En tournée depuis plus de trois ans, le spectacle tout public de la jeune metteuse en scène convainc et séduit les spectateurs pré-adolescents grâce à son esthétique travaillée et à ses mots simples mis sur des maux complexes.
« Madame, c’était super ! J’ai pleuré au début et ri à la fin. » Au vu des réactions, majoritairement enthousiastes, d’un public souvent jeune, peu ou prou du même âge que les personnages qui leur font face, Pauline Bureau a réussi son coup. Avec Dormir 100 ans, qu’elle tourne depuis plus de trois ans, la jeune metteuse en scène relève un ambitieux défi, celui de parler à un public pré-adolescent, de mettre des mots sur leurs tourments intimes, de leur donner une caisse de résonance théâtrale pour qu’ils se sentent moins seuls avec des doutes existentiels qui, sous leurs airs personnels, sont, en réalité, fondamentalement universels.
Cruel âge que celui de l’adolescence, pour les enfants qui la vivent comme pour les parents qui la subissent. Redoutée par tous, cette période de transition place des êtres au cuir encore peu tanné au milieu du gué, à mi-chemin entre le cocon protecteur de l’enfance, qu’ils s’apprêtent à quitter, et l’incertitude d’une vie d’adulte, dont ils ont encore toutes les difficultés du monde à apprécier les modalités et les ressorts. Cette double instabilité, Pauline Bureau l’incarne dans un duo complémentaire, comme les deux parties d’un même symbole.
Jeune fille en proie à des changements corporels qu’elle accepte, mais qu’elle veut saisir pour mieux les contrôler, Aurore a 12 ans. Délaissée par ses parents qui lui préfèrent les concours de cha-cha, victime d’un ersatz de TOC qui la pousse à tout compter de manière compulsive, elle se prend plusieurs dizaines de fois par jour en photo, histoire de mieux appréhender l’arrivée de la puberté. De l’autre côté du miroir, Théo a 13 ans. Garçon solitaire, il se réfugie dans les jeux vidéos et attend, chaque soir, son père, en compagnie du roi grenouille, le héros de sa BD préférée devenu son ami imaginaire et le point d’ancrage de son enfance. L’un et l’autre vont se retrouver sur les bancs de l’école d’abord, dans les rêves du jeune homme ensuite. Soudés par leur désir naissant, les deux ados calment leur appréhension, et forment une équipe pour affronter un âge, que les parents dépassés ne comprennent pas forcément.
Avec la sensibilité qu’on lui connait, Pauline Bureau mêle le réalisme des maux à l’onirisme des situations. Créature hybride dopée aux références issues de contes pour enfants – le titre évoque La Belle au bois dormant, quand le lapin effrayant semble tout droit sorti d’Alice aux pays des merveilles – son spectacle repose sur un texte simple, sans être simpliste, édifié à partir des témoignages de jeunes de 11 à 15 ans, issus du collège normand d’Aumale, mais aussi de réflexions de psychanalystes, de récits, d’images et de poésies. Grâce une scénographie travaillée, tant d’un point de vue visuel que musical, par Yves Kuperberg et Vincent Hulot, la metteuse en scène capte l’attention, souvent fluctuante, de ce public particulier et lui permet d’apprécier une langue qui est, sans faux modernisme, très proche de la leur. Puissamment réflexif dans les thématiques courantes qu’il aborde, il est soutenu par une belle troupe de comédiens – en alternance – qui passent, avec la même aisance, et notamment Camille Bernon, du corps de l’adolescent à ceux des parents. Tout un symbole.
Vincent BOUQUET – www.sceneweb.fr
Dormir 100 ans
Texte et mise en scène, Pauline Bureau
Avec Yann Burlot en alternance avec Lionel Codino, Nicolas Chupin en alternance avec Alban Guyon, Marie Nicolle en alternance avec Valentine Alaqui et Camille Bernon, et Camille Garcia en alternance avec Murielle Martinelli et Géraldine Martineau
Dramaturgie, Benoîte Bureau
Scénographie et réalisation visuelle, Yves Kuperberg assisté de Alex Forge
Composition musicale et sonore, Vincent Hulot
Costumes et accessoires, Alice Touvet
Création lumière, Bruno Brinas
Collaboration artistique, Cécile Zanibelli
Production La Part des Anges ; Coproduction Théâtre Dijon Bourgogne – CDN, Le Volcan – Scène nationale du Havre, Théâtre de Chevilly-Larue André-Malraux
Avec le soutien de l’Adami et l’aide à la création de la ville de Rouen
Résidence de création Théâtre Paris Villette et Théâtre Dijon Bourgogne – CDN
Remerciements au Nouveau Théâtre de Montreuil pour la mise à disposition d’une salle de répétitions
La Part des Anges est conventionnée par le ministère de la Culture / Drac Normandie au titre du dispositif compagnies à rayonnement national et international. Elle est également conventionnée par la Région Normandie.
Le texte est publié aux éditions Actes Sud-Papiers, collection Heyoka Jeunesse.Durée : 1 h
Théâtre de la Colline, Paris
Du 11 au 23 décembre 2018Grand T, théâtre de Loire-Atlantique, Nantes
Du 4 au 8 février 2019Espace Marcel-Carné, Saint-Michel-sur-Orge
Les 15 et 16 févrierTrioS, Inzinzac-Lochrist
Les 28 février et 1er marsPont des Arts, Cesson-Sévigné
Les 3 et 4 marsCentre culturel Jacques Duhamel, Vitré
Du 10 au 12 marsScènes et Cinés / Le Théâtre, Fos-sur-Mer
Les 22 et 23 marsPôle en scène, Bron
Les 28 et 29 marsLe Carré, Sainte-Maxime
Les 1er et 2 avrilTrès tôt Théâtre, Scène conventionnée de Quimper
Les 29 et 30 avril
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