Ariane Mnouchkine est de retour après quatre ans d’absence à la Cartoucherie dans son Théâtre de Soleil. Pour fêter le 50ème anniversaire du théâtre, elle renoue avec Shakespeare et présente une version de Macbeth avec sa troupe composée de 40 comédiens. Le public attendait cela avec impatience. Rencontre avec une figure essentielle du théâtre français.
Votre Macbeth est transposé au 20ème siècle, pourquoi ?
Ce n’est pas vraiment une transposition car Shakespeare lui-même ne date pas la pièce. Il n’y a pas besoin de tordre la pièce pour qu’elle puisse être vécue et reconnue à notre époque. Il fallait cela pour que les jeunes en particulier ne la regarde pas avec une distance. Plus qu’une pièce sur la tyrannie, c’est une pièce sur l’avidité. Cet homme ne peut plus s’arrêter de dominer, de tuer, de posséder. Shakespeare connaît ces choses par cœur. On a le sentiment qu’il fait une psychanalyse et qu’il a rencontré Freud ! Il dit des choses tellement fortes sur les pulsions, sur la damnation, sur le mal.
Votre spectacle est une grande épopée avec un rythme soutenu…
La pièce est comme cela, elle galope. C’est sa pièce la plus courte en nombre de vers. Il est au sommet de son art. Il y a du rythme car il le sens du théâtre. Il a le sens du suspens, de l’angoisse, de l’attente du drame qui va survenir. C’est un génie et il sait comment faire des recettes pour que son public trouve l’histoire palpitante.
Et votre spectacle est palpitant. Les scènes se succèdent dans un rythme endiablé et notamment on passe au début de la lande écossaise à un héliport !
Mais c’est dans la pièce, pas l’héliport bien sur ! Au début Macbeth a tout pour être heureux. Il est aimé, il a la gloire, il est courageux, c’est un héros, il est aimé de sa femme, de son ami. Il est glorifié par tous. Il est reconnu par le roi. Il a un beau château. Et tout cela ne suffit pas. Il se damne en une nuit et il perd tout.
Par moment vous en faites un couple un peu glamour, pourchasser par les paparazzi. Pourquoi ?
Il est régnant donc il est comme cela. A l’époque de Shakespeare il serait suivi par des courtisans. A notre époque la courtisanerie c’est un certain type de journalistes qui pensent que les Palais leur appartiennent.
Est-ce que ce spectacle qui marque le 50ème anniversaire du Théâtre du Soleil est plus important que les autres ?
Tous les spectacles sont cruciaux. C’est à chaque fois une quête, une recherche.
Les spectateurs sont ravis de vous retrouver. Est-ce que vous ressentez cette ferveur ?
Quand les gens arrivent ici, quand je déchire les billets, je ressent de l’affection. Et ils osent nous la dire. C’est extrêmement gratifiant quand les gens nous disent : « vous savez cela fait 30 ans que je vous connais, je vous aime beaucoup, j’attendais ce spectacle », « oh ça y est, vous savez on a attendue ! »…C’est extraordinaire. C’est délicieux. Je ressens de l’affection familière très agréable.
Propos recueillis par Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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