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Charlie derrière Charlot

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Cliff Paillé crée Chaplin 1939 au Lucernaire Laurent Sabaté
Cliff Paillé crée Chaplin 1939 au Lucernaire

Photo Laurent Sabaté

Au Lucernaire, le dramaturge et metteur en scène Cliff Paillé sonde la part d’ombre de Chaplin. Grâce à l’étonnante prestation de Romain Arnaud-Kneisky, il révèle, tout à la fois, les ressorts du génie de l’artiste et les troubles errements de l’homme.

Dans l’imaginaire collectif, Chaplin ressemble davantage à Charlot qu’à Charlie. Petite moustache et chapeau melon, canne à la main et démarche mal assurée, il s’est construit, comme peu, une aura capable de traverser les frontières, de résister au temps et de séduire les foules, jusqu’à se confondre presque totalement avec ce personnage, drôle (Les Temps modernes), protecteur (Le Kid) et émouvant (Les Lumières de la ville), et réussir à faire oublier qu’il s’agissait, en réalité, d’un avatar créé de toutes pièces. Car le Charlie de la ville est loin, bien loin, du Charlot de l’écran. Et c’est tout l’enjeu de la pièce de Cliff Paillé, Chaplin, 1939, que de révéler l’homme-artiste derrière l’acteur, façon de fissurer, sans la briser totalement, l’image d’Epinal dans laquelle il est, encore aujourd’hui, dans nombre d’esprits, confortablement installé.

1939 n’a rien d’une date choisie au hasard au regard du tournant qu’elle représente dans la carrière du cinéaste. A l’époque, Chaplin a déjà pas mal de beaux succès (Les Lumières de la ville, Les Temps modernes) et quelques jolis ratés (L’Opinion publique) à son actif. L’essentiel de son prestige et de sa renommée est assuré, mais l’artiste se risque au chamboule-tout. Préoccupé par la montée des nationalismes et du fascisme en Europe, il décide de s’en prendre frontalement à l’un des hommes les plus puissants du moment, Adolf Hitler, pour dénoncer sa folie, son ivresse du pouvoir et le tourner en ridicule. Au fil de l’écriture du scénario du Dictateur, il redouble d’audace et choisit d’abandonner le muet qui, s’il a fait son succès par le passé, lui semble dépassé et peu efficace pour délivrer son message directement politique.

Pour lui donner le change, et la contradiction, Cliff Paillé fait intervenir deux des figures-clés de sa vie d’alors : son demi-frère, Sydney, et sa compagne de l’époque, Paulette Goddard. Chacun à leur endroit, artistique pour le premier, intime pour la seconde, ils vont, par la résistance qu’ils lui imposent, souligner ses fulgurances, pointer ses failles et lever le voile sur les facettes moins reluisantes de sa vie. Artiste de génie, qui cherche et bâtit tel un artisan, qui puise et se nourrit tout à la fois de l’intellectuel et du corporel, il est aussi un homme qui, au quotidien, se laisse dévorer par une nervosité omniprésente et mettre en danger par des aventures avec de jeunes, voire très jeunes femmes. Père absent, mégalo en puissance, dual dans ses relations, Chaplin voit son étoile ternie par ces révélations, sans que Cliff Paillé ne cherche, et c’est là toute la finesse de son geste, à noircir grossièrement et gratuitement le tableau. Tout est, dans son écriture, affaire d’équilibre et de dosage, d’admiration voilée et d’allusions subtiles.

Surtout, son spectacle profite de l’étonnante prestation de Romain Arnaud-Kneisky, qui le tient presque tout entier sur ses épaules. Dans une élégante scénographie en noir et blanc, le comédien incarne avec doigté la double-face de Charlie-Charlot, de l’artiste tourmenté et de l’homme qui brûle d’être aimé. Tout juste pourra-t-on regretter que la mise en scène habilement cadencée ait sans doute perdu, après son rodage intensif lors du Festival Off d’Avignon, une partie de la sensibilité qu’elle devait avoir aux premiers instants de sa création. Reste, malgré tout, cette ultime scène dont les multiples représentations n’auront pas émoussé la beauté. Dans un élan crépusculaire, Charlie s’y transforme, une dernière fois, en Charlot, comme pour dire adieu à ce compagnon de route essentiel et, avec lui, à la période la plus faste de sa carrière.

Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr

Chaplin, 1939
Texte et mise en scène Cliff Paillé
Avec Romain Arnaud-Kneisky, Swan Starosta et Alexandre Cattez
Assistante à la mise en scène Sophie Poulain
Lumières Yannick Prévost
Vidéo Samuel Govindin

Production Compagnie Hé ! Psst !
Coréalisation Théâtre Lucernaire
Partenaire Ville de Billère
Soutien Ville de Pau

Durée : 1h15

Le Lucernaire, Paris
du 25 août au 10 octobre 2021
A 20h du mardi au samedi, 15h le dimanche

Espace Julien Green, Andrésy
le 25 mars 2022

Petit Athénée, Rueil-Malmaison
le 5 avril 2022

1 septembre 2021/par Vincent Bouquet
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