Point culminant du Portrait que consacre le festival d’automne à la chorégraphe brésilienne, la création d’Encantado – donnée à Chaillot puis au Centquatre à Paris et début 2022 en Nouvelle-Aquitaine grâce à 8 Scènes nationales* – s’offre comme une éblouissante fête chamarrée et débridée qui galvanise aussi bien les sens que l’esprit.
Le thème de l’élan, du soulèvement, à la fois politique et poétique, traverse avec une généreuse organicité toute l’œuvre de la chorégraphe brésilienne dont la troupe est installée dans une immense favela à Rio de Janeiro. Si son dernier opus, Furia, joué depuis 2018, imposait de forts accents insurrectionnels, la dimension militante du travail de Lia Rodrigues n’a évidemment pas disparu dans Encantado, une nouvelle pièce élaborée dans le contexte de la crise sanitaire qui laisse place à une tonalité moins rageuse et plus joyeuse, et même irrévérencieuse, pour continuer à lutter, résister.
Au lointain du plateau vide baigné de silence et d’obscurité, des danseurs déroulent lentement, délicatement, quantité de morceaux de tissus variés et colorés unis les uns aux autres pour recouvrir la scène d’un tapis géant qui évoque la magie et les sortilèges des mille et une nuits. L’univers chatoyant qui s’installe ne peut que rendre propice l’enchantement annoncé par le titre du spectacle, Encantado, inspiré et guidé par de bons génies issus de cosmogonies africaines et amérindiennes.
La chorégraphe place toujours au centre de son geste un dénuement physique et matériel totalement assumé. Avec l’engagement solide et l’énergie vitale qui irriguent chacune de ses pièces, Lia Rodrigues n’a de cesse de parvenir malicieusement, audacieusement, à transcender et sublimer cette apparente pauvreté délibérée. La précarité est ici le point de départ d’une grande parade festive qui emporte onze danseurs dans un vertige étourdissant. Nus, les interprètes s’emparent de plein d’étoffes de fortune, s’enroulent plus ou moins partiellement le corps ou la tête, et sous la force d’une géniale alchimie chorégraphique, transforment leur frusques en de sublimes apparats toujours changeants, tels une cape, une coiffe, un jupon, une toge. Le geste est suave et lascif puis de plus en plus affranchi, volontiers amusé et outré.
Une heure durant, s’inventent et se dessinent instantanément d’étonnantes figures composites, insolites, parfois chimériques. Tour à tour sultans ou mendiants, vêtus de leurs inénarrables défroques carnavalesques, les danseurs et danseuses se livrent à une sorte de grand défilé particulièrement inspiré.
Sur une entêtante bande-son qui fait écho aux mouvements de protestation de populations indigènes menacées, les grimaces laissent finalement place aux sourires et l’oppression cède le pas à la liesse voire la transe. A partir de ces tissus virevoltants et des corps exultants, Lia Rodrigues orchestre un apparent désordre parfaitement maîtrisé et donne à voir un concentré de liberté et de créativité. Joyeuse, sensuelle, rebelle, sa danse se fait d’une théâtralité formidablement débridée. Elle célèbre la force du collectif, le pouvoir de l’imaginaire et affirme une belle diversité, toujours empreinte de combativité.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
Encantado de Lia Rodrigues
Dansé et créé en étroite collaboration avec 11 danseurs
Assistante à la création, Amalia Lima
Dramaturgie, Silvia Soter
Collaboration artistique et images, Sammi Landweer
Création lumières, Nicolas Boudier
Le Festival d’Automne à Paris est producteur délégué de la tournée française de ce spectacle. Chaillot – Théâtre national de la Danse, Le CENTQUATRE-PARIS et le Festival d’Automne à Paris sont coproducteurs de ce spectacle.
Coproduction : Chaillot – Théâtre National de la Danse – Paris, Le CENTQUATRE – Paris/ Festival d’Automne à Paris / Scène nationale Carré-Colonnes, Bordeaux Métropole / Le TAP – Théâtre Auditorium de Poitiers / Scène nationale du Sud-Aquitain / La Coursive, Scène nationale La Rochelle / L’Empreinte, Scène nationale Brive -Tulle / Théâtre d’Angoulême Scène Nationale / Le Moulin du Roc, Scène nationale à Niort / La Scène Nationale d’Aubusson, Le Kunstenfestivaldesarts – Bruxelles, Theaterfestival – Basel, HAU Hebbel am Ufer – Berlin, Festival Oriente Occidente – Roveretto, Theater Freiburg, l’OARA – Office Artistique de la Région Nouvelle-Aquitaine – Bordeaux et Lia Rodrigues Companhia de Danças avec le soutien de Redes da Maré e Centro de Artes da Maré ainsi que des partenaires du FONDOC (Occitanie)* Le théâtre d’Angoulême, le Théâtre Jean Lurçat, Scène nationale d’Aubusson, la Scène nationale du Sud-Aquitain Bayonne-Anglet-Boucau-Saint-Jean-de-Luz, la Scène nationale Carré-Colonnes Saint-Médard-en-Jalles / Blanquefort, l’Empreinte, Scène nationale Brive-Tulle, le Moulin du Roc, Scène nationale à Niort, le TAP – Théâtre Auditorium de Poitiers, La Coursive, Scène nationale de La Rochelle et la compagnie de danse de Lia Rodrigues.
Durée : 1h
du 1er au 8 décembre 2021 premières Chaillot – Théâtre national de la danse, Paris
dans le cadre du Festival d’Automne à Paris
du 10 au 14 décembre 2021 / 104 CENTQUATRE, Paris
13 + 14 janvier 2022 à Brive
25 au 28 janvier 2022 à Bayonne avec Fúria
31 janvier 2022 à Pau
2 février 2022 à Saint-Médard
5 + 6 février 2022 à Niort
8 au 10 février 2022 à Poitiers avec Fúria
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