Grande émotion lorsque l’ensemble de l’équipe artistique et technique du Prince de Hombourg s’est avancée avant le début du spectacle pour ce lancer dans un plaidoyer pour la culture et contre le MEDEF. Après la gréve du premier soir, le 68ème Festival d’Avignon est désormais sur orbite. La pièce onirique de Kleist résonne de nouveau dans la Cour. Le spectacle manque malheureusement de flamboyance malgré un excellent Xavier Gallais.
Le petit carré rouge accroché aux costumes, les comédiens et les techniciens du Prince de Hombourg vont face au public. Ils sont tous là, Luc-Antoine Diguero, Anne Alvaro et Giorgio Barberio Corsetti. « Merci pour toutes ces années de destruction sociale, votre projet de société ne sera jamais le nôtre. Messieurs du MEDEF si vous ne nous aimez pas, sachez qu’on ne vous aime pas non plus ! » L’action est forte et a embarqué l’adhésion totale du public. L’émotion a gagné l’ensemble de la Cour. Le festival militant voulu par les techniciens et les artistes vient de démarrer.
Le Prince de Hombourg arrive sur scène en passant sous les trappes du plateau avec ses gardes. Ils sont nus et habillent le Prince endormi, ce prince rêveur, guerrier malgré lui qui n’a que l’amour dans la tête. Xavier Gallais empoigne la scène avec une aisance impressionnante. Il est écorché vif. Son jeu magnétise l’espace. La pièce créée en France en 1951 pour Gérard Philipe est devenue un mythe. « Quand on entend Gérard Philipe c’est magnifique de lyrisme et de chant, explique Xavier Gallais. Mais aujourd’hui les spectateurs n’ont plus l’oreille pour cela. C’est compliqué car nous sommes dans un lieu qui demande à avoir des sentiments forts et aujourd’hui le jeu est plus psychologique. Il faut concilier le chant nécessaire et le jeu de la modernité actuelle. » Xavier Gallais est parfait, emporté par le lyrisme du rôle, sans trop en faire, comme le reste de la troupe. Luc-Antoine Diquéro en Prince Électeur, Anne Alvaro en Électrice et Éléonore Joncquez en Nathalie complètent à merveille une belle distribution. Et pourtant on n’a pas été totalement transporté par les rêveries de Hombourg.
Giorgio Barberio Corsetti utilise bien l’espace de la Cour, les fenêtres sont ouvertes avec des avancées pour permettre aux comédiens de voler dans l’espace, des vidéos sont projetées sur le mur de fond, et trois praticables roulent en permanence sur le plateau. C’est simple mais parfois sec et aride, à l’image de ce texte de Kleist sur le sacrifice militaire. Jean Vilar aimait ce romantisme allemand qu’il ne trouvait pas dans les pièces françaises. Au sortir de la guerre de 45, ce poème de Kleist avait sans doute une résonance particulière. Aujourd’hui on a bien du mal à se passionner pour cette pièce de guerre. Il y a des images qui resteront cependant dans l’imaginaire d’Avignon, lorsque Hombourg enfourche son cheval, Xavier Gallais est à califourchon sur un praticable qui s’est levé, et l’image de son cheval est projetée sur le mur. La scène finale fait de Hombourg une marionnette. Xavier Gallais est harnaché de câbles et se fait manipuler dans les airs par ses camarades. On aura tant aimé s’enflammer pour ce Prince, mais la flamboyance n’est pas au totalement au rendez-vous. L’essentiel est cependant là, le Festival militant a bien débuté. Il promet une édition historique.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
LE PRINCE DE HOMBOURG DE HEINRICH VON KLEIST
GIORGIO BARBERIO CORSETTI
Création 2014
Avec Jean Alibert, Anne Alvaro, Clément Bresson, Anthony Devaux, Luc-Antoine Diquéro, Xavier Gallais, Hervé Guerrisi, Éléonore Joncquez, Maximin Marchand, Geoffrey Perrin, Julien Roy, Gonzague Van Bervesseles
Mise en scène Giorgio Barberio Corsetti / Scénographie Giorgio Barberio Corsetti
et Massimo Troncanetti / Musique Gianfranco Tedeschi / Vidéo Igor Renzetti
Images Lorenzo Bruno et Alessandra Solimene / Lumière Marco Giusti
Costumes Moïra Douguet / Assistanat à la mise en scène Raquel Silva
Production Festival d’Avignon
Coproduction France Télévisions, Les Gémeaux Scène nationale de Sceaux, Théâtre de Liège, Théâtre Liberté Toulon / Avec l’aide du FIJAD, de la SPEDIDAM / Avec le soutien de l’Adami
Durée estimée 2h30
Avignon 2014 – Cour d’honneur
4 5 6 8 9 10 11
12 13 JUIL
À 22H
Du 5 au 8 et du 10 au 14 février aux Gémeaux à Sceaux
Les 19 et 20 février au Théâtre Liberté de Toulon
Du 25 au 28 février et du 3 au 8 mars au TNP à Villeurbanne
Le 15 mars et du 17 a 20 mars au Théâtre de Liège
Le Prince de Hombourg de Heinrich von Kleist dans la traduction de Ruth Orthmann et Eloi Recoing, jouée au Festival d’Avignon est publié aux éditions Actes Sud-Papiers.
Le théâtre, ça n’empêche pas de LIRE !!
les textes existent en livres !