En cette période de profonde transformation du paysage politique français, la pièce de Jean-Noël Jeanneney vient à son heure, car elle nous ramène aux fondamentaux de la vie publique : notre contrat social, le socle civique des valeurs républicaines, notre Constitution inspirée par l’esprit des Lumières. « L’Un de nous deux » propose une réflexion salutaire sur les solidarités qui peuvent réunir la gauche et la droite face au péril des fascismes.
En 1944, Léon Blum, homme de gauche, et Georges Mandel, homme de droite, sont prisonniers des Allemands depuis de nombreux mois, cloîtrés dans la même maison et conduits à dialoguer jour après jour en dépit de leurs antagonismes. L’ancien président du Conseil Léon Blum et l’ancien ministre de l’Intérieur Georges Mandel ont été livrés à Hitler par Pétain afin qu’ils puissent servir d’otages pour de possibles représailles. En attendant, ces deux vaincus de l’avant-guerre ne peuvent que se raconter l’un à l’autre. Léon Blum a été tout proche de Jaurès, magnifique inspirateur de la gauche socialiste, qui aurait tant voulu empêcher la guerre de 1914, et Mandel collaborateur de Clemenceau, personnage non moins emblématique, qui l’a gagnée. Tous deux défendent avec passion celui qui les a formés en politique et à qui ils restent indéfectiblement fidèles.
La pièce se déroule en un jour et demi dans le salon d’une petite maison bourgeoise située aux environs du camp de concentration de Buchenwald, à quelques kilomètres de Weimar. Au fil du dialogue, tantôt sombre et tantôt lumineux, se déploie à nos yeux le paysage politique de la France de 1870 à 1944, à travers les souvenirs de ces deux témoins essentiels. Blum et Mandel savent que la victoire est désormais acquise, car les Alliés ont débarqué en Normandie. Bien qu’ils ne soient pas sûrs d’en voir le jour, ils envisagent déjà les luttes qui les opposeront à l’avenir. Ils tentent de deviner de quoi sera fait le futur de la France. Et c’est ici que le public entre en jeu puisque, comme dans une tragédie classique, nous savons déjà ce que les protagonistes ne savent pas encore. Et nous suivons l’histoire de ce long combat entre une droite et une gauche, selon toutes les ironies du destin, les catastrophes et les succès qui sont, pour les protagonistes, imprévisibles mais dont ils ont pourtant la prescience.
Pour interpréter ces deux hautes figures, il fallait trouver des comédiens nourris d’une forte culture politique. C’est le cas de Christophe Barbier (Georges Mandel), ancien rédacteur en chef de l’Express et journaliste reconnu à la télévision et celui d’Emmanuel Dechartre (Léon Blum), fils de Philipe Dechartre qui fut résistant et Ministre du Général de Gaulle et qui accueillit Léon Blum à Paris lors de son retour de déportation.
Servie par ces deux interprètes, la politique s’incarne dans des registres profonds, ironiques et sensibles où l’intelligence scintille et nous offre une leçon de démocratie.
Jean-Claude IDÉE – metteur en scène
L’UN DE NOUS DEUX – MANDEL / BLUM
de Jean-Noël Jeanneney
Avec: Christophe BARBIER, Emmanuel DECHARTRE et Simon WILLAMEDe: Jean-Noël JEANNENEY
Mise en scène: Jean-Claude IDÉE
Costumes: Sonia BOSC
Décor et lumières: Jean-Claude IDÉE
Durée du spectacle: 1h25Théâtre Montparnasse
A partir du 9 juin 2021 à 19h
Du mardi au samedi à 19h – dimanche à 17h / relâches les 16, 17 et 27 juin.
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