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HASH, le piège théâtral de Bashar Murkus

A voir, Les critiques, Paris, Théâtre

photo Piero Tauro

Avec HASH interprété par Henry Andraves, l’auteur et metteur en scène palestinien Bashar Murkus suscite un vaste faisceau de questions. À commencer par celle-ci : qui est cet énorme personnage qui, tant bien que mal, s’agite sur le plateau ? Étrange, absurde, l’intéressé nous laissera le soin de répondre.

En juillet dernier, au Festival d’Avignon, c’est en inspecteur de police enfermé avec le coupable d’un attentat terroriste que nous découvrions le comédien Henry Andraves, bien connu dans sa Palestine natale pour ses activités théâtrales et cinématographiques. Intitulée المتحف – Le Musée, cette pièce était la première du Théâtre Kashabi, cofondé en 2015 dans la ville palestinienne d’Haïfa par l’auteur et metteur en scène Bashar Murkus et par Henry Andraves lui-même – à être invitée en France. L’acteur incarnait un policier aussi ambigu, à la morale aussi douteuse que celui qu’il s’apprêtait à mettre à mort. Comme lui, il participait d’une « banalité du Mal » à laquelle rien ni personne ne semblait pouvoir échapper. On le retrouve aujourd’hui au Théâtre de la Ville, dans une nouvelle mise en scène de Bashar Murkus au nom énigmatique, HASH. Méconnaissable, il est le noyau d’un univers absurde qui s’offre à l’interprétation de chacun.

L’apparition de Henry Andraves sur une scène envahie par des bocaux transparents, où trônent aussi un ordinateur portable ainsi qu’un régime de bananes, fait image. Vêtu d’un pantalon à bretelles et d’une chemise hors du temps qui lui donnent la stature d’un sumo, l’artiste installe d’emblée une atmosphère kafkaïenne : à le voir souffler, grimacer, à le regarder peiner au moindre geste, on pense en effet à La Métamorphose. Bien que d’apparence plus humaine que Gregor Samsa, le héros du roman de Kafka transformé en « un monstrueux insecte », l’anonyme de HASH partage avec lui bien des singularités, bien des handicaps. Comme lui, il est enfermé dans une pièce dont il ne veut pas sortir. Sa différence, imagine-t-on, lui fait redouter des sévices. Contrairement à l’homme-insecte, l’homme-bibendum ne formule jamais explicitement ses craintes : il laisse à l’image en mouvement qu’il incarne le soin de livrer toute seule sa vérité. Laquelle dépend largement de celui qui la contemple.

L’obèse protagoniste de HASH a beau se distinguer en presque tout du policier de المتحف – Le Musée, il le rejoint en un point que l’on devine essentiel dans le travail de Bashar Murkus : il échappe à tout critère moral et résiste à toute tentative d’analyse psychologique. Aussi grotesque que tragique – sans doute tragique à force d’être grotesque –, enfantin autant qu’adulte, le reclus est clairement le fruit d’un refus de s’inscrire dans les esthétiques théâtrales dominantes. Par sa monstruosité bon enfant, par le répertoire de petits rituels bizarres qu’il déploie pour lui-même sans ordre ni logique apparente – à part peut-être celle qui consiste à retarder le moment de dévorer les bananes, peu indiquées dans le cadre des restrictions alimentaires qu’il semble vouloir s’imposer –, le bonhomme affiche un anticonformisme d’autant plus intéressant qu’il est paradoxal. Il semble en effet à peu près impossible, lorsqu’on y pense, d’incarner une quelconque forme de liberté tout en restant cloîtré dans un espace minuscule, dans un piège. Créé avant le Covid, dont il peut aujourd’hui apparaître comme une métaphore, HASH laisse entendre que c’est possible. Périlleux, mais possible.

Plus encore que sa pièce présentée au Festival d’Avignon, qui en abordant un sujet précis, le terrorisme, soulevait des questions plus larges, HASH est une fable susceptible de résonner dans n’importe quel contexte social et politique. Si l’on peut voir dans la solitude et dans la peur du gros héros un parallèle avec la situation de la Palestine, les menaces qui le tiennent à l’écart du monde peuvent être de natures très différentes. La langue du spectacle, qui se détraque en même temps que le corps amplifié de Henry Andraves, n’est plus seulement arabe. Mêlée à toutes sortes de gémissements, accompagnée de mimiques proches du clown, elle est la langue de tous ceux qui subissent quelque chose et qui s’en défendent par l’imaginaire. On n’y comprend pas tout, et c’est tant mieux. On creuse, on transpire avec le héros. En attendant les bananes. En attendant.

Anaïs Heluin – www.sceneweb.fr

Hash

TEXTES, DIRECTION & DRAMATURGIE Bashar Murkus

SCÉNOGRAPHIE Majdala Khoury VIDÉO Nihad Awidat LUMIERES Moody Kablawi CHORÉGRAPHIE Samaa Wakim

AVEC Henry Andrawes


Espace Cardin du Théâtre de la Ville

Du 23 au 27 Novembre 2021

26 novembre 2021/par Anaïs Heluin
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