On a découvert Thomas Piasecki en 2012 dans le Off à Présence Pasteur. Il présentait Sisyphski un hommage à ses ancêtres mineurs. Sa nouvelle création Ferien confirme ce que l’on pensait de lui. C’est un sacré « écrivain de plateau ».
Dans le théâtre de la Verrière derrière la rue Nationale à Lille, Thomas Piasecki crée chez Dominique Sarrazin, une très belle histoire d’aujourd’hui, une histoire sociale et politique. Hélène est atteinte d’une maladie incurable. Elle convoque le temps d’un week-end dans un gîte dans la Forêt-Noire les hommes de sa vie. Ses deux amants, Pierre et Paul, et son fils, Jacques. Hélène, Pierre et Paul se sont aimés et ont vécu ensemble. Thomas Piasecki revisite à sa manière « Jules et Jim » avec ce trio amoureux du 21ème siècle. L’idée de cette pièce lui est venue pendant le débat sur le mariage homosexuel.
Le style narratif est bien maîtrisé par Thomas Piasecki. L’histoire est racontée à travers les quatre personnages sur scène mais aussi à travers la voix de Margaux, la petite amie de Jacques qui est venue chercher cette famille à l’issue du week-end. Il utilise la vidéo comme l’un des personnages de la pièce. Elle sert de décor naturaliste. Les images de la forêt d’Ohlain dans le Pas-de-Calais filmée par Jérémie Bernaert sont magnifiques. La vidéo permet aussi de retrouver ce trio amoureux lors des réunions de famille à la Pentecôte ou à Noël. Tout le monde est attablé comme dans La Cène de Léonard de Vinci. Ces réunions sont l’occasion de discussions musclées sur la politique. La pièce traverse les années 80 et 90. Ce sont les années Mitterrand, le désespoir de la gauche et la montée du Front National.
Cette pièce est totalement nostalgique et poignante. On le doit notamment aux acteurs et à la formidable Murielle Colvez entourée de ses trois hommes, Dominique Langlais, Damien Olivier, Sylvain Pottiez. On le doit aussi à la maîtrise parfaite de la mise en scène. Tout s’imbrique admirablement dans cette histoire d’amour avec ces « originaux » comme le dira à un moment le fils Jacques. Comme c’était le cas dans Sisyphski le sol est un élément important de la scénographie. « Tout part du sol » dit Thomas Piasecki. Il délimite les contours de la maison, l’allée du jardin et la forêt. Cette histoire émouvante raconte beaucoup de choses sur notre époque, sans porter de jugement. On se laisse porter par l’émotion qui se dégage des personnages, par la beauté des images et le style épuré de la mise en scène.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Ferien # (ou comment j’ai décidé de finir en beauté)
Écriture et mise en scène Thomas Piasecki, avec Murielle Colvez, Dominique Langlais, Damien Olivier, Sylvain Pottiez, et la voix de Victoria Quesnel, création vidéo Jérémie Bernaert, création musicale et bande son Martin Hennart et Maxence Vandevelde, lumières Manuel Bertrand, régie générale Olivier Floury.
Durée: 1h40
Le Théâtre de la Verrière à Lille
Du 3 au 13 décembre 2014
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