Avec un groupe de danseurs survoltés, la chorégraphe danoise déploie une cacophonie gestuelle et musicale où se percutent dansomanies médiévales et esthétique de la rave. Un écho à l’état du monde qui peine toutefois à nous emporter.
Désormais bien repérée en France, la chorégraphe danoise Mette Ingvartsen n’a cessé d’investiguer la dimension politique des corps et des espaces depuis une petite dizaine d’années. Avec The Dancing Public (2021), créé pendant la pandémie de Covid, elle explorait dans un solo communicatif les manies dansantes médiévales, créant un espace pour se retrouver et bouger ensemble. Elle poursuit cette recherche dans Delirious Night, avec neuf danseuses et danseurs sur scène, créant une cacophonie de sons et de gestes qui font écho aux crises du monde.
Les interprètes descendent des marches pour parvenir sur scène. La plupart portent des masques de squelettes, d’animaux ou des cagoules. Ils et elles sont pour la plupart torse nu. On croirait assister à un rituel ou aux prémices d’un carnaval. Avec ses échafaudages et ses guirlandes, la scénographie rappelle les immenses rampes de skate de son précédent Skatepark (2023). On se croirait presque à la fête foraine. Une batterie surélevée sur l’un des échafaudages assène une percussion régulière, qui agite le groupe, éclaté un peu partout dans l’espace scénique.
Reprenant l’imaginaire des folies dansantes, ces danses frénétiques et contagieuses qui ont été documentées à plusieurs moments au Moyen-Âge et au début de l’époque moderne, Delirious Night fait jaillir une danse chaotique, qui renferme en elle une multiplicité de gestes disparates. On y aperçoit une ronde, des coups de pied assénés dans l’espace, les ondulations du bassin d’un pas de salsa, l’imitation de chiens à quatre pattes… Des duos se forment pour esquisser quelques phrases dansées ensemble. Une énergie extatique se répand, qui, surplombée par la batterie, des chants, des cris, portés par plusieurs mégaphones, rend l’ensemble assez incompréhensible.
Presque au bord de la surcharge cognitive, sensorielle, kinesthésique, la frénésie se calme. Mais l’ambiance demeure toujours aussi lourde. On se demande si cette pièce reflète l’excitation, la fatigue ou la torpeur collective dans lesquelles nous plonge l’état du monde, effréné et en crise permanent. Peut-être tout à la fois. Cet espace est-il un exutoire pour les gestes et les états qui, habituellement, perturberaient l’ordre ? Doit-on voir la danse comme une forme d’exutoire ? En dépit de clins d’œil amusants témoignant de recherches approfondies sur les dansomanies, ici transposées dans un contexte de rave, ce foisonnement survolté de gestes peine à avoir du sens, nous laissant un peu sur le côté.
Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr
Delirious Night
Concept et chorégraphie Mette Ingvartsen
Avec Dolores Hulan, Júlia Rúbies Subirós, Fouad Nafili, Jayson Batut, Mariana Miranda, Olivier Muller, Zoé Lakhnati, Thomas Bîrzan, Elisha Mercelina
Musique live et composition Will Guthrie
Création lumières Minna Tiikkainen
Dramaturgie Bojana Cvejić
Costumes Jennifer Defays
Textes et paroles Mette Ingvartsen, GRLwood, Sari et Romy Lightman
Directeur technique Hans Meijer
Ingénierie sonore Milan Van Doren
Technicien lumière Bennert Vancottem
Techniciens en tournée Jan-Simon De Lille, Filip VilhemssonProduction Great Investment
Coproduction Kunstenfestivaldesarts, Kaaitheater, Kunstencentrum VIERNULVIER, Charleroi danse, Le Lieu Unique, Cndc Angers, PACT Zollverein, Theater Rotterdam, La Comédie de Clermont-Ferrand, Théâtre National de Bretagne, Le Quartz, Festival Madrid en Danza, Perpodium, Festival d’Avignon
Résidences Charleroi danse, Rosas, Le Lieu Unique, P.A.R.T.S.
Avec le soutien de la Fondation Ammodo et de la Fondation d’entreprise Hermès
Great Investment est soutenu par les Autorités flamandes, la Commission communautaire flamande (VGC), le Tax Shelter du Gouvernement fédéral belge et le Conseil danois des artsDurée : 1h
Vu en mai 2025 au Cultuurcentrum De Factorij, Bruxelles (Belgique), dans le cadre du Kunstenfestivaldesarts
Festival d’Avignon, Cour du Lycée Saint-Joseph
du 7 au 12 juillet, à 22hThéâtre de la Cité Internationale, Paris, dans le cadre du Festival Transforme
du 9 au 11 octobreFestival ImPulsTanz, Vienne (Autriche)
du 16 au 18 juilletFestival Bolzano Danza (Italie)
le 24 juilletVIERNULVIER, Gand (Belgique)
les 1er et 2 octobreTheater Rotterdam (Pays-Bas), dans le cadre du Feeling Curious Festival
le 4 octobreLa Biennale de Charleroi Danse (Belgique)
le 18 octobreLeietheater, Deinze (Belgique), dans le cadre du Next Festival
le 13 novembre
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