Henri-René Lenormand a été considéré comme un auteur représentatif du théâtre d’avant-garde de son époque, et novateur par les thèmes qu’il a abordés. Il a lu Freud, mais aussi Strindberg qu’il admire. Henri-René Lenormand très reconnu à son époque, n’a laissé aucune trace aujourd’hui, son œuvre a totalement disparu. Lorsqu’en 1934 il écrit le Crépuscule du théâtre il nous fait vivre en direct, l’agonie d’un théâtre contraint de fermer pour laisser place à une activité plus rentable, le cinéma. Alors, nous entrons par la porte de derrière, celle du personnel, l’entrée des artistes. Couloirs sombres qui conduisent à des loges aménagées, dégagements encombrés de vieux décors. On a le sentiment qu’ils habitent tous là, derrière. Toute une faune – tout un bestiaire- vit, dort et répète, les derniers instants d’un monde qui est en train de sombrer. L’auteur, dans la pièce se bat pour faire vivre son texte. Il s’oppose aux acteurs, est trahi par une vedette, massacré par un metteur en scène et finalement méconnu du public. Henri-René Lenormand se lance dans une grande entreprise de dérision. Pas étonnant que le directeur rêve de monter la Tempête de Shakespeare dans la pénombre d’un plateau sans décor. Cette vision de fin du monde est assez noire. Les personnages en fin de course s’agitent pour survivre tant bien que mal. Il y a sous les dialogues qu’on entend, des sous-entendus qui frôlent la folie. Cette cruelle lucidité de Lenormand, qui n’exclut pas du tout l’humour, résonne pour nous. Le Crépuscule du Théâtre se termine par un monologue, où un acteur, assez brechtien, s’adresse frontalement au public et le conjure de réagir à cette fatalité qui ferait du théâtre un art en voie de disparition. C’est une certitude pour tout le monde, qu’aujourd’hui aussi, nous sommes à la fin d’une histoire. La disparition des repères ne se limite pas au seul domaine économique. Elle est protéiforme et semble se propager rapidement à l’ensemble de notre société et atteint par là même le théâtre, qui touché de plein fouet subit à chaque instant cette onde de choc. Alors que nous sommes encore sidérés des dernières pages de l’histoire récente, nous devons, plus que jamais, rêver les utopies et écrire la première page de celle qui va commencer.
Nous avons travaillé avec Alison Cosson sur cette pièce de Lenormand. Elle nous attirait souvent par les atmosphères oniriques et cinématographiques qu’elle proposait, mais aussi nous agaçait par son lyrisme ampoulé et sa poésie surannée. L’enjeu était de comprendre ce que nous pouvions tirer de cette langue, si nous la rendions plus minimaliste, plus lapidaire. En la coupant de manière chirurgicale, nous voulions conserver néanmoins son style daté et plein de charme qui rappelle le phrasé du cinéma français de l’entredeux-guerres. Puis j’ai demandé à Alison si elle pouvait imaginer écrire de nouveaux textes qui trouveraient des entrées dans la pièce en offrant un changement temporaire de sujet dans le cours du récit ou pour évoquer des situations parallèles. Je crois beaucoup à la confrontation de ces deux écritures. Note d’intention de Patrice Bigel Avril 2016
Déjà la fin ?
Texte : Henri-René Lenormand. Alison Cosson
Mise en scène : Patrice Bigel
Scénographie, lumières, costumes : Jean-Charles Clair
Son : Patrice Bigel. Clément Mathis.
Avec :
Simon Cadranel, Raphaële Carril, Roland Dupouy, Karl-Ludwig Francisco, Mirjana Kapor Huerre, Charly Hamel, Martine Lamy, Françoise Léger, Émilie Olivier, Mélanie Prévot, Valentine Riedinger, Gilles Vanbunnen, Éloïse Vereecken.
Administration, production : Agnès ChaigneauCOMPAGNIE LA RUMEUR USINE HOLLANDER
1, rue du Docteur Roux F-94600 Choisy-le-Roi
Accès RER C / Station Choisy-le-Roi
www.compagnielarumeur.com
Du 27 au 29 mai 2016
du 10 au 12 juin
du 17 au 19 juin 2016
vendredi, samedi 20.30 dimanche 18.00
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