Dans sa nouvelle pièce présentée au Festival d’Avignon, l’artiste plasticienne et chorégraphe fait résonner un chant hybride et conquérant qui célèbre la puissance ancestrale des femmes et promeut le matriarcat comme alternative de société dans une proposition contre-productive, poussive et éculée.
Intéressée par les arts plastiques et performatifs, la recherche, la science, l’anthropologie, Mylène Benoit travaille le théâtre, la danse, la musique et a ainsi de quoi multiplier les entrées et les médias pour traiter de son vaste et nécessaire sujet : celui de la place des femmes. S’en saisir, c’est pour elle retourner à l’origine, au temps où seul existait le chromosome Y, avant que les mammifères ne se divisent en deux camps. C’est le sens du titre qu’elle donne à sa nouvelle pièce, Archée, qui signifie dans la philosophie grecque à la fois le commencement et la mère. Entre revendication et réparation, Archée est aussi l’arc qui traduit l’esprit de combat qu’impose l’entreprise de réhabilitation d’une communauté féminine injustement opprimée et invisibilisée.
L’œuvre privilégie donc le point de vue des femmes. Sa distribution exclusivement féminine comprend neuf interprètes au plateau. Elles sont danseuses, performeuses, musiciennes. Elles sont d’abord des voix criantes, stridentes, qui percent et déchirent au loin la nuit obscure et silencieuse tandis que le plateau du Cloître des Célestins reste longuement inhabité. Elles s’appellent, se répondent, puis apparaissent, lentement, prennent place de manière lascive, voire comateuse, dans leur agora sombre, abris précairement constitués de divers praticables. Elles vont quitter le sommeil et s’adonner à une troublante et haletante cérémonie expérimentale qui confine à la transe.
Le trip choral auquel elles se livrent fait se réunir et s’entrelacer les corps, les souffles, les voix. Il tient du rituel organique et respirant qui met en évidence l’aspect collectif et quasi animal de la communauté présentée. Le lien qu’elles entretiennent passe aussi bien par la bouche et la main que par l’oreille. La parole advient tardivement car elle circule chuchotée d’une oreille à l’autre avant d’être prononcée. A tour de rôle, et en parfaite égalité, chacune adopte la posture du coryphée relayé par ses sœurs formant le chœur.
Cette première partie du spectacle, sans doute déjà aride et longuette, se révèle néanmoins comme la plus captivante. Car, si la suite stagne et se délite, c’est qu’elle croule soit sous les excès, soit sous un manque crucial de propos et de pensée. Le discours est aussi lourdement délivré qu’insuffisamment étayé. Au point qu’on finit par ne voir que les faiblesses et les fragilités d’une proposition inaboutie, tant au niveau formel (décor, costumes, lumières, tout paraît d’un inesthétisme presque choquant) que dramaturgique. Restent la qualité et l’engagement des interprètes qui ne déméritent pas jusque dans un dernier tableau où elles se mettent à nu et se peinturlurent le corps entier. Les Amazones auront tout donné, bandé leurs arcs, tiré leurs flèches, mais manqué leur cible.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
Archée
Conception et mise en scène Mylène Benoit
Avec Célia Gondol, Hanna Hedman, Sophie Lebre, Agnès Potié, Marcela Santander Corvalán, Tamar Shelef, Wan-Lun Yu, et les musiciennes Pénélope Michel, Annabelle Playe
Chorégraphie Mylène Benoit avec Célia Gondol, Hanna Hedman, Sophie Lebre, Agnès Potié, Marcela Santander Corvalán, Tamar Shelef, Wan-Lun Yu
Musique et voix Pénélope Michel et Annabelle Playe, Anne-Laure Poulain
Dramaturgie Céline Cartillier
Dramaturgie sonore Manuel Coursin
Scénographie Rachel Garcia assistée de Angèle Guilly
Lumière Rima Ben Brahim
Costumes Frederick Denis, assisté de Louise Dael
Accessoires Maeva Cunci
Partage de pratiques voix et corps Émilie Domergue (cri et voix saturée), Marie-Pascale Dubé (chant de gorge), Laurence Oriou (kyudo), Anne-Laure Poulain (coach vocal), Nina Santes, Corine Sombrun / TranceScience Research Institute (transe)Production Contour Progressif
Coproduction Festival d’Avignon, le Phénix Scène nationale de Valenciennes, National Theater & Concert Hall (Taipei), Théâtre du Beauvaisis Scène nationale de Beauvais, Les Quinconces L’Espal Scène nationale du Mans, Viadanse Centre chorégraphique national de Bourgogne Franche-Comté (Belfort), L’Échangeur CDCN Hauts-de-France, La Manufacture CDCN Nouvelle-Aquitaine, Maison de la Culture d’Amiens Scène nationale, L’Empreinte Scène nationale de Brive-Tulle, Chaillot Théâtre national de la Danse, Centre Chorégraphique National Roubaix Hauts-de-France, Théâtre des 13 Vents CDN de Montpellier, Abbaye de Maubuisson avec la Villa Kujoyama, Festival NEXT, Le Gymnase CDCN Roubaix – Hauts-de-France
Avec le soutien de Région Hauts-de-France, Drac Hauts-de-France, Institut Français, Métropole Européenne de Lille, Ville de Lille, Art Zoyd, et pour la 75e édition du Festival d’Avignon : SpedidamDurée : 1h30
Festival d’Avignon 2021
Cloître des Célestins
du 17 au 23 juilletLe Phénix Scène Nationale, Valenciennes
les 2 et 3 décembreLa Manufacture – CDCN Nouvelle-Aquitaine Bordeaux La Rochelle
le 7 avril 2022Théâtre du Beauvaisis
les 6 et 7 maiChaillot – Théâtre national de la Danse, Paris
du 8 au 17 juin
Dans cette pièce de théâtre on frise le zéro absolu avec une mise en scène prise de tête minimaliste pour la musique la chorégraphie les paroles. Un chef-d’œuvre du néant assis sur une théorie matriarcale du genre du tout féminin. Bien dans l’air du temps. Je dirais même trop dans l’air du temps imposé par l’intelligentsia institutionnelle en totale perte de vitesse qui s’accroche à ses acquis minimalistes au détriment de la poésie et de l’émotion. Résultat les spectateurs se sont sauves par grappe dès le début du spectacle….