
photo Christophe Martin
Mathilde Monnier est de retour sur le devant de la scène avec un projet ambitieux, El Baile, conçu avec l’écrivain argentin Alan Pauls. Ils revisitent la pièce mythique Le Bal, de Jean-Claude Penchenat (1980) devenue par la suite un film grâce à Ettore Scola. Une histoire dansée de l’Argentine contemporaine.
Comme dans les concerts rock, une bande son diffuse des titres pop avant que les douze danseurs n’arrivent sur scène, venant du public, de cour et de jardin. Ils se font face, assis sur des chaises, se déhanchent, poussent la chansonnette, grimacent, sifflent. Des tentatives pour emmener le public à travers ce voyage en Argentine. On aurait aimé être emporté par ces interprètes sélectionnés par Mathilde Monnier à Buenos Aires, mais le début du spectacle patine un peu. Ça manque de flamme, même pendant le strip-tease – il ne faudrait pourtant pas grand-chose pour être emporté par cette vague latine.
Mathilde Monnier ouvre des portes, lance des pistes, sans toujours les creuser. Par petites touches on parvient cependant à recoller les morceaux de la dramaturgie de l’écrivain Alan Pauls. Il faut picorer dans ce spectacle ou la musique est prépondérante. La bande son éclectique concoctée par Sergio Pujol donne à entendre les richesses musicales de l’Argentine. De la samba au tango en passant par des groupes pop. Lorsque les danseurs sont coincés dans une cage, on imagine qu’ils se trémoussent sur un tube diffusé dans la moiteur des dance floor de Buenos Aires. Ils agacent d’ailleurs un footballeur qui shoote dans la cage pour les faire taire.
La musique, le football, la violence : la société argentine défile sur scène. Les danseurs sont pris pour cible par des tireurs. Les femmes sont violentées par leur mari. Les militaires torturent. Dans un atelier fantôme transformé en salle d’interrogatoire, les têtes des danseurs sont posées sur des tables. On image leur visage face à des meules ou des scies circulaires au temps de la dictature lorsque les généraux bâillonnaient et violentaient le monde de culture – et au delà tout un peuple. Moment le plus intense de ce Baile.
Le tango n’est pas oublié. Mathilde Monnier le transforme en chenille. Les douze danseurs se tiennent par l’épaule, guidés par un couple donnant le tempo. Image fugace, comme beaucoup de moments de ce spectacle qui peine à trouver son rythme. Pour le final, les danseurs quittent la scène en sortant vers le public, foulards à la main, une invitation à faire la fête, une invitation à poursuivre le sillon creusé par ces douze interprètes d’exception dont on aurait souhaité qu’ils soient un peu mieux mise en valeur.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
El Baile
Mathilde Monnier & Alan Pauls
Très librement inspiré du spectacle Le Bal sur une idée originale et une mise en scène de Jean-Claude Penchenat, création collective du Théâtre du Campagnol
CONCEPTION ET CHORÉGRAPHIE MATHILDE MONNIER ET ALAN PAULS. DRAMATURGIE VÉRONIQUE TIMSIT. SCENOGRAPHIE ET COSTUMES ANNIE TOLLETER. CREATION LUMIERE ERIC WURTZ, CREATION SON OLIVIER RENOUF. CONSEIL MUSICAL SERGIO PUJOL. ASSISTANTE CHOREGRAPHIQUE MARIE BARDET. COLLABORATION ARTISTIQUE ANNE FONTANESI. PRODUCTION ET COLLABORATION ARTISTIQUE NICOLAS ROUX.
AVEC 12 INTERPRÈTES : MARTIN GIL, LUCAS LAGOMARSINO, SAMANTA LEDER, PABLO LUGONES, ARI LUTZKLER, CARMEN PEREIRO NUMER, VALERIA POLORENA, LUCIA GARCIA PULLES, CELIA ARGÜELLO RENA, DELFINA THIEL, FLORENCIA VECINO, DANIEL WENDLER.
AVEC LA BIENVEILLANCE DE JEAN-FRANÇOIS GUEGANNO. ET NOS REMERCIEMENTS A YANN LORVO, HELENE KELMACHTER, LUCIE HAGUENAUER, DIANA THEOCHARIDIS, EVELYNE LOEW, NATALIA UCCELLO, CECILIA KUSKA.
production
PRODUCTION LE QUAI CENTRE DRAMATIQUE NATIONAL ANGERS PAYS DE LA LOIRE.
EN COPRODUCTION AVEC LE THÉÂTRE NATIONAL DE CHAILLOT, LE THÉÂTRE DE NAMUR, LE FESTIVAL MONTPELLIER DANSE 2017, LE TEATRO SAN MARTIN BUENOS AIRES, LE THÉÂTRE-SÉNART SCÈNE NATIONALE, LA BATIE – FESTIVAL DE GENEVE. AVEC LE SOUTIEN DE L’INSTITUT FRANÇAIS.
Durée: 1h30Rond-Point
5 – 15 SEPTEMBRE 2019
SALLE : RENAUD-BARRAULT
HORAIRES : DU MARDI AU SAMEDI, 18H30 – DIMANCHE 15 SEPTEMBRE, 15H – RELÂCHE : LES 9 ET 10 SEPTEMBRE
Avec cette profusion de danses révélant une étonnante plasticité de la part de tous les danseurs, « El Baile » prend des allures de session où chaque mouvement en efface un autre, comme si l’on tournait inlassablement le bouton d’une radio. Montage accéléré, précipitation de formes et de corps qui culminent au moment où tous les danseurs, alignés sur le devant de la scène, se livrent à une prestation échevelée, empreinte de gestes et de déhanchements lascifs. Volonté d’affirmer encore plus une singularité joyeuse, crâne.