Ces Coupures désignent celles qui séparent de plus en plus les élus de ceux qu’ils sont censés représenter. Co-écrit et co-mis en scène par Paul-Eloi Forget et Samuel Valensi, ce spectacle, qui en appelle à davantage de démocratie participative, fonctionne mieux sur son versant politique que sur sa mise en œuvre spectaculaire.
Démocratie représentative, démocratie participative. L’aspiration à davantage de participation de la population aux décisions politiques grandit dans la société. Elle fut par exemple portée par les Gilets jaunes et le fameux RIC (Référendum d’Initiative Citoyenne) ou encore par la Convention Citoyenne pour le Climat. Dans cette dynamique, Coupures raconte l’histoire d’un maire écologiste et intègre qui finit pourtant par accepter l’installation d’antennes 5G sur sa commune rurale. Un retournement spectaculaire qui illustre l’impérative nécessité que les citoyens s’impliquent davantage (et soient davantage impliqués) dans les décisions qui les concernent.
Tout commence donc avec le constat d’une faillite de la représentativité. Un brin facile, un brin convenu, sur les déceptions qu’engendre l’élection de représentants qui, ensuite, ne respectent pas leurs engagements de campagne. Voilà, en réalité, les spectateurs devenus les participants d’une réunion dans la commune dirigée par Frédéric, où ce dernier doit rendre compte à ses administrés de sa décision d’accepter l’installation d’antennes 5G. Pourtant, au départ, Frédéric était bien du genre amish, comme Emmanuel Macron a qualifié ceux qui s’opposent ou demandent un moratoire sur l’installation de ces antennes. Jeune agriculteur écolo à la tête d’une exploitation bio de 200 hectares, il balaie d’abord fermement les approches des représentants des opérateurs, mais cela ne dure pas. Pris entre des problèmes financiers, la toute-puissance d’entreprises privées fortunées et la duplicité des représentants de l’État, le jeune père et maire va petit à petit céder.
Le texte co-écrit et co-mis en scène par Paul-Eloi Forget et Samuel Valensi joue sur plusieurs registres. Une dimension documentaire qui laboure à la fois la question du développement de la 5G, de la répartition des pouvoirs et des réalités rurales. Une dimension satirique qui croque, par exemple, la mécanique des subventions et les émissions télé. Et enfin, le développement d’une intrigue qui tente de bâtir un suspens autour de l’incroyable retournement de veste du maire, qui paraît parfaitement assumer son acte. Le tout entremêle la réunion municipale et des retours dans le passé qui doivent permettre de comprendre comment tout cela a pu se produire.
Cela fait beaucoup, peut-être un peu trop. Les passages satiriques paraissent souvent un peu gratuits, et pas très drôles. L’intrigue mise sur les mécaniques de l’endettement, sur le dilemme entre intérêt personnel et général, la confrontation des idéaux à une réalité malheureusement plus complexe, et développe ainsi des schémas déjà souvent parcourus. Un chemin un peu long sur la voie d’une démonstration en faveur d’une démocratie participative qui se révèle finalement assez didactique. Comme si, à vouloir trop étreindre, Coupures embrassait maladroitement son sujet, ses sujets. Sans compter quelques problèmes de vraisemblance.
S’il ne ménage pas vraiment de surprises et s’adonne à quelques facilités, le spectacle n’en a pas moins le mérite de déployer un univers largement méconnu : celui des zones rurales, des rapports entre l’État, l’Europe, les collectivités et les individus. De s’aventurer sur une thématique clivante suivant un angle original, qui, plutôt que de les opposer, cherche à montrer combien démocratie représentative et participative ont besoin l’une de l’autre. Progressant par scènes courtes et sur un rythme enlevé, Coupures s’empare aussi de cette brûlante question du poids de l’engagement personnel quand la société paraît basculer du côté sombre de la force. Sans naïveté ni incantation, dans un pragmatisme de colibri propre à relancer l’espoir et l’action.
Eric Demey – www.sceneweb.fr
Coupures
Écriture et mise en scène Paul-Eloi Forget, Samuel Valensi
Avec June Assal, Michel Derville, Paul-Eloi Forget, Valérie Moinet, Samuel Valensi, Lison Favard en alternance avec Emelyne Chirol
Composition musicale Lison Favard
Création sonore Julien Lafosse
Création lumières Angélique Bourcet
Scénographie Julie Mahieu et Sandrine Lamblin
Création vidéo Florian Moreau
Régie Frédéric Evrard
Avec le précieux regard de Nathalie JuvetProduction La Poursuite du Bleu
Soutiens Ground Control ; Fluctuart ; Théâtre du Rond-Point ; Théâtre du Marché Jouy-en-Josas ; Jean Despax ; Michel Derville ; Margaux Gregoir ; Nicolas Laugero-LasserreDurée : 1h30
Vu au Théâtre de l’Oeuvre en janvier 2023
Théâtre de la Concorde, Paris
du 14 au 19 novembre 2024Théâtre Coluche, Plaisir
le 15 novembreBicubic, Romont
le 22 novembreThéâtre de Caudry
le 26 novembreEspace Culturel La Traverse, Bourget-du-Lac
le 28 novembreThéâtre d’Yssingeaux
le 29 novembreLe Théâtre de Fos, Fos-sur-Mer
le 7 décembreL’Odyssée La Gobinière, Orvault
le 10 décembreLe Quatrain, Haute Goulaine
le 11 décembreThéâtre – Centre Brassens, Avrillé
le 12 décembreSalles des fêtes d’Aunay-sur-Odon, Les Monts d’Aunay
le 26 mars 2025Salle Robert Métairie du Nom, Thury-Harcourt
le 28 marsSalle des fêtes d’Evercy
le 29 marsEspace Culturel Philippe Noiret, Les Clayes-sous-Bois
le 4 avrilThéâtre de Morteau
le 15 mai
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !