Jean Anouilh réécrit le mythe de Sophocle pendant l’occupation en 1944 lorsque les affiches rouges commencent à fleurir sur les murs de Paris. Ces affiches pro nazis pointent du doigt les résistants du groupe Manouchian (composé surtout de juifs polonais et d’arméniens). Sans prendre partie pour la Résistance, et en s’érigeant contre l’épuration à la libération, Jean Anouilh affirme plus tard avoir réécrit Antigone « avec la résonance de la tragédie que nous étions alors en train de vivre. » Jouée en 1944 au Théâtre de l’Atelier, la pièce est un succès. Les spectateurs sont émus par cette jeune fille qui résiste au pouvoir. C’est encore le cas aujourd’hui.
La mise en scène tout en sobriété de Marc Paquien donne à entendre ce texte magnifique, ce cri du cœur émouvant. On retient tout d’abord son souffle lorsque Clotilde de Bayser (le Chœur) présente les personnages de cette tragédie qui va se jouer devant nous. Françoise Gillard incarne une Antigone de caractère. « Voilà je n’ai plus peur » dit-elle. Cette femme résistante va s’opposer avec une belle fermeté à l’autorité. Face à Créon (formidable Bruno Raffaelli à la stature imposante), Antigone tient tête. Les scènes avec les deux comédiens sont tout simplement émouvantes, rendues impressionnantes par leur différence de taille. On est saisi de peur lorsque Bruno Raffaelli empoigne les petites mains fragiles mais déterminées de Françoise Gillard.
La pièce s’achève sur une image d’apocalypse. Les personnages s’alignent devant le cœur, laissant apparaître des visages blafards, les visages de la mort. C’est tout simplement beau et digne.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Antigone
Pièce en un acte de Jean Anouilh
mise en scène de Marc Paquien
Avec
Véronique Vella, la Nourrice
Bruno Raffaelli, Créon
Françoise Gillard, Antigone
Clotide de Bayser, le Choeur
Benjamin Jungers, le Messager
Stéphane Varupenne, le Garde
Nâzim Boudjenah, Hémon
Marion Malenfant, Ismène
et les élèves-comédiens de la Comédie-Française
Laurent Cogez, un garde
Carine Goron, le Page
Maxime Taffanel, un garde
Collaboration artistique, Diane Scott
Décor, Gérard Didier
Costumes, Claire Risterucci
Lumières, Dominique Bruguière
Son, Xavier Jacquot
Maquillages, Cécile Kretschmar
Assistante à la mise en scène, Lydie Selebran
Pour la première fois à la Comédie-Française
Durée 1h50
Salle Richelieu de la Comédie-Française
du 20 décembre 2013 au 2 mars 2014
mardi à 19h, du mercredi au samedi à 20h, dimanche à 16h, relâche lundi
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