« Bartabas a inventé ce qui n’existait pas », écrivait Jérôme Garcin en 2006 à propos du maître du théâtre équestre. Ex-Anima, présenté comme son « ultime spectacle » reprend sa tournée fin septembre à Caen, avant de revenir à Aubervilliers à partir du 9 novembre 2018. Après Le Requiem de Mozart, Bartabas va revisiter pour l’Académie équestre de Versailles sa célèbre chorégraphie du Sacre du Printemps et de la Symphonie de Psaumes de Stravinsky à la Seine Musicale à partir du 21 septembre.
En 1977, Clément Marty (nom de naissance de Bartabas) se fait remarquer avec son spectacle L’Alchimiste dans le cadre du OFF du festival d’Avignon. Il cofonde alors le Théâtre Emporté et le Cirque Aligre, mais pour celui qui souhaite « créer un mythe » il ne s’agit pas simplement de faire du théâtre ni même du cirque, mais bel et bien du théâtre équestre. Un genre qui, en France, n’a jamais eu l’aura qu’il a pu avoir ailleurs en Europe, notamment en Espagne ou en Angleterre.
Zingaro né en 1985, empruntant son nom du Frison de Bartabas immortalisé par Ernest Pignon-Ernest en sombre penseur. Un cheval qui meurt la même année après avoir accompagné le cavalier dans ses créations pendant près de 15 ans. Chez Zingaro, les chevaux sont choisis comme des acteurs, leur personnalité et leurs émotions sont au cœur du processus de création depuis toujours mais à la différence de l’homme, il faut vieillir avec, on ne peut pas renouveler le casting sur chaque projet et c’est eux qui dictent le jeu.
Depuis, la troupe de Bartabas qui revendique des influences tsiganes, italiennes ou encore roumaines, est devenue Théâtre équestre et musical Zingaro et elle parcourt le monde. Alliant théâtre, cirque, dressage, musique et danse, l’équipe a créé un nouveau genre et a bousculé autant le monde équestre que le monde théâtral. Avec Zingaro, Bartabas a imaginé près d’une quinzaine de spectacles depuis les années 70 dont Calacas, Elégies : On achève bien les anges et Ex Anima sur ces seules cinq dernières années. Installé à Aubervilliers, le théâtre équestre compte une trentaine de chevaux et n’à aucun égal en France.
Si Ex Anima est son dernier spectacle, Bartabas ne disparait pas pour autant bringuebalé par un cheval vers le couchant. Le cavalier reste à la tête de l’Académie du spectacle équestre de Versailles qu’il a fondée en 2003. L’originalité de cette école – qui n’en est pas une – vient du fait qu’elle associe des arts de la danse et de l’escrime au dressage de haute école. Depuis sa fondation, Bartabas y a créé une douzaine de spectacles, dont We Were Horses avec la collaboration de Carolyn Carlson en 2011 ou encore Requiem en 2017, et enfin La voie de l’écuyer, spectacle annuel de l’académie sans cesse réinventé. Le monde équestre français est donc marqué par celui qui n’a jamais été un homme de cirque, aujourd’hui certains de ses élèves écuyers figurent au rang des meilleurs cavaliers de dressage en Europe.
Pour beaucoup, Bartabas restera néanmoins une énigme humaine, le dernier film à lui avoir été consacré s’intitule d’ailleurs Le Caravage, une œuvre intimiste d’Alain Cavalier. S’il s’agit dans les arts d’un peintre qui ne cesse de fasciner, Caravage est aussi le nom du cheval que l’écuyer travaille chaque matin. Pour celui que l’on range désormais en chef de fil du théâtre équestre et dont l’univers onirique touche à sa fin, il s’agit depuis toujours de nourrir autant le cheval que le mythe qui en découle.
Hadrien VOLLE – www.sceneweb.fr
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