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« Le Moche », laid frais

A voir, Les critiques, Paris, Théâtre
Aurélien Hamard-Padis met en scène Le Moche de Marius von Mayenburg au Studio-Théâtre de la Comédie-Française
Aurélien Hamard-Padis met en scène Le Moche de Marius von Mayenburg au Studio-Théâtre de la Comédie-Française

Photo Vincent Pontet / Coll. Comédie-Française

Une histoire folle et éloquente. Aurélien Hamard-Padis exhale avec simplicité et habileté toute l’actualité du Moche. À la Comédie-Française, le texte de Marius von Mayenburg n’a pas pris une ride et donne à voir combien notre société se perd dans l’image.

Le Moche, c’est avant tout une histoire qu’il serait dommage de dévoiler… Mais on ne peut pas s’arrêter là. À lui seul, le pitch dit combien l’auteur allemand Marius von Mayenburg a eu un coup de génie : un ingénieur apprend qu’il est terriblement laid par son patron. Sa femme le lui confirme. Il est vraiment horriblement moche, et c’est tellement évident que personne ne lui a jamais dit. Chamboulé par cette révélation, Lette décide de subir une opération de chirurgie esthétique. Son médecin se demande comment elle pourrait marcher. Mais, coup de chance, il réussit tellement bien son coup que Lette en devient proprement irrésistible. N’allons pas plus loin, tant Mayenburg excelle à faire évoluer cette histoire suivant des péripéties qui ne sont jamais sans écho avec notre monde. Questions d’identité, critique d’une société où la beauté sert à vendre tout et n’importe comment, multiplication irrésistible des visages botoxés qui se ressemblent tant et autres « Pourquoi s’aime-t-on ? » traversent les rebondissements d’une histoire loufoque, drôle et terriblement parlante.

Aurélien Hamard-Padis la met en scène dans un univers aseptisé, lisse et fluide comme le théâtre de Mayenburg. 39 scènes ponctuent en effet une action qui glisse avec une habileté remarquable d’une situation à l’autre. Tout au plateau respire sa modernité numérisée : surfaces miroitantes et matières sans aspérités, couleurs artificielles, open spaces modulables, scènes qui s’enchaînent comme les images que nos doigts chassent sur nos écrans, musique electro en mode easy listening. Ainsi, tout paraît irréel, et pourtant tellement vrai. Fonctionnant avec des comédiens qui jouent tous double rôle, Lette finit par se dédoubler, déchiré entre son être et son image, comme nous y tendons toutes et tous dans cette société où chacun soigne sa publicité. Le fils pervers d’une mère dominatrice est aussi le collègue qui voudrait prendre la place de Lette ; la femme de ce dernier une septuagénaire refaite de fond en comble, et plus que portée sur la chose ; le médecin également le patron. Ces dédoublements qui huilent les enchaînements sont en même temps très éloquents, et le jeune metteur en scène fait ainsi preuve d’une grande malice dramaturgique qui, comme les personnages de la pièce, s’efface en se montrant.

Aurélien Hamard-Padis est un ancien de Centrale. Peut-être cette histoire d’ingénieur lui a-t-elle d’autant plus parlé. Entré par le dispositif de l’Académie à la Comédie-Française, il arpente les lieux depuis six ans. Après Le Roi s’amuse contrarié par le Covid, c’est sur la scène du Studio-Théâtre qu’il monte son premier spectacle avec les comédiens de la grande maison. Comme d’habitude, toutes et tous sont impressionnants : Thierry Hancisse persuade aussi aisément qu’il est laid ou qu’il est beau, Sylvia Bergé qu’elle est une épouse aimante ou une senior nymphomane, Thierry Godard un collègue opportuniste ou un fils voyeur, et Jordan Rezgui un médecin inconséquent ou un patron sans scrupule. À travers cette histoire fantastique qui laisse miroiter les travers d’une société du paraître, sans morale ni conscience bien enracinées, les spectateurs voient flotter devant leurs yeux la dématérialisation d’un monde de plus en plus virtuel, flou et instable, où l’image fait écran au point que disparaît le réel. Écrit en 2008, le texte de Mayenburg est dans cette mise en scène botoxée d’une sorte de prescience et monté de manière à en magnifier l’extraordinaire habileté. Une réussite.

Eric Demey – www.sceneweb.fr

Le Moche
de Marius von Mayenburg
Traduction Laurent Muhleisen
Mise en scène Aurélien Hamard-Padis
Avec Thierry Hancisse, Sylvia Bergé, Jordan Rezgui, Thierry Godard
Scénographie Salma Bordes
Costumes Claire Fayel
Lumières Jérémie Papin
Son Antoine Richard
Réalisation des décors et costumes Ateliers de la Comédie-Française

Avec le généreux soutien d’Aline Foriel-Destezet, grande ambassadrice de la création artistique

L’Arche est éditeur et agent théâtral du texte représenté.

Durée : 1h15

Studio-Théâtre de la Comédie-Française, Paris
du 27 mars au 4 mai 2025

31 mars 2025/par Eric Demey
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