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Habibitch, queen décoloniale

A voir, Avignon, Best Off, Les critiques, Théâtre
Habibitch
Habibitch

Photo Camille Lenain

Avec Décoloniser le dancefloor, Habibitch s’attelle à décoloniser les imaginaires. L’artiste joue de l’impertinence et interpelle à travers un regard autobiographique sur les impensés racistes, classistes, sexistes qui parsèment nos vies. Sur les dancefloors, comme ailleurs.

C’est en 2017 qu’Habibitch – génial nom de scène qui, par sa contraction de « habibi » (« mon chéri » en arabe) et « bitch » (« salope »), signale déjà le goût de la rupture inventive et de la disruption de l’artiste – crée son solo Décoloniser le dancefloor. Depuis, l’artiste non-binaire franco-algérienne a présenté cette conférence dans une multitude – et amplitude par leur type – de lieux, de festivals décoloniaux en événements féministes, d’espaces militants en théâtres plus institutionnels. Il n’était que justice qu’Habibitch passe enfin par Avignon. C’est chose faite, et plutôt deux fois qu’une : car, outre la présentation de sa conférence performée, elle a joué lors de l’un des deux « Rainbow Day & Night » – temps fort de programmation d’artistes travaillant des questions LGBTQIA+ –, Back/Bridge. Une étape de travail de sa prochaine création pour laquelle, partageant le plateau avec deux musiciens, elle explore la manifestation des violences coloniales chez celles et ceux qui les subissent.

Mais reprenons. Annoncé comme une conférence, Décoloniser le dancefloor en est bel et bien une. Pour autant, ce n’est pas (uniquement) une intervention calibrée et policée, suivant scrupuleusement un protocole et épousant un vocable de bon aloi. À l’image de la personnalité d’Habibitch – comme du propos déployé –, l’intervention va jouer des ruptures et s’ancrer dans des expériences et anecdotes personnelles. De la conférence traditionnelle, il y a bel et bien l’architecture (en plusieurs parties) et le dispositif, soit un PowerPoint – aux couleurs du drapeau de l’Algérie ainsi qu’elle le souligne – et une table à cour accueillant son ordinateur. En guise d’introduction, l’artiste se présente en détail, choix qui signale, là aussi, le principe d’écriture. Et le fait qu’Habibitch précise notamment être danseuse, chorégraphe, autrice, performeuse et chercheuse en sociologie pose la démarche sous-tendant son travail, soit de produire une création située. À l’énumération de ces multiples casquettes, l’on se dit qu’elle en omet néanmoins une, celle de queen. Car autant par la composition d’une partie du public – entièrement acquis à sa cause, et épousant assez naturellement celles qu’elle défend –, par sa verve et son sens de la répartie, que par son jeu entre défiance, hyper-assurance et tacles réguliers, Habibitch se pose en queen, s’affirme en queen, se revendique en queen et agit telle une queen. Au risque, parfois, de la position de surplomb un brin condescendante par son côté professoral.

Néanmoins, l’artiste brille, aussi, par une position de hâbleuse féroce, de harangueuse sublime au look décontracté. Évoquant son propre parcours, de sa naissance en Algérie à son enfance en Vendée – terre raciste s’il en est –, de ses études à Sciences Po à son passage dans les milieux radicaux, de son lesbianisme à son implication dans le champ des ballrooms, et jusqu’à sa colère quant aux génocides en cours, celui du peuple palestinien en tête, elle articule une analyse méthodique du travail de décolonisation à mener. Et si le dancefloor est bien au cœur du propos, le sujet excède également cette seule question. Il est ainsi en permanence relié à une historiographie succincte et efficace de certains mouvements de création, comme de son parcours personnel. Du privilège blanc à l’intersectionnalité, de l’universalisme républicain à l’obsession islamophobe du voile, de la transphobie aux impensés racistes et classistes des féministes blanches, les déploiements sont nombreux.

Habibitch joue d’ailleurs volontiers de la rupture, en ponctuant son propos de petites digressions, de questions à la salle, d’évocations d’anecdotes – sur l’astrologie, par exemple – et de brèves chorégraphies. Bien structurée et didactique, cette conférence est également truffée (à l’image de son nom) de quelques néologismes ou formules imagées. L’ensemble, nourri de son matérialisme politique, esquisse les bases du voguing, du rap et d’autres mouvements, en rendant le propos toujours éminemment concret par la position d’auto-théorie. La seule réserve notable porte sur cette façon de surjouer l’assurance – comme, par exemple, en promettant à plusieurs reprises l’efficacité performative de la conférence (apte à transformer un soc-dem’ en gauchiste). Si l’on pressent que cela fait partie de la construction du personnage de queen, ce choix dessine néanmoins un rapport éminemment vertical et didactique à l’auditoire. Une position pour le moins paradoxale au vu de son regard affûté de déconstruction des systèmes d’oppression. L’on mettra ce choix sur le compte des contradictions qu’elle-même énonce et qui rappelle que personne n’est à l’abri des paradoxes, mais que cela n’empêche pas, comme elle le mène elle-même, la tentative d’auto-analyse.

caroline châtelet – www.sceneweb.fr

Décoloniser le dancefloor
Texte, mise en scène, interprétation Habibitch

Production Sorcières&Cie

Durée : 1h30

La Manufacture, dans le cadre du Festival Off d’Avignon
du 14 au 22 juillet 2025, à 19h15 (relâche le 17)

21 juillet 2025/par Caroline Chatelet
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