Le 40e festival des Francophonies se déroule jusqu’au 30 septembre à Limoges et en Nouvelle Aquitaine. Il est le point de rencontre de tous les artistes de la francophonie, qui viennent du Québec, du Luxembourg, et de plusieurs pays du continent africain. Il se déroule alors que les relations diplomatiques sont tendues entre la France et le Mali, le Niger et le Burkina Faso. La préparation a été un peu bouleversée par le mail du Quai d’Orsay, envoyé la semaine dernière, aux acteurs culturels leur demandant de « suspendre, jusqu’à nouvel ordre, toute coopération » avec ses pays. Rencontre le directeur du festival, le metteur en scène Hassane Kassi Kouyaté.
Quelle a été votre réaction la semaine dernière quand vous avez reçu ce mail ?
Hassane Kassi Kouyaté : Je n’ai pas les tenants et les aboutissants de la diplomatie. Ce que je peux dire c’est que l’on est tous otages des décisions politiques. Elles nous dépassent. Je les subis en tant qu’organisateur et en tant qu’artiste aussi. J’imagine que pour les artistes, c’est un crève cœur de ne pas pouvoir venir présenter un spectacle en France.
Est ce que les tensions au Mali, au Niger et au Burkina Faso pèsent sur la francophonie ?
Oui, ça pèse sur la francophonie et ça pèse sur notre travail puisque les décisions politiques réagissent sur nos activités. Et quand on n’a pas de visa pour des artistes qu’on a programmés, bien sûr que ça met en cause une partie de notre travail.
Pensez-vous que les artistes dans ces pays ont du courage de continuer à défendre la francophonie ?
Je ne pense même pas qu’il s’agisse de courage. C’est vital pour eux de travailler avec cette langue. C’est une nécessité. La France a besoin d’entendre dire le monde autrement et surtout au théâtre. Car le théâtre français est cloisonné, il a été confiné. Il a besoin de ce décloisonnement, de cet oxygène. C’est une sorte d’ouverture, de lumière et de pensée nouvelle autour du théâtre.
Est-ce que cela est plus difficile pour eux avec le sentiment de rejet de la France ?
Je ne vois pas de rejet de la France. Ce que j’entends, c’est le rejet d’une certaine France. On ne peut pas rejeter la France, on a des relations séculaires. Et puis cette langue, nous unit. C’est une langue de partage des cultures.
Est ce que la francophonie en Afrique a un avenir ?
Oh oui et je pense même que l’avenir de la francophonie, c’est l’Afrique
Pour votre création cette année, vous avez choisi Zoé, une pièce d’Olivier Choinière. Elle a été répétée et est créée à la Scène nationale d’Aubusson avec Patrick Le Mauff et Adélaïde Bigot. Elle raconte un peu le malaise de la société d’aujourd’hui ?
C’est une pièce québécoise. Zoé, une étudiante exige d’avoir des cours avec son professeur de philosophie, alors que son université est en grève. Quels sont nos droits aujourd’hui, quels sont nos devoirs par rapport à la majorité ? Ce sont des questions essentielles pour moi. On est en phase avec tous les combats de la société, des gilets jaunes à celui autour de la retraite. Et je me pose cette question. Qu’est ce que je prépare pour ma jeunesse et mes enfants ? Olivier Choinière explique dans sa pièce qu’on a besoin de toutes les générations, que les générations ne peuvent que s’éclairer mutuellement. Personne n’a raison, personne n’a tort. Chacun possède son point de vue. Et pour moi, ça me pousse à aller vers ce que je souhaite : un dialogue pour éclairer notre chemin et notre monde.
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