité entre le côté clinique de cette grande pièce carrelée et les coulisses du pouvoir. On voit comme la soif effrénée de pouvoir passe par la folie meurtrière.
Qu’est ce que cela fait de voir sa tête coupée ?
C’est horrible ! C’est très difficile. Je ne voulais pas la voir au départ, je demandais aux décorateurs de la cacher !
Savez-vous comment Stéphane Braunschweig a pensé à vous le rôle ?
Cela remonte à mon arrivé en France en 2002 lorsque j’étais au Conservatoire de Montpellier, je donnais la réplique à une amie qui a passé le concours du TNS, dirigé alors par Stéphane Braunschweig. Et il m’avait demandé si je voulais le passer. C’est ce qui m’a donné envie de les passer et j’ai réussi le concours du Conservatoire de Paris. Et puis après 2666 de Julien Gosselin à Avignon en 2016, il a souhaité que l’on fasse un projet ensemble, et me voici en Macbeth.
Quand vous étiez adolescent à Dakar, est ce que vous vous imaginiez un jour sur la scène d’un grand théâtre à Paris ?
Absolument pas car j’avais d’autres envies au départ, ce n’était pas un rêve. Mais c’est après mon arrivée à Montpellier que j’ai vraiment pris goût au théâtre.
Les scènes françaises s’ouvrent enfin à des acteurs sans distinction de couleur de peau. Avez-vous été sensible à la proposition de Stéphane Braunschweig ?
Nos voisins anglais ne se posent pas ces questions. Ils sont plus en avance qu’en France. Mais avec Stéphane, on n’a jamais parlé de cela. Il m’a juste proposé le rôle car il considérait que mon énergie collée au personnage. Je suis très content d’être reconnu avant tout comme acteur, sans parler de la question raciale ou de ma couleur de peau. Les choses s’ouvrent et j’espère que les plateaux vont s’ouvrir à tout type de comédiens, avec des couleurs, des accents différents et des corps différents.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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